« Gardons l’esprit olympique » : quelques jours avant l’annonce de la composition de son gouvernement, le tant attendu premier ministre Michel Barnier anticipait déjà certaines tensions, et un climat relativement hostile selon Marianne et Franceinfo. L’exercice de divination se sera révélé pertinent : depuis la révélation des nouveaux ministres, personnalités, médias et politiques de tous horizons se déchaînent pour des raisons variées et souvent opposées.
Absurdité démocratique ?
Jour après jour, les éditos s’enchaînent dans la presse : pour Natacha Polony, directrice de la rédaction du journal Marianne, « ce gouvernement Barnier est une absurdité démocratique ». L’expression de cette célèbre journaliste à laquelle l’OJIM a dédié un portrait, reprise partout, semble être le slogan des pro-Castets et, plus généralement, de la frange défavorable au choix Barnier d’Emmanuel Macron.
« Le gouvernement Barnier est une absurdité démocratique, puisqu’aucun électeur, pas même ceux de LR, n’a voté pour lui. » Avec ou sans légitimité, le quotidien craint quoiqu’il en soit « un attelage très politicien qui aura bien du mal, pour agir, à dépasser les rivalités entre les différentes formations de la droite et du centre. »
L’Humanité, de son côté, dénonce une « influence sidérante de Marine Le Pen sur le gouvernement », une « emprise du RN » qui « inquiète même les macronistes ». Force est de constater que la mainmise est des plus subtiles, l’analyse se basant notamment sur un désaccord sémantique autour de l’« arc républicain » entre le premier ministre et le nouveau ministre de l’économie Antoine Armand.
Attelage qui tire « très à droite »
Les échos sont similaires au sein de la rédaction de Libération : cet « attelage macronie-LR […] tire très à droite ». Mécontent, le quotidien croit peu en cette nouvelle formation : « Alors qu’il avait promis un gouvernement “équilibré, représentatif, pluriel”, le nouveau Premier ministre a préféré mélanger à une bonne brochette de rescapés macronistes des représentants de la droite la plus conservatrice. » Jonathan Bouchet-Petersen va même jusqu’à s’indigner dans les pages du journal d’une « poursuite du macronisme à la sauce Manif pour tous », « toujours plus éloignée des promesses originelles du macronisme » et qui envoie « des signaux au RN ».
Néanmoins, la gauche n’est pas la seule à désapprouver ce nouveau gouvernement. Dominique de Villepin n’a pas hésité une seconde à la fête de L’Huma, où il a également pris la défense de Gaza : « Une force politique est arrivée en tête, Emmanuel Macron aurait dû nommer Lucie Castets. »
Libération partage le cœur de son intervention parmi son nouveau public, enthousiaste. L’ancien premier ministre – et également consultant du Qatar — a fait bloc avec son nouveau camp si fracturé en cette période.
Le RN sceptique, mais…
Les membres du Rassemblement National, de leur côté, se sont exprimés plutôt défavorablement à un gouvernement géré par Michel Barnier, qui, sans surprise, « n’est pas du tout [leur] ligne politique » selon les propos déclarés par le vice-président du parti, Sébastien Chenu au micro de BFMTV. Et Marine Le Pen de déclarer lors d’une réunion du parti partiellement transcrite par Libération : « ce gouvernement transitoire est la conséquence du bourbier créé par des alliances contre-nature nouées lors des élections législatives. » « Aussitôt arrivé, aussitôt reparti : même le RN ne donne pas cher de la peau du gouvernement Barnier et s’amuse à le pilonner » pense Marianne [https://www.marianne.net/politique/le-pen/il-n-a-aucun-avenir-meme-le-rn-ne-donne-pas-cher-de-la-peau-du-gouvernement-barnier-et-s-amuse-a-le-pilonner].
Au-delà des critiques, le haut fonctionnaire semble satisfaire les électeurs : d’après Le Figaro, Michel Barnier se situerait comme « la personnalité politique des Français ». Ce dernier se situe même « tout en haut du classement d’Ifop-Fiducial devançant ses prédécesseurs ». Un premier signe encourageant pour un mandat quand même très incertain.