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Guerre ouverte en Pologne entre partisans et opposants du pape Jean-Paul II

15 mars 2023

Temps de lecture : 15 minutes
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Guerre ouverte en Pologne entre partisans et opposants du pape Jean-Paul II

Temps de lecture : 15 minutes

Un livre et un documentaire pour un tir groupé contre le pape Jean-Paul II en ce début de mois de mars dans sa patrie, la Pologne. Deux enquêtes journalistiques qui assurent prouver que le pape polonais, à l’époque où il était encore archevêque de Varsovie, aurait couvert des prêtres pédophiles en les transférant entre paroisses.

Un documentaire sur la télévision polonaise TVN (groupe Discovery)

Il s’agit du doc­u­men­taire inti­t­ulé Fran­ciszkańs­ka 3, d’après l’adresse du siège de l’archidiocèse de Cra­covie, situé au 3 de la rue « Fran­cis­caine », émis le 5 mars par la télévi­sion TVN, et de l’ouvrage inti­t­ulé « Max­i­ma Cul­pa – Jean-Paul II savait » (pub­lié unique­ment en polon­ais) du jour­nal­iste hol­landais Ekke Over­beek, qui réside à Varsovie.

Une rencontre surprise avec l’ambassadeur des Etats-Unis

Pour dire l’étendue de la polémique, le min­istre des Affaires étrangères polon­ais a « invité » l’ambassadeur des États-Unis Marek Brzezin­s­ki (le fils de Zbig­niew Brzezin­s­ki) pour un entre­tien à ce sujet, la chaîne de télévi­sion TVN étant la pro­priété du groupe améri­cain Dis­cov­ery. Le com­mu­niqué du min­istère des Affaires étrangères polon­ais est à ce titre quelque peu surprenant :

« Le min­istère des Affaires étrangères a invité l’ambassadeur des États-Unis en rai­son des actions de l’une des chaînes de télévi­sion, qui est un investis­seur sur le marché polon­ais. Le min­istère des affaires étrangères con­sid­ère que les con­séquences poten­tielles de ces actions sont iden­tiques aux objec­tifs de la guerre hybride visant à créer des divi­sions et des ten­sions dans la société polon­aise. En con­séquence, le min­istère des Affaires étrangères a invité l’ambassadeur des États-Unis à faire le point sur la sit­u­a­tion et ses con­séquences en ter­mes d’affaiblissement de la capac­ité de la République de Pologne à dis­suad­er un adver­saire poten­tiel et de sa résilience face aux men­aces. »

Un vote de la Diète polonaise pour défendre Jean-Paul II

La Diète polon­aise a de son côté adop­té une réso­lu­tion « rel­a­tive à la défense du nom de saint Jean-Paul II ». Une réso­lu­tion votée avec 271 voix con­tre 43 et 4 absten­tions, 125 députés du par­ti libéral Plate­forme civique (PO, le par­ti de Don­ald Tusk) ayant refusé de pren­dre part au vote. La ligne de frac­ture est ici claire­ment entre la droite et la gauche.

L’épiscopat a lui aus­si réa­gi, avec un com­mu­niqué prudent :

« L’établissement du rôle de l’archevêque de Cra­covie, Karol Woj­tyła et une éval­u­a­tion juste de ses déci­sions et actions, ain­si qu’une expli­ca­tion juste des accu­sa­tions portées con­tre le Car­di­nal Adam Sapieha, néces­si­tent des recherch­es plus poussées dans les archives. »

TVN, la chaîne américaine libérale libertaire de Pologne

Mais il est vrai que l’auteur du doc­u­men­taire de TVN reproche juste­ment à l’archidiocèse de Cra­covie de lui avoir refusé l’accès à ses pro­pres archives.

