Débattu actuellement à l’Assemblée nationale, l’un des amendements de la loi Macron suscite de vifs remous chez les journalistes.
Et pour cause : celui-ci propose de réinstaurer un nouveau « secret des affaires » pour les entreprises, prévoyant de punir pénalement quiconque révélerait sans autorisation toute information sensible. La peine encourue est de 3 ans d’emprisonnement et 375 000 euros d’amende. Celle-ci peut même être portée à 7 ans de prison et 750 000 euros d’amende si les informations divulguées portent atteinte aux « intérêts stratégiques » de l’entreprise.
Dans un texte commun publié dans Le Monde, de nombreux journalistes et rédactions dénoncent « une censure inédite en France ». Avec cette loi, « il sera désormais impossible de vous informer sur des pans entiers de la vie économique, sociale et politique du pays », insistent-ils. Et d’estimer qu’« avec la loi Macron, vous n’auriez jamais entendu parler du scandale du Médiator ou de celui de l’amiante, de l’affaire Luxleaks, UBS, HSBC sur l’évasion fiscale, des stratégies cachées des géants du tabac, mais aussi des dossiers Elf, Karachi, Tapie-Crédit lyonnais, ou de l’affaire Amésys ».
« Avec ce texte, un juge saisi par l’entreprise sera appelé à devenir le rédacteur en chef de la nation, qui décide de l’intérêt ou non d’une information », poursuivent les signataires. Et de conclure : « Nous, journalistes, refusons de nous contenter de recopier des communiqués de presse pour que vous, citoyens, restiez informés. Et comme disait George Orwell : “Le journalisme consiste à publier ce que d’autres ne voudraient pas voir publié : tout le reste n’est que relations publiques.” C’est pourquoi nous demandons le retrait pur et simple de ce texte. »
Interrogé sur RTL, Michel Sapin a dit « comprendre l’inquiétude » des journalistes. « L’objectif est de protéger un certain nombre de brevets (…) Il ne s’agit surtout pas de mettre en cause les lanceurs d’alerte », a‑t-il expliqué, assurant que l’amendement serait « modifié ».
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