La Nouvelle République couvre plusieurs départements de la région Centre-Val-de-Loire, et de la région Nouvelle Aquitaine.
L’aire d’influence de la « N.R. », comme disent les gens du cru, ne correspond donc pas exactement au découpage administratif et politique du pays, ce qui complique un peu la tâche des journalistes et des lecteurs. Mais le premier problème, avec La Nouvelle République n’est pas cette inadéquation entre sa couverture de diffusion et le périmètre des strates décisionnelles.
Situation de monopole
Le premier vrai problème, c’est évidemment la situation de monopole de la N.R. sur sa zone d’influence. Comme dans la quasi-totalité du territoire français, il n’existe plus qu’un seul quotidien régional dans les départements qu’elle couvre. Cette situation devrait l’inciter à la prudence dans le traitement de l’actualité, spécialement de l’actualité politique. Un monopole de l’information crée en théorie non pas un devoir de neutralité mais une sorte de devoir de pluralisme. D’autant qu’il n’y a pas d’ARCOM pour veiller à cette diversité-là.
Dans le passé, la N.R., qui était grosso modo d’orientation radicale-socialiste, exerçait son métier avec une certaine mesure, et veillait à ne pas donner une dimension trop militante à ses commentaires. Les journalistes étaient de sensibilités diverses et évitaient des prises de position trop clivantes, préférant donner la parole aux uns et aux autres.
Fin du journalisme à l’ancienne
Le modèle de ces journalistes « à l’ancienne » pourrait être Pierre Josse. Elu sur la liste socialiste de Châteauroux, la préfecture de l’Indre, le rédacteur en chef des pages consacrées au département, homme de grande culture, bibliophile, passionné par les figues des grands journalistes du XXe siècle comme Henri Béraud, Albert Londres ou Joseph Kessel, Pierre Josse avait à cœur de prendre en compte les opinions de l’ensemble de ses lecteurs, et de les laisser libres de leurs choix, sans chercher à leur distiller leur dose quotidienne de moraline.
Mais nous n’en sommes plus là.
Les localiers font leur travail
Bien entendu les journalistes de terrain (dont beaucoup de retraités cumulant emploi et retraite) assurent avec sérieux le travail de « localier », la rubrique des chiens écrasés, si l’on veut. Denis Tillinac, Jean Mabire, qui commencèrent eux-mêmes leur carrière de journaliste et d’écrivain dans des journaux de province, ont raconté en leur temps la noblesse du « localier ». Ces informations-là sont souvent des faits divers, positifs ou négatifs, les seules informations qui restent lues, aujourd’hui, car sans concurrence dans le paysage médiatique, ce qui permet d’ailleurs aux quotidiens de province de ne pas décliner au même rythme que les quotidiens nationaux.
Éditorialistes et chroniqueurs en pagaille
Mais la N.R. compte en outre, aujourd’hui, dans ses rangs, une ribambelle d’éditorialistes, de billettistes, de chroniqueurs, les Luc Bourrianne, Pierre Calmeilles, Ambre Philouze-Rousseau, Matthieu Le Gall etc., — si nombreux qu’il est impossible de les citer tous -, qui nous « régalent » d’analyses sentencieuses, puisées aux meilleures sources du 100% politiquement correct.
Le naufrage du Parc Naturel Régional du Sud-Berry
C’est ainsi que nous avons droit, ces dernières années, aux trémolos écologistes du quotidien en faveur d’un Parc Naturel Régional, une structure supplémentaire censée fédérer des communes et des communautés de communes du sud du Berry. Depuis 2017, la N.R. n’a pas ménagé son soutien à ce projet qui aurait contribué, comme à l’habitude, à l’empilement des structures publiques, avec leur cortège de créations de postes de fonctionnaires et les charges diverses qui vont avec. Mais fin mars 2025, la majorité des élus a voté contre ce projet, et le préfet a signé la fin de la récréation, ce qui a réjoui les principaux acteurs du monde rural, à commencer par la Coordination rurale. À la trappe, ce PNR ! La N.R. en est réduite à manger son chapeau, après huit années d’activisme de la plume en faveur de cet outil ultra-coûteux.
Il existe déjà un Parc Naturel Régional de la Brenne, dans l’Indre, bien plus cohérent sur le plan géographique, mais qui, en trente ans de fonctionnement, a déjà absorbé cent millions d’euros, sans pour autant générer une relance pérenne de l’activité économique locale. Au contraire, même, puisque la démographie est en berne dans l’ensemble des communes concernées. Quand on sait que le seul budget de fonctionnement du Parc de la Brenne représente plus de cinq millions d’euros par an, on comprend l’exaspération des Berrichons.
