Il est assez étonnant que la revue de Marc Ladreit de Lacharrière, ancien financier de SOS Racisme, s’attaque de front au nouvel ordre médiatique (numéro d’avril 2021), mais ne boudons pas notre plaisir au travers de deux papiers incisifs de Jean-François Kahn et de Franz-Olivier Giesbert.
Jean-François Kahn et la fin du pluralisme
On ne présente plus notre JFK national, Paris-Presse, Le Monde, l’Express, Europe 1, fondateur de L’Événement du jeudi et de Marianne, souvent véhément et n’ayant pas peur d’être à contre-courant. Son constat est effrayant et rejoint le diagnostic de l’Ojim : les journalistes se sont ralliés à la normalité de l’époque, l’économie néo-libérale au nom de la modernité, le tout mâtiné de gauchisme sociétal pour se convaincre qu’ils n’avaient pas viré leur cuti gauchiste. L’homogénéisation du profil des journalistes a entraîné une pensée unique qui — si elle n’est pas obligée de reconnaître le réel – la cachera au nom de sa morale. La nouvelle génération de journalistes très radicalisés, parfois islamo-gauchistes (même si JFK n’aime pas le terme) pratique un entre-soi qui ne leur permet pas de prendre conscience qu’ils sont de plus en plus coupés de la population. Fermez le ban.
FOG règle son compte à Plenel, nommé grand Tartuffe national
On ne présente pas non plus Franz-Olivier Giesbert, grand Connétable des médias, qui influence toujours Le Point et dont les éditoriaux ont une réelle portée. Nous n’avons pas toujours été tendres avec Edwy Plenel dont nous avons intitulé le portrait « troskyste un jour, trotskyste toujours ». Mais ce n’est rien à côté de la volée de bois vert administrée par FOG, pour lequel Plenel représente un nouvel acteur de la vie politique : le magistraliste, hybride entre le fer judiciaire et le relais médiatique. Un hybride qui se contente souvent de recopier ou de mettre en scène les procès-verbaux obligeamment fournis par les magistrats. Mediapart devient ainsi le journal officiel du PNF, le Parquet national financier. Le tout sous couvert de bonne conscience, de rapt sur la morale et – ajoute l’auteur – avec une retraite-chapeau de 3M€ récupérée lors de la cession de Mediapart à ses salariés. Sa conclusion ? « Trotskiste un jour, flic toujours ».
Un très intéressant article d’Étienne Gernelle du Point s’intéresse à la mort de la presse, un cadavre qui fort heureusement bouge encore sérieusement. Mais la tentative de meurtre de Facebook et Google a remis en cause le modèle, « Jamais, dans l’histoire de l’humanité, on n’a lu autant d’articles de journaux. Mais jamais ils n’ont été aussi peu rémunérés ». Tout en soulignant les « bulles de filtres » d’une bonne partie des journalistes, déjà remarquées par Peggy Sastre, bulles du confort moral et de posture politique. Et de citer Balzac dans Les journalistes (1843) « Ils mettent tant de vertus en-dehors qu’il ne doit plus leur en rester au-dedans ». Un numéro à conserver dans sa bibliothèque.
La Revue des Deux Mondes, “Cancel culture, tyrannie des minorités. Le Nouvel ordre médiatique”, avril 2021, 216p, 18€