Éric Zemmour défraie à nouveau la chronique pour des propos tenus dans un magazine italien où il aurait laissé entendre une volonté de « déporter » les musulmans français selon ses accusateurs. Et bien que le journaliste italien a confié avoir lui-même rajouté, par la suite, le mot « déporter », la polémique ne désemplit pas.
Ce vendredi, i>Télé a décidé de mettre fin à sa collaboration avec son chroniqueur. « Nous avons perçu du trouble et de la colère autour des propos d’Eric Zemmour, mais nous n’avons pas voulu agir dans la précipitation, pour ne pas qu’on puisse dire que nous avons été manipulés ou instrumentalisés », a expliqué au Monde la directrice de la rédaction, Céline Pigalle. « Nous avons vu le journaliste du Corriere della Sera, puis nous avons sollicité et filmé un entretien avec Éric Zemmour, pour qu’il puisse exposer ses arguments. Mais les réponses qu’il a apportées n’ont pas dissipé le trouble », ajoute-t-elle, précisant que l’entretien ne sera pas diffusé sur la chaîne dans un souci de « cohérence ».
Et d’expliquer que i>Télé était « très soucieux de respecter la liberté d’expression. Et nous avons défendu celle d’Éric [Zemmour] pendant plus de dix ans, pour que ses idées soient prises en compte, contredites et débattues. Mais aujourd’hui, on a l’impression que c’est lui qui fixe les règles et de quoi on parle. On a de moins en moins le sentiment qu’on peut débattre. Le dialogue est devenu de plus en plus difficile, voire impossible. On a l’impression qu’il se parle à lui-même et à son public. »
« On a tout fait pour aller jusqu’au bout, en écoutant Éric [Zemmour], mais là, on était au bout », conclut-elle. Cette mise à l’écart intervient alors que 19 signataires viennent de publier, dans l’Obs, une lettre ouverte au président du Conseil supérieur de l’audiovisuel en lui demandant d’interdire le chroniqueur d’antenne… Jugeant le sujet « d’une gravité exceptionnelle », les auteurs estiment que les déclarations du polémiste « ne sont pas seulement immondes, effrayantes et incompréhensibles. Elles sont également dangereuses. »
Ne reculant devient rien, le collectif de censeurs improvisé parvient à placer le mot « démocratie » dans une phrase appelant à la censure. Voyez plutôt : « Qu’un homme comme Éric Zemmour qui est en ce domaine un multirécidiviste ait librement accès à l’antenne radio ou télé et à la presse écrite pour y diffuser ces messages de haine n’est plus acceptable pour une démocratie comme la France. »
Citant « Auschwitz », « Srebrenica », la « traite négrière » et le « colonialisme » (pas moins), les censeurs estiment ne plus pouvoir « tolérer que des entreprises de stigmatisation, de persécution et d’appel à la violence physique contre des êtres humains soient encore une réalité sur notre sol ».
Pour conclure, se référant à « l’article 1 de la loi n° 86–1067 du 30 septembre 1986 exigeant le respect de la dignité de la personne humaine dans tout exercice de la liberté d’expression, de l’article 15 et 17 de la même loi préconisant la protection par le CSA de la dignité de la personne, ainsi que de l’article 3–1, annonçant que le CSA contribue aux actions en faveur de la cohésion sociale, mais aussi la charte du CSA réaffirmant l’exigence de sauvegarde de l’ordre public et de sanction contre tout comportement dangereux », les signataires réclament « l’interdiction d’antenne immédiate et permanente de monsieur Éric Zemmour pour violation des lois susmentionnées et incitation permanente et aggravée à la haine raciale et religieuse contre une partie de nos compatriotes ». Rien que ça…
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Et qu’importe si les faits les contredisent ! Ce jeudi, en lieu et place de sa tribune habituelle sur RTL, Éric Zemmour a pu réagir à la polémique en dénonçant une « manipulation fantastique ». « On m’a accusé d’avoir dit un mot que je n’ai pas prononcé, on m’a accusé ensuite de ne pas avoir contredit un mot mais qui n’a même pas été prononcé… c’est une histoire extraordinaire, on a là une manipulation fantastique », s’est indigné l’auteur du Suicide français (Albin Michel, 2014), livre qui rencontre, au grand dam des censeurs, un grand succès dans l’hexagone.
Et le chroniqueur de s’interroger : « On a un Premier ministre qui estime que mon livre ne mérite pas d’être lu, maintenant on a un Ministre de l’Intérieur qui appelle à manifester contre moi. La prochaine fois, que vont-ils faire ? Envoyer mes lecteurs en prison ? »
Comme l’a rappelé Éric Zemmour, « les idées font toujours mal ». Après cet épisode, le doute n’est plus permis quant à savoir si la vérité est toujours bonne à dire.