Sur ce point, pré­cisons que, dans le paysage audio­vi­suel polon­ais, TVN est une télévi­sion de gauche (libérale-lib­er­taire, pro­gres­siste, pro-LGBT, euro-ent­hou­si­aste, etc. très hos­tile à la coali­tion Droite unie qui gou­verne depuis 2015, avec par­fois des accents anti­cléri­caux, ce qui peut peut-être expli­quer la méfi­ance de l’archidiocèse) et que le groupe Ago­ra qui pub­li­ait le 8 mars le livre d’Overbeek est sur la même ligne édi­to­ri­ale, de même que l’hebdomadaire Newsweek dans sa ver­sion polon­aise, pro­priété du groupe médi­a­tique « ger­mano-suisse » Axel Springer (qui a en fait été racheté par le fonds d’investissement améri­cain KKR), qui sou­tient à fond les thès­es con­tenue dans le livre d’Overbeek et le doc­u­men­taire de Marcin Gutows­ki. Ah, au fait, Ago­ra compte un fond sorosien par­mi ses action­naires.

Pré­cisons encore que le doc­u­men­taire Fran­ciszkańs­ka 3 est le sep­tième d’une série con­sacrée à la pédophilie dans l’Église. Quant à Ekke Over­beek, l’auteur du livre Max­i­ma Cul­pa, il est très engagé depuis des années dans le com­bat pour con­train­dre l’Église de Pologne à plus de trans­parence sur le sujet. Inter­rogé à plusieurs moments dans le doc­u­men­taire de Gutows­ki, le Néer­landais est par­ti­c­ulière­ment émo­tion­nel, cachant mal sa colère con­tre l’Église et sa com­pas­sion pour les vic­times de prêtres pédophiles qu’il dit avoir ren­con­trées et qu’il cite dans son livre mais unique­ment sous le cou­vert de l’anonymat.

Certaines informations viennent de l’ex service de sécurité communiste

Cet auteur soulève d’ailleurs un peu la polémique, d’une part parce qu’il sem­ble faire une grand con­fi­ance à la vérac­ité des infor­ma­tions con­tenues dans les doc­u­ments de l’ancienne police poli­tique du régime com­mu­niste, la SB (pour Służ­ba Bez­pieczeńst­wa – Ser­vice de sécu­rité), alors que les his­to­riens sont plus pru­dents, mais aus­si parce qu’il avait dans le passé pro­mu la per­son­ne de Marek Lisińs­ki, un maître chanteur (con­damné par la jus­tice) qui se fai­sait pass­er pour une anci­enne vic­time de prêtre pédophile et qu’Ovebeek, igno­rant prob­a­ble­ment qu’il avait affaire à un menteur, avait poussé à créer la fon­da­tion N’ayez pas peur (Nie Lęka­j­cie Się) dans le but d’apporter de l’aide aux vic­times de prêtres pédophiles

On a beau­coup par­lé de cette asso­ci­a­tion et de son chef, Marek Lisińs­ki, au début de l’année 2019, lorsqu’il a été reçu en com­pag­nie d’une députée libérale au Vat­i­can par le pape François à qui ils avaient remis un rap­port sur la pédophilie dans l’Église polon­aise. Il s’est rapi­de­ment avéré que le rap­port con­te­nait prin­ci­pale­ment des infor­ma­tions sur des cas con­nus, dont cer­tains n’étaient fondés que sur des arti­cles de presse où les allé­ga­tions n’avaient pas été prou­vées devant les tri­bunaux et n’avaient pas été véri­fiées par les auteurs. L’association a finale­ment été dis­soute en jan­vi­er 2020 quand il est apparu que Marek Lisińs­ki avait men­ti depuis le début sur sa pro­pre expéri­ence d’enfant vic­time d’un prêtre pédophile, et qu’il avait inven­té toutes ses accu­sa­tions con­tre un prêtre afin de le faire chanter pour en obtenir de l’argent.

Vengeance d’un prêtre condamné pour pédophilie ?

