Comme chaque année, RSF publie son classement annuel de la liberté de la presse dans le monde.
Et comme chaque année, la situation s’est dégradée à peu près partout, particulièrement sur le continent américain. « Tous les indicateurs du classement témoignent d’une dégradation. De nombreuses autorités publiques essaient de reprendre le contrôle de leurs pays, craignant de trop grandes ouvertures du débat public », explique Christophe Deloire, secrétaire général de l’organisation.
Pour lui, aujourd’hui, « il est de plus en plus facile pour tous les pouvoirs de s’adresser directement au public grâce aux nouvelles technologies, et donc il y a une violence plus grande contre tous ceux qui représentent l’information indépendante ». Il s’agit d’une « nouvelle ère de la propagande » permise grâce à l’évolution des moyens de communication.
Premier constat : pour la première fois, le continent américain est passé derrière l’Afrique à cause notamment d’assassinats de journalistes en Amérique Centrale. En Amérique latine, ce sont « la violence institutionnelle (au Venezuela, 139e ou en Equateur, 109e), celle du crime organisé (comme au Honduras, 137e), l’impunité (comme en Colombie, 134e), la corruption (comme au Brésil, 104e), la concentration des médias (comme en Argentine, 54e) » qui « constituent les principaux obstacles à la liberté de la presse ». Au Nord, les États-Unis sont montrés du doigt pour les dérives de la cyber-surveillance, et le Canada a perdu 10 places.
L’Afrique reste néanmoins, avec le Moyen-Orient, la zone du monde où les journalistes sont « les plus soumis à des contraintes de toutes sortes », constate RSF. Et d’ajouter que, dans certains pays en crise, comme l’Irak (158e), la Libye (164e) et le Yémen (170e), « exercer le journalisme relève de la bravoure ». L’Érythrée conserve la dernière place du classement (180e), suivie par la Corée du Nord, le Turkménistan, la Chine et la Syrie. En haut du classement, la Finlande conserve sa première place pour la sixième année consécutive, suivie par les Pays-Bas et la Norvège.
Si l’Europe reste la zone où les journalistes sont le moins inquiétés, son modèle s’affaiblit à cause de plusieurs facteurs : « détournement du contre-espionnage et de la lutte contre le terrorisme, adoption de lois permettant une surveillance à grande échelle, augmentation des conflits d’intérêts, mainmise de plus en plus grande des autorités sur les médias publics et parfois privés, le continent ne s’illustre pas par une trajectoire positive ».
Enfin, la France perd 7 places et se retrouve 45e. Dans son rapport, RSF déplore qu’« une poignée d’hommes d’affaires ayant des intérêts extérieurs au champ des médias finissent par posséder la grande majorité des médias privés à vocation nationale ». En effet, d’ores et déjà, les plus gros médias français sont partagés entre quelques acteurs, de Patrick Drahi à Matthieu Pigasse en passant par Bolloré, Xaviel Niel ou encore Lagardère…