LOL vous connaissez ? Laughing out loud, rire à haute voix, équivalent du tout aussi stupide MDR mort de rire, qu’ajoutent à tout bout de champ jeunes et vieux adolescents à leurs courriels, textos, twittos et posts sur Facebook. Une sorte d’habitude compulsive dans un siècle de dérision. Libération nous apprend qu’une terrible Ligue du LOL répandait la terreur sur les réseaux sociaux depuis 2009. Autopsie de la souris devenue montagne.
Rions un peu, rions des autres
En 2009 un obscur et jeune journaliste Vincent Glad, fonde un groupe « entre hommes » Facebook fermé intitulé Ligue du LOL. Le groupe rassemblera une trentaine de journalistes, publicitaires, blogueurs, tous jeunes, tous très politiquement corrects, pour faire des blagues de potache sur les réseaux sociaux et ailleurs. Moqueries au sujet des consœurs journalistes, canulars téléphoniques, montages photos parodiques parfois obscènes, plaisanteries stupides. Un petit monde pas très reluisant de potaches que l’on imagine un peu alcoolisés voire utilisateurs de substances interdites.
Les victimes sont des proches du même monde, dans les médias ou la publicité. Certaines blagues sont de très mauvais goût (comme dans toutes les blagues qui se répètent dans un petit cercle) comme annoncer à une stagiaire un faux entretien d’embauche, jeux cruels de l’entre soi, cour de récréation d’ados prolongés.
Mise à mort professionnelle des ligueurs
C’est un article de Libération du 8 février 2019 qui lâche les noms des contrevenants parmi lesquels des rédacteurs du journal, d’un membre des Inrocks, et d’autres médias. Les contrevenants se sont « attaqués à des figures du féminisme et des homosexuels », leur mise au pilori sera rapide, conformément aux us et coutumes d’un milieu où l’on lèche les forts avant de les lâcher puis de les lyncher. Comme les poules dans un poulailler qui s’attaquent à la poule la plus faible et la tuent. Surtout si c’était une poule arrogante depuis tombée à terre.
Sont mis à pied ou en attente de convocation de licenciement pour faute grave Vincent Glad le fondateur du LOL, Alexandre Hervaud du site web, tous deux de Libération. Également David Doucet rédacteur en chef web des Inrocks, Guillaume Ledit de Uzbek&Rica, Guilhem Melissen des Nouvelles Écoutes,. Stephen des Aulnois éditeur de sites pornographiques met ses activités en sommeil, Christophe Carron rédacteur en chef de Slate semble en danger, la liste pourrait s’allonger. Tous risquent d’être écartés de leurs médias, licenciés ou mis au placard pour longtemps.
Crime de lèse-majesté féministe
Leurs « crimes » sont patents, anti-féminisme avéré dans une atmosphère de guerre. Comme le dit la militante féministe Daria Marx qui a vécu « en ayant l’impression de fuir un sniper, d’avoir eu la chance d’échapper aux balles virtuelles d’une armée devenue folle ». Bigre, presque pire que les femmes yezidis ou kurdes menacées par Daech.
Pour une autre blogueuse « la ligue de LOL c’est devenu une sorte d’hydre terrifiante », une jeune femme qui ne doit pas prendre le RER après 23h en région parisienne, les hydres y sont plus directes et plus réelles. Une autre victime est à la fois noire et femme, la totale, Mélanie Wanga dénonce « des mecs blancs bien insérés dans le milieu ». Après la chasse aux blancs de plus de 50 ans de Delphine Ernotte, la chasse aux blancs trentenaires vient de s’ouvrir. Dans un post quasi parodique de Slate une certaine Lucie Bellan se répand contre son chef (Christophe Carron) qui l’avait attaquée elle et son mari au moment où celui-ci « remettait en question sa masculinité, article après article » (sic).
Arroseurs arrosés et moraline sous forme de boomerang
Bien entendu tout ce petit monde d’esprit estudiantin avait deux visages. Côté cour on se moquait allégrement des copains et surtout des copines de manière souvent vacharde. De l’autre on célébrait le féminisme triomphant comme Vincent Glad, le fondateur du groupe dans Libération en octobre 2018 sur le mouvement Metoo : « Metoo a montré qu’un simple hashtag peut devenir un mouvement d’un nouveau genre, sans chef, sans contours définis, qui ne vit que par la force déployée par la libération de la parole ». Lyrisme assumé. Le même, moins lyrique en février 2019 « en créant ce groupe, j’ai créé un monstre qui m’a totalement échappé ».
Alexandre Hervaud s’est d’abord rebellé contre ses censeurs leur demandant « Allez bien vous faire cuire le cul ». Avant de se reprendre et de présenter ses « excuses aussi sincères que tardives ». David Doucet, actif dans le groupe seulement entre 2009 et 2012 s’est repenti « Cette libération de la parole m’a surtout fait comprendre que je comptais parmi les bourreaux », formule de contrition qui semble très exagérée pour une activité qui remonte à 7 ans. Nous avons tenté en vain de joindre David Doucet.
https://twitter.com/Mancioday/status/1094403754668015617
Beaucoup de bruit pour pas grand chose
Au même moment on apprend avec retard que trois journalistes du Huffington Post du groupe Le Monde ont été licenciés en décembre 2018 pour avoir créé un groupe privé sur Facebook finement intitulé « Radio Bière Foot » dont l’intitulé indique la nature et la délicatesse. Un groupe privé, nous soulignons. Cette époque est devenue vraiment pisse-vinaigre. Certains diront que les malheureux arroseurs/arrosés n’ont que ce qu’ils méritent, qu’après avoir prêché la moraline, ils en sont les victimes.
D’autres (dont nous), que cette affaire est surtout symptomatique d’une époque devenue totalement intolérante. Au même moment, des faits beaucoup plus graves sont passés sous silence comme l’attaque d’une librairie (La Nouvelle Librairie, rue de Médicis dans le Quartier latin à Paris) le samedi 9 février 2019 : un libraire agressé, une vitrine brisée, des livres dispersés et pas un mot dans la grande presse, ni à la radio ni à la télévision. Sale temps pour les libertés, celles des demi-crétins du LOL comme celles des autres.
PS : d’après une victime, les farceurs LOL attaquaient les « féministes et les neuroatypiques » (re-sic). Si un lecteur sait ce qu’est un neuroatypique, merci de transmettre cette intéressante information à la rédaction.