On remar­que aus­si un point faible du doc­u­men­taire de Gutows­ki dès les pre­mières min­utes, qui mérit­erait presque le qual­i­fi­catif de manip­u­la­tion. En effet, pour con­forter la thèse d’un Karol Woj­tyła qui aurait cou­vert des prêtres pédophiles, le doc­u­men­taire nous explique que le car­di­nal Adam Ste­fan Sapieha (1867–1951), archevêque de Cra­covie de 1926 à 1951, était un homo­sex­uel et qu’il harce­lait sex­uelle­ment les sémi­nar­istes, dont fai­sait par­tie à un cer­tain moment le futur Jean-Paul II, qui a même été un peu le pro­tégé de Sapieha (une rela­tion sex­uelle entre Mgr Sapieha et le jeune Karol Woj­tyła est même sug­gérée, sans être toute­fois énon­cée claire­ment). L’auteur, Marcin Gutows­ki, le recon­naît : l’un des deux prêtres qui acca­blent Sapieha dans les doc­u­ments de la SB n’est pas for­cé­ment crédi­ble car c’est lui-même un homo­sex­uel et un pédophile recon­nu. Il oublie cepen­dant de pré­cis­er qu’il avait été sus­pendu par Mgr Sapieha et avait donc des raisons de vouloir se venger en racon­tant des his­toires à la SB. Il oublie aus­si de pré­cis­er que les dépo­si­tions de l’autre prêtre, per­son­nage plus crédi­ble, avaient été obtenues sous la tor­ture. Autre omis­sion, qui inter­vient juste­ment au début du doc­u­men­taire, quand on nous passe l’enregistrement d’une con­ver­sa­tion télé­phonique avec Rem­bert Weak­land, ancien archevêque de Mil­wau­kee et ancien supérieur de l’ordre béné­dictin aux États-Unis main­tenant âgé de 94 ans, qui assure avoir enten­du par­ler en Pologne d’un évêque haut placé homo­sex­uel qui s’en pre­nait aux sémi­nar­istes et que l’on nous fait com­pren­dre être Sapieha : Gutows­ki ne pré­cise pas que Weak­land, qu’il présente comme faisant autorité, a remis en 2002 sa démis­sion à Jean-Paul II après que son archid­iocèse avait dû vers­er 450 000 dol­lars à une de ses vic­times – un sémi­nar­iste – pour éviter un procès, que c’était un homo­sex­uel déclaré (offi­cielle­ment sor­ti du plac­ard en 2009), et qu’il est aujourd’hui prou­vé qu’il a lui-même com­mis des agres­sions sex­uelles sur plusieurs sémi­nar­istes, et qu’il a longtemps étouf­fé les affaires de pédophilie et cou­vert les prêtres pédophiles dans son archidiocèse.

Dans le cas du livre comme du doc­u­men­taire, les auteurs sem­blent tout par­ti­c­ulière­ment attachés à démolir la thèse selon laque­lle Woj­tyła, avant de devenir le pre­mier pape à pren­dre des mesures sys­témiques con­tre le prob­lème de la pédophilie dans l’Église (avec notam­ment une procé­dure imposée à tous les diocès­es à par­tir de 2001), n’était pas du tout au courant de l’existence de ce prob­lème. Une thèse qui serait selon les deux auteurs soutenue par les par­ti­sans du pape polon­ais dans son pays, mais qui ressem­ble fort à une thèse attribuée à l’autre camp parce que facile à ren­vers­er, ce qui est une manip­u­la­tion assez courante dans le débat médiatique.

Scepticisme de la droite polonaise

On com­pren­dra donc le scep­ti­cisme des médias et jour­nal­istes « de droite » en Pologne, face à des médias « de gauche » qui assè­nent aujourd’hui la cer­ti­tude du fait que Mgr Woj­tyła savait et surtout pro­tégeait les prêtres pédophiles. Ces points méri­taient d’être notés ici car ils ne sem­blent pas avoir été men­tion­nés dans les médias français et inci­tent à une cer­taine pru­dence, sans for­cé­ment remet­tre en cause tout le con­tenu de ces deux enquêtes journalistiques.