La Nouvelle République en pleine dérive
Echec de la campagne anti-caméras de surveillance
De même, La Nouvelle République apportait son soutien, certes un peu plus discret, au maire socialiste d’Issoudun, André Laignel (l’un des rares maires de gauche du département de l’Indre), qui s’opposait, pour des raisons purement idéologiques, à l’installation de caméras dans sa commune, ceci malgré la montée d’une insécurité rurale, liée en particulier à la diffusion des stupéfiants et à une immigration, souvent qualifiée de « roumaine », sans plus de précision. Il y a quelques jours, André Laignel, a retourné sa veste sur ce sujet : il y aura des caméras ici aussi. La N.R. n’a pas davantage jugé utile d’expliquer le revirement de l’ancien ministre de Mitterrand ni la fin immédiate de la campagne de la N.R. contre les caméras de surveillance (N.R. du 21 mars 2025).
La N.R. pour un « grand remplacement rural » ?
Mais l’affaire la plus embarrassante pour la N.R. » est certainement celle du CADA de Bélâbre. CADA signifie Centre d’Accueil des Demandeurs d’Asile. La N.R. s’est engagée sans nuance, pour les CADA, sans tenir aucun compte de l’avis de ses lecteurs. Ceux qui se rebiffaient à l’idée de l’arrivée de 38 jeunes migrants masculins, mineurs de papier originaires d’Afghanistan, de Tchétchénie ou de Syrie dans un village de 900 habitants étaient qualifiés, comme toujours, d’extrémistes de droite mais la mobilisation, dans la rue, pendant 18 mois, de ces 900 habitants, le récent raz-de-marée électoral des partis de droite dans la région et spécialement dans le canton, le catastrophique bâclage technique du dossier par le maire de Bélâbre, et les révélations sur les abus de biens sociaux de l’association Viltaïs qui accompagnait le montage du projet, y ont mis un terme. Là aussi, c’est le préfet Lanxade qui a annoncé, en décembre 2024 qu’il n’y aurait pas de CADA à Bélâbre. « Anéanti », titrait le 10 décembre le journaliste de la N.R. Bertrand Slézak, l’un des plus virulents opposants aux « manifestations orchestrées par l’extrême droite », évoquant aussi des « menaces de l’extrême droite ».
Silence contre les menaces sur une jeune mère de famille
Mais le même quotidien monopolistique a été beaucoup moins loquace concernant les menaces contre la jeune mère de famille Ludivine Fassiaux, organisatrice des manifestations ant-CADA. « Plus d’amour, moins de Zemmour !», avait sous-titré La N.R., il y a un an, reprenant le slogan des antifas locaux venus de Poitiers. Ce « plus d’amour « s’était traduit à l’époque (le 11 mars 2023), par le sabotage de la sonorisation des anti-CADA. « Les opposants au CADA se font couper le sifflet », titrait, ironique, la N.R., sous la plume de Loïc Lejay.
Les villageois ont finalement obtenu gain de cause et le projet a donc été annulé. Après cette déculottée, le maire de Bélâbre, qui ne sera probablement plus maire l’an prochain, suite à ce fiasco, a appelé à la « fraternité », regrettant de ne pas avoir été compris par la population. Après un passage à mi-mars sur CNews, racontant son combat, et l’échec des adeptes du grand remplacement dans nos ruralités, Ludivine Fassiaux a reçu des menaces de mort : « Un couteau t’attend dans un tournant », et elle a retrouvé sa voiture dégradée. Visiblement certains soutiens du CADA et du maire n’ont pas écouté ses vœux de « fraternité ».
Avec LFI, « Tous unis contre le racisme »
Mais une toute récente affaire dévoile un peu plus le parti pris de la N.R., sa dérive, marquée par l’influence de LFI au sein de sa rédaction, Le dimanche 23 mars 2025, la N.R. a fait sa une avec la manchette : « Indre : tous unis contre le racisme ». il s’agissait clairement d’un soutien aux mobilisations lancées par Mélenchon et LFI.
Pourtant cette mobilisation nationale avait été refusée par la très grande majorité de la classe politique. Seule une cinquantaine de groupes ou groupuscules d’extrême gauche : (outre la CGT), le PCF, LFI bien entendu, les jeunesses communistes, les trotskistes du NPA, le groupetto de François Ruffin, et comme à l’accoutumée la Ligue des Droits de l’Homme et la Libre Pensée. Le « grand mouvement de protestation » fit un flop retentissant.
Dans le même numéro de la N.R. annonçant en « une » que dans l’Indre, les habitants étaient « tous unis contre le racisme », le journaliste de la N.R., Aziliz Le Berre avait compté 150 manifestants, ce qui était déjà généreux, car un observateur de l’Observatoire du journalisme, présent devant la préfecture, n’a dénombré, lui, que 126 marcheurs, soit 2,5 manifestants par organisation signataire de l’appel mélenchoniste. Dans un mini-cortège très clairsemé, il était facile, en effet de compter chaque participant. À l’échelle du département, cela représentait donc nettement moins d’un habitant sur mille. Piètre résultat, constat de faiblesse dans un département où le fossé se creuse toujours plus entre le grand média local et la population.
À peu près à la même heure, un rabbin était agressé dans les rues d’Orléans, la capitale régionale des départements couverts par la N.R. Un symbole.
Agathon