Nous reproduisons un intéressant article d’Alexis Lévrier, auteur d’un livre récent sur Emmanuel Macron et les médias, paru sur The Conversation, et traitant de ce dernier sujet.
Du début jusqu’à la fin, le quinquennat d’Emmanuel Macron aura été marqué par une mise en cause, et à certains égards, par un recul des droits de la presse.
Quelle trace le quinquennat d’Emmanuel Macron laissera-t-il dans l’histoire de la presse et des médias ? Même s’il a été présenté comme l’homme du « nouveau monde », le président « jupitérien » est revenu dans ses rapports avec les journalistes aux origines mêmes de la Cinquième République.
Il n’a pas hésité pour cela à utiliser les méthodes de la modernité, en diffusant par exemple ses propres images sur les réseaux sociaux tout en tenant la presse à distance. C’est le constat que je dresse dans l’ouvrage Jupiter et Mercure, le pouvoir présidentiel face à la presse (éditions Les Petits Matins).
Le projet de ce livre est né le soir même de l’élection présidentielle de 2017, au moment où Emmanuel Macron entamait sa marche solennelle dans la cour du Louvre. Je venais de publier un ouvrage, Le Contact et la distance, qui portait sur la très forte porosité qui caractérise les mondes politique et journalistique en France.
Emmanuel Macron avait annoncé très tôt sa volonté de rompre avec cette tradition, et notamment avec le goût pour les « propos d’antichambre », comme il les nommera quelques mois plus tard.
Cette rupture me semblait bienvenue, mais elle portait déjà en elle une ambiguïté : Emmanuel Macron semblait moins attaché à l’idée d’une distance entre ces deux mondes, sur le modèle anglo-saxon, qu’à la volonté de rétablir une relation ouvertement hiérarchique entre le pouvoir politique et la presse.
Deux entretiens fondateurs
En juillet 2015 et en octobre 2016, dans deux entretiens fondateurs accordés à l’hebdomadaire Le 1 et au magazine Challenges, il avait en effet revendiqué une manière de gouverner très verticale.
Il avait même exprimé dans Le 1 son admiration pour les précédents gaulliens ou bonapartiste, et regretté ouvertement la disparition de la « figure du Roi ». Or, l’attachement à un tel héritage ne pouvait être qu’annonciateur de potentielles dérives à l’égard de la presse : lorsque le pouvoir se veut « jupitérien », selon le terme employé par le candidat dans son interview à Marianne, il est presque toujours tenté de restreindre la liberté des journalistes.
Dès le mois de mai 2017, j’ai donc choisi d’observer ce quinquennat à travers le prisme des rapports entre le président et la presse, avec la volonté de confronter Emmanuel Macron à ses prédécesseurs et d’inscrire son mandat dans l’histoire des médias. L’histoire n’est pas tout à fait finie au moment où paraît cet ouvrage, et la période préélectorale qui s’ouvre changera peut-être en partie la donne.
Mais, quatre ans après la déambulation victorieuse d’Emmanuel Macron, il me semble d’ores et déjà possible d’isoler plusieurs périodes, et de tirer quelques enseignements des difficultés rencontrées par ce jeune président dans ses relations avec la presse.
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