C’était en mai 2021, et les deux groupes annonçaient fièrement « TF1, M6, Bouygues et RTL Group annoncent aujourd’hui qu’elles ont conclu des protocoles d’accord d’entrée en négociations exclusives pour fusionner les activités de TF1 et M6 et créer un groupe de médias français d’envergure ». Trop ambitieuse, cette fusion/acquisition ne se fera pas !
L’Élysée perd contre l’autorité de la concurrence
C’est peu dire qu’Emmanuel Macron soutenait l’opération. Alors qu’Alexis Kohler s’agitait dans l’ombre pour la favoriser, Bruno Le Maire avait donné un avis favorable du côté des finances. Mais comme nous le soulignions dans notre article de mai 2021, les deux ensembles réunis dans la même entité, « le groupe contrôlerait plus de 43% de part d’audience sur la télévision et plus de 70% de la publicité télévisuelle en France, un casse-tête pour l’autorité de la concurrence ». L’accord du CSA n’aurait pas présenté de difficultés, le président du CSA est réputé pour avoir l’échine souple.
Isabelle de Silva, à l’époque responsable de l’Autorité de la concurrence, avait déclaré que ses services examineraient avec beaucoup d’attention la fusion et ses conséquences. Bouygues d’un côté et l’allemand Bertelsmann de l’autre auraient pu profiter de leur position hyper dominante sur le marché de la publicité télévisée pour imposer leur loi aux annonceurs comme aux consommateurs. Ses déclarations lui ont valu d’être sèchement débarquée et remplacée. Mais son successeur a tenu bon, demandant la cession d’une des deux grandes chaines à la concurrence soit TF1 soit M6. Les deux groupes ont alors constaté que la fusion ne présentait plus aucun avantage industriel.
D’un autre côté les journaux télévisés du soir des différentes chaines des deux groupes (TF1, M6, LCI, TMV etc) auraient représenté plus de 50% de l’audience de la tranche horaire, là aussi une position dominante non seulement économique mais aussi politique et idéologique.
M6 reste à vendre
Bouygues ne se séparera pas de TF1, mais M6 reste fragilisé par l’échec de la fusion qui avait été ardemment défendue par Nicolas de Tavernost, son président qui aurait pris la tête du nouveau groupe. Les prétendants ne manquent pas : Daniel Křetínský, le Tchèque qui accumule des fortunes en exploitant les centrales à charbon achetées à vil prix et devenues des diamants. Il s’intéresse à Libération et M6 représenterait un joli complément ; le trio Niel/Pigasse/Capton de Mediawan et du Monde ; Vincent Bolloré qui considère que son empire télévisuel en expansion demeure bien petit ; pourquoi pas Altice de Patrick Drahi même si ce dernier s’intéresse plus à la téléphonie mobile ces derniers temps qu’aux médias ; ou encore Mediaset de Berlusconi.