En out­re, comme on peut le lire dans un arti­cle pub­lié le 10 mars sur le site chré­tien Aleteia à pro­pos des accu­sa­tions des deux jour­nal­istes, « Il serait étrange que le car­di­nal Wojty­la, en tant qu’évêque diocé­sain pen­dant 14 ans (de 1964 à 1978), n’ait pas été con­fron­té à de tels cas. D’ailleurs, ceux des pères Sur­gent et Lenart ont été récem­ment décrits par deux jour­nal­istes polon­ais Tomasz Krzyżak et Piotr Lit­ka, dans le quo­ti­di­en Rzecz­pospoli­ta. Ils y ont démon­tré qu’en sanc­tion­nant le père Lenart, le car­di­nal Wojty­la s’en tenait stricte­ment au droit canon­ique en vigueur à l’époque. Quant à Ekke Over­beek, il n’a pas la même vision des faits. De même, il sem­ble ignor­er la sit­u­a­tion juridi­co-canon­ique du père Sur­gent, qui apparte­nait au diocèse de Cra­covie mais rel­e­vait formelle­ment de l’évêque de Lubaczów (Sud-est). C’est ce dernier, et non Wojty­la, qui avait le dernier mot à son sujet en matière pénale. »

L’AFP péremptoire et sans nuances reprend la thèse de TVN

En ce qui con­cerne les médias français, il y a d’abord eu la tra­di­tion­nelle série d’articles écrits sur la base d’une dépêche de l’AFP, très péremp­toire sur le sujet, comme par exem­ple ici cet arti­cle du Point du 6 mars qui com­mence avec les mots : «  Le car­di­nal Karol Wojty­la était au courant d’affaires de pédophilie dans l’Église polon­aise avant qu’il ne soit élu pape Jean-Paul II en 1978, selon une enquête jour­nal­is­tique présen­tée dimanche, témoignages à l’appui, par la télévi­sion privée polon­aise TVN », ou encore le mag­a­zine féminin Elle qui assur­ait le même jour en chapô : « L’ancien pape Jean-Paul II savait que cer­tains prêtres de son diocèse en Pologne s’étaient ren­dus coupable de crimes pédophiles. Une enquête jour­nal­is­tique, dif­fusée à la télévi­sion polon­aise, met en lumière l’omerta qu’il a orchestrée pen­dant des années ». Ou encore Libéra­tion, tou­jours le 6 mars et tou­jours avec l’AFP : « Avant de devenir sou­verain pon­tife le 16 octo­bre 1978, le car­di­nal Karol Wojty­la avait con­nais­sance de faits pédocrim­inels au sein de l’Église polon­aise. C’est en tout cas ce que révèle une enquête jour­nal­is­tique dif­fusée dimanche par la télévi­sion privée polon­aise TVN, témoignages à l’appui. »

Rien d’étonnant à cela, le bureau de l’AFP à Varso­vie ayant une ligne très mar­quée à gauche et proche de médias comme ceux du groupe Ago­ra (le quo­ti­di­en Gaze­ta Wybor­cza, la radio Tok FM…) et la télévi­sion TVN.

Le Figaro au conditionnel

Est ensuite venu le temps d’une réflex­ion plus mûrie, mais moins « main­stream », avec, par exem­ple : « Pédophilie en Pologne : Jean-Paul II savait-il vrai­ment ? » sur Figaro Vox le 10 mars. Ici, le con­di­tion­nel est de rigueur, ain­si que les aver­tisse­ments sur les témoignages anonymes et les doc­u­ments de l’ancienne police poli­tique qui n’hésitait pas à fab­ri­quer des pièces com­pro­met­tantes, y com­pris avec des accu­sa­tions d’actes immoraux vis-à-vis d’enfants, dans le cadre de sa lutte inces­sante con­tre l’Église, ce qui peut con­tribuer à expli­quer dans cer­tains cas les réac­tions pru­dentes des évêques face à de telles accu­sa­tions dans le con­texte de l’époque.

