Le 12 novembre 2020, le journal allemand Die Zeit publiait un article sur l’« Absurdistan autoritaire » imposé par le gouvernement français à ses concitoyens. Les règles du confinement dans notre pays y sont décrites sans concession. Mais le sujet est loin d’avoir été épuisé, comme en témoignent de nombreux articles et émissions à ce sujet. Revue de presse des délires technocratiques.
La plume acerbe de la journaliste du Zeit
La journaliste de l’hebdomadaire allemand d’information et d’analyse politique Die Zeit, Annika Joeres, avait-elle mesuré que son article allait avoir un impact aussi important en France ? Peut-être pas. Ce regard étranger a mis des mots sur une réalité que les Français connaissent trop bien. Bien que factuelle, la description a fait mouche auprès de nombreux lecteurs tant outre-Rhin qu’en France. Il est vrai qu’il y a de la matière :
- des « ainés interdits de baignage malgré un avis médical », comme le soulignait également un reportage du Huffpost le 7 novembre,
- des sorties d’agrément de son domicile limitées à une heure et dans un rayon de un kilomètre, ce qui expose les promeneurs urbains aux exhalaisons des joggeurs, alors que les parcs et forêts sont vides,
- les Français qui s’autorisent à sortir de chez eux en signant leur bon de sortie,
- la méfiance de nombreux Français vis-à-vis des règles imposées par le gouvernement, qui se contredisent parfois,
- les supermarché qui ne sont plus autorisés à vendre des livres, des jouets, des vêtements et des chaussures, avec le spectacle hallucinant de livres et de chaussons recouverts de rubalises car considérés comme « non essentiels »,
- les décisions de santé publique prises de façon monarchique par le président de la République en « Conseil de défense », une instance qui n’existe pas dans les institutions,
- un état d’urgence sanitaire voté pour cinq mois qui donne des pouvoirs exorbitants au gouvernement et suspend nombre de libertés publiques,
- la concentration du pouvoir par une caste d’énarques très éloignés des réalités des Français.
L’article a entrainé beaucoup de réactions en France. Pour n’en citer que quelques-unes :
- Le Point souligne qu’ « un journal allemand tacle la France dans sa gestion du Covid-19 ».
- Ouest-France titre sur « La gestion française du Covid-19 épinglée par un journal allemand ».
- Jean-Louis Thériot appelle dans Le Figaro le 20 novembre à « sortir de l’Absurdistan, et vite ».
Des exemples à rire et à pleurer
La lecture des médias nous apprend que les autorités françaises ne se sont pas arrêtées en si bon chemin.
France bleu nous informe le 15 novembre qu’« une librairie reste ouverte à Cannes, malgré le confinement ». La gérante indique que l’ouverture de sa librairie est une question de survie et que « les policiers sont passés deux fois indiquant (à la gérante) qu’elle serait bientôt verbalisée ». On apprend qu’un mouvement de solidarité a vu le jour, avec des écrivains qui se sont engagés à payer les amendes auxquelles la commerçante s’expose. Sur Sud Radio le 17 novembre, l’écrivain Alexandre Jardin indique que la librairie encourt une fermeture administrative. Il ajoute que « le Click&Collect en librairie n’apporte même pas de quoi payer un loyer ».
« En même temps », BFM Business nous informe qu’ « Amazon a triplé son bénéfice net au troisième trimestre ». L’article de la chaîne économique vante les velléités « sociales » du patron de l’entreprise de vente en ligne. Il est vrai que Jeff Bezos a fort à faire, entre « optimisation fiscale », destruction des invendus soulignée par le journaliste Benoît Berthelot sur France Inter et mauvaises conditions de travail de ses salariés, aux États-Unis selon Phone Android comme au centre de Montélimar selon Capital.
Aurons-nous un sapin de noël cette année ? La question peut sembler saugrenue. Le gouvernement a pourtant longtemps tenu les Français en haleine. Le Point rappelle le 17 novembre qu’un « décret (a été) pris par le gouvernement après la fronde des libraires et des petits commerçants, interdisant la vente des « produits non essentiels » dans les commerces restés ouverts ». Parmi ceux-ci : les sapins de noël…
« Vous pouvez acheter votre sapin de noël dès ce vendredi », nous informe avec satisfaction La Dépêche.
Faire ses courses était autrefois une tâche anodine. Le confinement a changé la donne. Ne vous avisez pas à faire vos courses dans un autre département, vous vous exposez à la maréchaussée. C’est le sort qu’ont connu des habitants d’Eure et Loir « verbalisés pour avoir fait leurs courses… en Essonne », le département voisin, nous informe Le Parisien le 19 novembre.
Pendant ce temps, les « violences urbaines » continuent en banlieue, comme à Vaulx-en-Velin le 19 novembre, dans plusieurs communes du département de l’Ain le 14 novembre, à Macon, Clermont-Ferrand et Soissons le 14 novembre, Vénissieux le 11 novembre, Valence et Romans-sur-Isère le 7 novembre, Oyonnax le 6 novembre, lors de la nuit d’Halloween un peu partout en France selon Europe 1.
