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Italie : le torchon brûle entre Giorgia Meloni et les médias de gauche

25 février 2025

Temps de lecture : 4 minutes
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Italie : le torchon brûle entre Giorgia Meloni et les médias de gauche

Temps de lecture : 4 minutes

Malgré une popularité conséquente, qui ne se dément pas auprès de la population transalpine, la gouvernance de Giorgia Meloni est loin d’être un long fleuve tranquille et son action politique ne cesse de s’opposer aux tentatives d’entraves des différents « corps constitués » qui l’obligent à de perpétuels bras de fer. Après la magistrature, qui a ouvert une enquête sur la présidente du Conseil italien, c’est au tour du monde médiatique de redoubler d’attaques contre le gouvernement.

Un logiciel espion israélien au cœur de la polémique

Si les rap­ports entre les médias, majori­taire­ment de gauche, et la chef de file de Fratel­li d’Italia ont tou­jours été ten­dus, la sit­u­a­tion s’est encore détéri­orée ces dernières semaines à la suite du piratage des télé­phones de plusieurs jour­nal­istes de l’opposition.

Ce fût notam­ment le cas pour Francesco Can­cel­la­to, directeur du média en ligne Fan­page, très hos­tile au gou­verne­ment, qui, fin jan­vi­er, a reçu sur son télé­phone une noti­fi­ca­tion inhab­ituelle, Meta, mai­son mère de Face­book et de What­sApp, l’informant que son télé­phone était infec­té par un logi­ciel espi­on et qu’il devait se débar­rass­er de l’appareil, irrémé­di­a­ble­ment compromis.

Par la suite, plusieurs de ses col­lègues ont con­nu la même mésaven­ture. Le logi­ciel à l’origine de ces piratages serait un pro­duit de la société israéli­enne Paragon Solu­tions qui, selon le quo­ti­di­en bri­tan­nique The Guardian, avait récem­ment rompu ses rela­tions avec l’État ital­ien suite à des « désac­cords com­mer­ci­aux et techniques ».

Il n’en fal­lait évidem­ment pas plus pour que les jour­nal­istes vic­times du piratage accusent le gou­verne­ment d’en être à l’origine. Pour le moment, aucun élé­ment probant n’a pu être excipé en ce sens. Cette affaire alour­dit en tout cas encore un peu plus les rela­tions entre l’exécutif ital­ien et les médias d’opposition.

Multiplication des plaintes pour diffamation

Un cli­mat déjà détéri­oré par la mul­ti­pli­ca­tion des plaintes pour diffama­tion déposées par des mem­bres du gou­verne­ments con­tre des jour­nal­istes. Des plaintes qui, selon Dim­itri Bet­toni, chercheur au Media Free­dom Rapid Response, « aboutis­sent rarement, mais mobilisent les ressources des accusés et lais­sent plan­er sur les pro­fes­sion­nels des médias un risque per­ma­nent. »

Si, du côté des jour­nal­istes, on se plaît à hurler à la volon­té de cen­sure et aux ten­ta­tives d’intimidation, du côté du gou­verne­ment on par­le davan­tage de « légitime défense » face à une meute médi­a­tique qui s’est tou­jours mon­trée par­ti­c­ulière­ment vin­dica­tive et agres­sive envers Gior­gia Mel­oni et sa majorité, n’hésitant pas à user et abuser des références aux années 30 et des accu­sa­tions de « néo-fascisme ».

Pour ten­ter de démon­tr­er le recul de la « lib­erté de la presse » dans la pénin­sule, la gauche met en exer­gue le fait que l’Italie a per­du cinq places (46e posi­tion) dans le très con­testable classe­ment de Reporters sans fron­tières de 2024. Elle reproche égale­ment au gou­verne­ment de vouloir con­trôler l’audiovisuel pub­lic, « pili­er de l’Italie républicaine ».

Bataille pour l’audiovisuel public

« Depuis l’arrivée au pou­voir de Madame Mel­oni, qui a mis à sa tête des alliés poli­tiques, les chaînes de l’audiovisuel pub­lic ont subi les départs de têtes d’affiche incom­pat­i­bles avec le gou­verne­ment tan­dis que d’autres per­son­nal­ités se rangeaient sur la ligne du pou­voir» s’étrangle Gio­van­ni Tiz­ian, chef du ser­vice enquêtes du quo­ti­di­en Domani, plusieurs fois mis en cause pour diffamation.

« Ils nous reprochent de faire ce que toute nou­velle majorité fait quand elle arrive au pou­voir… A chaque alter­nance, c’est pareil, on rem­place la direc­tion et on écarte les gens qui vous ont trop craché au vis­age et insulté… Mais la gauche ne sup­porte pas l’idée de per­dre un tant soit peu le con­trôle d’un domaine qu’elle estime être son intouch­able pré-car­ré… » estime pour sa part un cadre de Fratel­li d’Italia.

Il Foglio relativise

Par ailleurs, Clau­dio Cere­sa, directeur du grand quo­ti­di­en libéral Il Foglio (pour­tant récem­ment visé par une action en jus­tice engagée par les ser­vices de ren­seigne­ments suite à des révéla­tions sur les rap­ports ita­lo-libyens), rel­a­tivise large­ment le psy­chodrame qui agite les médias de gauche en déclarant :

« Tous les dis­cours som­bres sur la sit­u­a­tion des médias sont vrai­ment exagérés. Les plaintes en jus­tice exis­tent mais elles n’aboutissent pas. La lib­erté d’expression est totale et les accu­sa­tions de cen­sure font sim­ple­ment par­tie d’une con­fronta­tion poli­tique entre le gou­verne­ment et ses opposants. »

Quoiqu’il en soit, selon le média spé­cial­isé dans les études d’opinion Youtrend, le par­ti de Gior­gia Mel­oni, Fratel­li d’Italia, se situ­ait, au 31 jan­vi­er 2025, à 30 % des inten­tions de vote, dépas­sant ain­si le score de 26 % enreg­istré aux élec­tions lég­isla­tives de 2022 et les 29 % des élec­tions européennes de 2024. Quant à la coali­tion de droite qu’elle a con­sti­tuée, avec ses com­posantes de droite rad­i­cale et de cen­tre droit, elle dépasse les 49 % dans les mêmes sondages.

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