Mais dès le 6 mars, le jour­nal La Croix était déjà plus pru­dent que Le Point  et Elle, écrivant sous le titre « Révéla­tions sur Jean-Paul II : les ques­tions que cela pose » : « Une enquête jour­nal­is­tique polon­aise, dif­fusée dimanche 5 mars, met en cause la ges­tion de cas de pédocrim­i­nal­ité par Karol Wojty­la. Des infor­ma­tions, encore à con­firmer, qui inter­ro­gent plus l’Église de Pologne que le passé de Jean-Paul II. »

Les doc­u­ments de la SB dans lesquels Gutows­ki et Over­beek ont puisé étaient du reste déjà con­nus, notam­ment depuis la sor­tie en 2007 du livre du prêtre du père Tadeusz Isakow­icz-Zales­ki sur les prêtres l’époque com­mu­niste qui col­lab­o­raient avec la police poli­tique, mais à pro­pos du doc­u­men­taire émis par TVN, La Croix fait remar­quer à juste titre :

« La nou­veauté de ce doc­u­men­taire tient toute­fois aux sources qu’il met en avant : pas seule­ment des doc­u­ments de la police poli­tique com­mu­niste, mais aus­si cer­tains doc­u­ments rares de l’Église aux­quels il aurait eu accès, et surtout des témoignages de vic­times, de proches, et d’anciens employés du diocèse, ce qu’un fin con­nais­seur du dossier con­firme aujourd’hui. »

L’identité du « fin con­nais­seur du dossier » n’est pas précisée.

Le Monde ne dit que la moitié de l’affaire

La réflex­ion va par­fois dans un sens dif­férent, avec un ton net­te­ment plus accusa­teur vis-à-vis de Jean-Paul II, comme dans cet arti­cle de la cor­re­spon­dante à Varso­vie du Monde, Hélène Bien­venu, pub­lié le 10 mars avec le chapô suivant :

« Des enquêtes jour­nal­is­tiques ont récem­ment révélé que Karol Wojty­la était au courant de scan­dales pédophiles au sein de l’Église catholique polon­aise sans avoir daigné pren­dre des mesures appro­priées. Les ultra­con­ser­va­teurs au pou­voir accusent l’opposition de pro­fan­er la mémoire du « pape polon­ais ». »

Qu’il ait été au courant de scan­dales pédophiles, per­son­ne n’en doute vrai­ment con­traire­ment à ce qu’affirment Marcin Gutows­ki et Ekke Over­beek. La ques­tion est plus de savoir s’il a réa­gi comme il fal­lait à ces affaires quand il était archevêque de Cracovie.

Un débat clivant

« Une dis­cus­sion sur des événe­ments sur­venus il y a cinq, six ou sept décen­nies ne terni­ra pas la “bonne répu­ta­tion” de Jean-Paul II que les politi­ciens sont si désireux de défendre », écrivait le 13 mars le com­men­ta­teur du quo­ti­di­en polon­ais Rzecz­pospoli­ta. « La ques­tion la plus impor­tante est de savoir si son enseigne­ment résis­tera à l’épreuve du temps. Ou était-il déjà mort en Pologne bien avant la paru­tion des dernières pub­li­ca­tions ? S’il a inspiré des mil­lions de catholiques, quelques pub­li­ca­tions n’y chang­eront rien. Mais s’il s’est trans­for­mé en un dis­cours académique ennuyeux, s’il n’émouvait plus les cœurs, ni ne sus­ci­tait de fer­ment intel­lectuel, ni de débats impor­tants sur le présent, la “défense de la bonne répu­ta­tion” de Jean-Paul II par les hommes poli­tiques n’y chang­era rien. »