Par contre, les médias qui ont consacré un article à ces violences ne donnent aucune information sur d’éventuelles verbalisations pour non-respect du confinement par les jeunes des cités. S’agit-il d’un autre sujet ou alors, une fois de plus, comme lors du premier confinement, s’agit-il d’être fort avec les faibles et faible avec les forts ?
Le Préfet de police des Bouches-du-Rhône a organisé une opération de contrôle des attestations, de jour, il est vrai. S’exprimant au micro de BFMTV, il souligne que « personne parmi les vendeurs et les acheteurs de drogue n’avait d’attestation ».
« En 2020, il est donc pire de sortir sans attestation que de vendre de la drogue », souligne le sénateur Jeremy Bacchi sur Twitter.
Le deuxième confinement moins bien vécu que le premier
Plusieurs médias mettent en avant l’impact économique du ralentissement forcé de l’activité.
La Tribune souligne de façon très factuelle qu’ « un mois de confinement coûte “entre 50 et 75 milliards d’euros” et près de 3 points de PIB à l’économie, en plus de mesures de relance qui vont être multipliées par l’État ».
L’Opinion nous informe le 18 novembre que « Privés de débouchés, les professionnels de l’agroalimentaire qui alimentent les cafés et restaurants français craignent, eux aussi, les faillites massives ».
Derrière les chiffres et les statistiques qui dégringolent, il y a des hommes et des femmes.
Sur CNews, un médecin généraliste affirme le 11 novembre : « Parmi nos patients il y a des commerçants, des artisans… Ils nous disent tous qu’ils sont à bout (…) En 40 ans de carrière je n’ai jamais vu ça ».
Alors qu’en Belgique, le suicide mi-novembre d’une indépendante fait la une des couvertures de nombreux médias, en France, les médias de grand chemin essaient de tenir le public en haleine avec les affaires Daval et Fourniret. Des affaires qui sont tout sauf représentatives de la priorité du moment pour de nombreux entrepreneurs et salariés privés d’emplois : survivre.
Un confinement qui fait douter
Sur les plateaux de télévision, des professionnels de santé émettent des doutes sur l’efficacité du confinement.
Sur CNews, le professeur Michaël Peyromaure, chef du service d’urologie de l’hôpital Cochin à Paris estime qu’« on va massacrer un pays pour sauver 10 ou 20 ou 30 000 vies ». À plusieurs reprises lors d’un débat le 18 novembre, il estime humblement « ne pas savoir » si le confinement est efficace. Le professeur souligne également l’absence d’utilisation maximale de la « réserve » dans les hôpitaux et des places disponibles dans les cliniques privées.
Lors de l’émission « Bercoff dans tous ses états » le 19 novembre, le Professeur J.-F. Toussaint présente une étude scientifique menée dans de nombreux pays qui aboutit à une conclusion édifiante : le confinement n’aurait aucun impact sur la mortalité.
Pour parachever le tout, le 17 novembre lors du JT de LCI, une journaliste apporte plusieurs éléments mettant en avant l’absence de lien entre le confinement et la baisse de la pandémie observée durant les dernières semaines.
Dans l’édition du 21 novembre du Figaro, Jean-Louis Thériot appelle à « sortir de l’Absurdistan, vite ». Les chiffres qu’il présente sur la stratégie du gouvernement, qui confine plus qu’il ne teste et n’isole, sont cruels pour la France par rapport à d’autres pays européens.
L’état psychique de nombreux français se détériore. Sputniknews donne la parole à une psychiatre qui rappelle qu’« être coupé de la vie sociale rend fou ». Dans un article du 16 novembre, Le Parisien souligne que « le confinement fait craquer les plus jeunes » dont certains, de plus en plus nombreux, sont en proie à la dépression et aux idées suicidaires.
Un confinement de plus en plus impopulaire
Si les manifestations contre le confinement se multiplient en France, c’est en toute discrétion médiatique. Des commerçants, comme à Gap, des croyants qui réclament le droit d’exercer leur culte, dans de nombreuses villes de France, de citoyens qui manifestent dans différentes villes de France, tout cela est accessoire à voir le black-out médiatique à ce sujet.
Comme le souligne l’économiste Philippe Herlin sur son compte Twitter le 20 novembre :
« Il y a de nombreuses et régulières manifestations contre le #confinement et la fermeture des #commerces, mais dont les médias nationaux ne parlent pas… ».
Dans ces conditions, il ne faut pas s’étonner que les Français cherchent l’information ailleurs, comme en témoigne le succès phénoménal du récent documentaire « Hold up »…
Pour prendre un peu de recul vis-à-vis d’un gouvernement qui semble – très mal — gérer son risque pénal à l’aune des entrées en réanimation, signalons la récente conférence d’Olivier Rey sur « l’idolâtrie de la vie », qui retrace l’évolution de la représentation de la mort en France dans l’histoire. Ou bien voir le dossier dirigé par Ludovic Maubreuil dans la revue Éléments, numéro octobre/novembre 2020. On peut y trouver bien des explications tant sur l’hystérie du moment que sur le remède de cheval imposé aux Français.