Les divers États ou coalitions ou alliances ont toujours cherché à influencer l’opinion publique via les médias. La publicité récente autour d’un nouveau/ancien média « Écran de veille » en constitue une illustration contemporaine et digne d’intérêt.
[PRESSE]
Lancement demain de ECRAN DE VEILLE (3€00 — Global Watch).
“ECRAN DE VEILLE est une revue mensuelle spécialisée dédiée à la prospection géostratégique, à la veille sécuritaire et à la lutte contre le terrorisme, l’extrémisme et le fanatisme sous toutes leurs formes.” pic.twitter.com/tRBNg5paEC
— Médias France (@MediasFrance) September 15, 2021
Écran de veille, quel écran et pour veiller sur qui ?
Une campagne de publicité sur les kiosques parisiens a attiré notre attention annonçant un nouveau média pour 3 €, un prix assez raisonnable pour vouloir aller à sa découverte.
Publié sur format tabloïd et annonçant un numéro 14 (nous ignorons si les treize premiers numéros étaient en ligne ou sur papier ou les deux), le magazine comporte seulement douze pages ; notre exemplaire était curieusement double, la pagination du magazine répétée deux fois.
Le journal se veut à la fois « prospection géostratégique, veille sécuritaire, contre-terrorisme, résistance aux fanatismes ». Il est l’émanation du site Global Watch Analysis et défend dans son éditorial les « Valeurs fondamentales qui constituent le salutaire socle civilisationnel de la paix, de la fraternité, de l’égalité et du vivre ensemble ». On pourrait ajouter les pommes de terre frites à cet ensemble vide et pompeux.
Global watch analysis
À consulter le site (en français), celui-ci est consacré quasi exclusivement et de manière obsessionnelle aux Frères musulmans, leurs méfaits, leur influence néfaste, les financements du Qatar. Le magazine est publié en partenariat avec Countries Reports Publishing (Londres) dont nous n’avons pas retrouvé la trace. Certaines traductions sont faites par une agence de Malte.
Les articles eux-mêmes comportent une très longue analyse des attentats islamistes du 13 novembre 2015, des regrets de la défaite américaine en Afghanistan (La honte et le déshonneur), une dénonciation du Pakistan soutien des talibans, un portrait hagiographique de Ahmad Massoud, aimable fils de son père et élève de Sandhurst (l’académie militaire britannique), plus quelques brèves traitant du Moyen-Orient ou de l’industrie de la défense.
Qui est derrière ?
Résumons, un magazine sorti en plein procès de l’attentat du Bataclan, une hostilité déclarée face aux Frères musulmans et au Qatar, des articles très hostiles à la Turquie, des regrets de la désertion américaine en Afghanistan, l’hostilité également vis-à-vis du Hamas, une émanation du monde anglo-saxon, on secoue et ça donne quoi ?
Un magazine néo-conservateur d’influence sorti pour l’occasion ; inspiré par ? Au choix : Israël, l’Arabie Saoudite, les milieux bellicistes américains, les britanniques. L’Arabie Saoudite manque d’expérience dans le domaine, nous verrions plutôt à l’œuvre – sans bien entendu pouvoir absolument le prouver – une des nombreuses officines liées aux services israéliens. Peut-être avec des coups de pouce extérieurs. Un peu à la manière des services britanniques qui se cachent (mal) derrière le site Bellingcat qui a pignon sur rue. Comme quoi le papier a encore un avenir pour les officines d’influence.
Voir aussi : EU DisinfoLab/Saper Vedere, agences de désinformation américaines ?