Et l’éditorialiste de déplor­er, à pro­pos de la tem­péra­ture du débat en Pologne : « La dis­cus­sion autour du man­dat du car­di­nal Karol Wojty­la à Cra­covie et de sa réac­tion aux cas d’abus sex­uels com­mis par des prêtres sur des enfants mon­tre bien com­ment le débat pub­lic a suc­com­bé à la logique des médias soci­aux. Ils don­nent l’illusion que la réal­ité est totale­ment polar­isée, que toute dis­cus­sion doit pass­er par la prin­ci­pale ligne de cli­vage poli­tique. » Écrivant pour un jour­nal « du cen­tre », c’est-à-dire d’opposition par rap­port au PiS mais de manière plus mod­érée et moins émo­tion­nelle­ment engagée que des médias comme Gaze­ta Wybor­cza et TVN, l’éditorialiste de Rzecz­pospoli­ta en veut par­ti­c­ulière­ment à la télévi­sion publique :

« Un quart d’heure à regarder TVP Info ren­force la con­vic­tion que le monde est noir et blanc, que nous assis­tons à une attaque mas­sive con­tre la sain­teté, la reli­gion, l’Église, la polonité et l’identité nationale. »

Communiqué d’un syndicat de journalistes

Pour finir, on pour­ra citer le com­mu­niqué de l’association des jour­nal­istes polon­ais (Sto­warzysze­nie Dzi­en­nikarzy Pol­s­kich, SDP), qui regroupe prin­ci­pale­ment les jour­nal­istes « de droite » :

« Le Con­seil de l’Association des jour­nal­istes polon­ais exprime sa vive protes­ta­tion et son indig­na­tion face aux actions visant à dif­famer la mémoire de Saint Jean Paul II, un grand Polon­ais et une grande autorité morale pour des mil­lions de per­son­nes dans le monde entier. Nous trou­vons extrême­ment regret­table et scan­daleux que les médias dif­fusés en Pologne soient devenus un out­il util­isé par des cer­cles et des indi­vidus souhai­tant détru­ire l’héritage du Polon­ais le plus émi­nent de l’histoire de notre pays ».

Ils pour­suiv­ent :

« Dans le livre Max­i­ma cul­pa, Jan Paweł II savait, du jour­nal­iste néer­landais Ekke Over­beek, pub­lié par Ago­ra, et dans le reportage de Marcin Gutows­ki pro­duit et dif­fusé par TVN24, Fran­ciszkańs­ka 3, les auteurs ten­tent de prou­ver que Jean-Paul II a cou­vert la pédophilie par­mi les prêtres dès l’époque où il était archevêque de Cra­covie et qu’il a main­tenu cette ligne pen­dant tout son pon­tif­i­cat. Les auteurs de ces pub­li­ca­tions se car­ac­térisent par un manque de con­nais­sances his­toriques et une absence totale de cri­tique à l’égard des sources pro­duites par la police secrète com­mu­niste et, ce qui est par­ti­c­ulière­ment choquant, par un mépris total du fait que c’est Jean-Paul II qui a été le pre­mier pape à entamer une lutte sys­té­ma­tique con­tre les abus sex­uels du clergé, et ce à l’échelle mon­di­ale. » La SDP accuse les deux Gutows­ki et Over­beek de « dis­tor­sion, défor­ma­tion des faits, calom­nie, diffama­tion et accu­sa­tions non fondées », et con­clut : « C’est pourquoi nous appelons tous les jour­nal­istes à ne pas suc­comber à ces manip­u­la­tions et insin­u­a­tions, à présen­ter l’héritage de Jean- Paul II avec intégrité et hon­nêteté, et à avoir le courage et la volon­té de défendre son nom en Pologne et dans le monde entier. »

Au 14 mars, son con­cur­rent de gauche, la Société jour­nal­is­tique Towarzyst­wo Dzi­en­nikarskie, n’avait pas encore pub­lié de com­mu­niqué à ce sujet.

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