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Françoise Nyssen précise les contours de sa loi contre les fake news aux Assises du journalisme de Tours

16 mars 2018

Temps de lecture : 4 minutes
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Françoise Nyssen précise les contours de sa loi contre les fake news aux Assises du journalisme de Tours

Temps de lecture : 4 minutes

De notre envoyé spécial. Coïncidence du calendrier, le Président Macron et la Ministre de la Culture se sont croisés à Tours le jeudi 16 mars 2018. Mais alors que le Président visitait écoles et centres d’apprentissage, la Ministre précisait, devant les journalistes réunis à Tours, son programme de lutte contre les fausses nouvelles.

La démocratie en danger

D’emblée, la Min­istre son­nait le toc­sin. “Notre démoc­ra­tie est men­acée par les fake news, qui ali­mentent la défi­ance”. Si les bobards ont tou­jours existé, le numérique en accroît la vitesse de dif­fu­sion et ampli­fie leur audi­ence. Au moment où qua­tre jour­nal­istes (au Brésil, Turquie, Yemen et Slo­vaquie, liste sans doute non exhaus­tive) ont été tués dans leur tra­vail dans le pre­mier trimestre de l’an­née en cours, Nyssen salue les jour­nal­istes “vigies de la démoc­ra­tie”, leur tra­vail, leur rigueur, leur déon­tolo­gie, un dis­cours lénifi­ant qui ne pou­vait que plaire à l’au­di­toire. Si l’arme des jour­nal­istes est la déon­tolo­gie, l’arme de l’État c’est le droit. Et l’État macronien entend pro­téger les jour­nal­istes, sans doute un peu gênés de tant de sollicitude.

Des précisions sur le projet de loi

Indépen­dam­ment de la future loi, l’État se portera au sec­ours de Pre­staliss (le prin­ci­pal dis­trib­u­teur de la presse écrite avec 75% du marché) en pleine décon­fi­ture après des années folles de salaires somptueux, de sur­ef­fec­tifs et de ges­tion au petit bon­heur la chance. Pas sûr que ce xème plan de sauve­tage soit plus effi­cace que les précé­dents, mais les patrons des grands groupes de presse qui con­trô­lent les quo­ti­di­ens ont obtenu satisfaction.

La future loi (en dis­cus­sion) com­porterait deux volets. Un volet con­cer­nant les “médias étrangers” en péri­ode élec­torale En réal­ité un arti­cle écrit sur mesure con­tre Rus­sia Today et Sput­nik, deux médias pub­liant en français et con­trôlés par l’a­gence russe d’État. Le CSA pour­rait sus­pendre ces médias tem­po­raire­ment, voire leur inter­dire d’émet­tre par tous moyens administratifs.

Le deux­ième volet con­cerne la dif­fu­sion de “fauss­es nou­velles” sur les réseaux soci­aux, avec un mot clé la “respon­s­abil­i­sa­tion” des acteurs du numérique (les GAFA). Pri­mo, ceux ci auront “un devoir de coopéra­tion avec l’État”. Sous peine de sanc­tions imag­ine t’on. Secun­do, en péri­ode élec­torale les con­tenus spon­sorisés devront faire preuve de trans­parence : orig­ine de l’in­for­ma­tion, iden­tité du financeur, mon­tant du finance­ment. Ter­tio, tou­jours en péri­ode élec­torale, un juge des référés pour­ra en 48 heures blo­quer une “fausse nou­velle”, voire faire sup­primer un compte.

Les critiques et les limites

Le Prési­dent des Assis­es Thomas Sot­to a exprimé ses doutes, con­statant les bonnes inten­tions, doutant de l’ef­fi­cac­ité, et ajoutant que le “con­trôle de l’in­for­ma­tion” fait cohab­iter deux mots qui ne font pas bon ménage. Cer­tains ont fait remar­quer que le juge s’in­sti­tu­ait en arbi­tre des vérités (voire de la Vérité tout court). La min­istre a rétorqué que pour qu’une infor­ma­tion soit cen­surée, elle devrait obéir à trois con­di­tions : être man­i­feste­ment fausse, être dif­fusée mas­sive­ment, être dif­fusée arti­fi­cielle­ment. La cam­pagne con­tre François Fil­lon lors de l’élec­tion prési­den­tielle de 2017 ne tomberait pas, par exem­ple, sous le coup de la loi.

Encadrer le public dès la jeune enfance

Tout ceci ne suf­fi­ra pas ajoute la Min­istre qui annonce un “pro­gramme édu­catif à déploy­er mas­sive­ment”. Elle dou­blera le bud­get des­tiné à l’é­d­u­ca­tion des médias qui passera de 3 mil­lions d’eu­ros annuels à 6 mil­lions. Elle souhaite recruter 400 jeunes du ser­vice pub­lic pour porter la bonne parole dans les écoles, des sortes de janis­saires du Bien. Et de citer le très lam­en­ta­ble Educ Arte comme exem­ple à suiv­re. Quand on con­naît le rôle néfaste du CLEMI, véri­ta­ble machine à décervel­er paleo social­iste, on peut s’in­quiéter sur le futur de nos jeunes têtes blondes. Une fois de plus l’en­fer se révèle pavé de bonnes intentions…

Crédit pho­to : Ojim. Licence (BY NC)

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