Après la manifestation organisée par le collectif « Jour de colère » dimanche 26 janvier 2014, plusieurs journalistes et photographes indépendants ont été placés en garde à vue dans l’indifférence générale de leurs collègues mainstream. L’OJIM a retrouvé l’un de ces journalistes indépendants qui, en souhaitant demeurer anonyme, a accepté de nous livrer son témoignage.
Quel était le motif de la garde à vue ?
Le motif des gardes-à-vue était « participation à un attroupement armé » et « violences sur agent dépositaire de la force publique ». Nous étions tous dans le même lot. Il y avait cinq étudiants d’une autre école de journalisme venus en reportage, des photographes indépendants et trois cameramen. Nous étions mélangés aux manifestants et aucune distinction n’a été faite dans les arrestations.
Comment s’est déroulée cette garde à vue ?
De 18h00 à 22h30, nous sommes restés place Vauban sous la pluie, encadrés par les CRS. Vers 22h30, des bus de la BAPSA (« brigade d’assistance aux personnes sans abris », ndlr) sont venus prendre les gens pour les emmener dans un « dépôt » du nord de Paris, près de la rue de l’Évangile. À cet endroit, entourés de barbelés et de CRS, les gardés à vue se sont fait interroger un par un par les forces de l’ordre qui nous ont notifiés notre garde à vue à 4h00 du matin. Dans le terrain vague entouré de barbelés, c’était tendu. Exposés au froid, à la pluie, au vent, il y a eu un cas d’hypothermie et un jeune homme qui a vomi longtemps, sans être pris en charge. Légalement, entre la privation de liberté et la notification de garde à vue, il ne doit pas se passer plus d’une heure. Là, personnellement, nous avons attendu jusqu’à 4h00 du matin avant d’être auditionnés, ce qui est illégal et invalide la procédure. Sauf que le magistrat en charge du dossier a délibérément autorisé la violation de la loi…
Et après l’audition ?
Après cette audition, on a tous été dispatchés dans des commissariats de banlieue, les commissariats parisiens étant déjà pleins à craquer. Je me suis retrouvé avec une collègue dans un commissariat d’Asnières-Gennevilliers. Là : palpation, mise à nu et tripotage en règle, puis directement en cellule… A partir de là, sans lit, sans manger ni rien, on a attendu jusqu’à 17h00 notre libération. Les charges ont été abandonnées et nous avons été libérés. J’oublie certainement pas mal de choses mais le décalage et le choc font que tout ce qui s’est passé n’est pas encore extrêmement clair. Ce qui est sûr, c’est c’était quand même assez violent…
Crédit photo : anfad via Flickr (cc)