Près d’un mois après avoir été forcé de reculer en Grande-Bretagne face aux réactions suscitées par le blocage du compte de la la Free Speech Union, l’Union pour la liberté de parole, le service de paiement en ligne américain PayPal devait faire marche arrière précipitamment face aux violentes réactions suscitées aux États-Unis par son nouveau règlement.
Le 7 octobre, le Daily Wire prévenait ses lecteurs que PayPal avait modifié son règlement et que, à partir du 3 novembre, la compagnie de paiement en ligne de Californie s’autoriserait à prélever une amende de 2 500 dollars sur les fonds de tout client qui relaierait de la « désinformation » ou qui aurait tout autre comportement faisant peser un risque sur le « bien-être » des autres utilisateurs. Cette somme de 2 500 dollars américains pourra être prélevée pour chaque offense constatée par PayPal, expliquait le Daily Wire.
Comme on peut le lire dans l’article en question du Daily Wire, le nouveau règlement prévoyait ainsi, en plus de ce qui existait déjà, « une interdiction “d’envoyer, de publier ou de diffuser des messages, des contenus ou des documents” qui “encouragent la désinformation” ou “présentent un risque pour la sécurité ou le bien-être des utilisateurs”. Il est également interdit aux utilisateurs de “promouvoir la haine, la violence, l’intolérance raciale ou toute autre forme d’intolérance discriminatoire” ».
La guerre culturelle bat son plein
Rapidement, la nouvelle se répandait dans les médias conservateurs alternatifs et mainstream, comme Fox News, puis dans les grands médias progressistes bien forcés d’en parler aussi, comme l’a fait par exemple le Washington Post le 10 octobre dans un article intitulé : « PayPal face fait face à des réactions négatives après avoir lancé l’idée d’amendes pour le partage de fausses informations. » D’autres en avait parlé de l’autre côté de l’Atlantique, en Grande-Bretagne, avec des appels à retirer rapidement son argent entendus y compris sur la radio plutôt progressiste LBC News, ou un éditorial publié le 16 octobre sur le Telegraph sous le titre « Comment PayPal est devenu le centre des guerres culturelles de la Silicon Valley ».
Un champion de la chasse aux sorcières
Parmi les réactions à cette dernière tentative de censure de PayPal, on notera aussi celle de l’ancien PDG de la compagnie, David Marcus, qui a tweeté le 8 octobre : « Il m’est difficile de critiquer ouvertement une entreprise que j’aimais et à laquelle j’ai tant donné. Mais la nouvelle politique d’utilisation acceptable de PayPal va à l’encontre de tout ce en quoi je crois. Une société privée peut maintenant prendre votre argent si vous dites quelque chose qu’elle n’approuve pas. C’est de la folie. »
Le Telegraph donne un historique intéressant de l’évolution de cette société de paiement en ligne devenu un des champions californiens de la « chasse aux sorcières » et fournit ces explications à propos du PDG de la firme américaine : « Dan Schulman, 64 ans, directeur général de PayPal, n’a pas honte de sa position sur l’activisme social. “Ma mère m’avait emmené à une manifestation pour les droits civiques dans ma poussette”, a‑t-il déclaré dans une interview de 2008. “Je suis né avec l’activisme social dans mon ADN”. Sous la surveillance de Schulman, PayPal a été à l’avant-garde d’un mouvement connu sous le nom de “capitalisme des parties prenantes” (ang. stakeholder capitalism, un concept développé entre autres par Klaus Schwab, le créateur du Forum économique mondial de Davos et grand promoteur du « Great Reset », NDLR), dans lequel les entreprises promeuvent des questions sociales et éthiques telles que la lutte contre le changement climatique ou l’amélioration des conditions de travail, parfois au détriment des mouvements à court terme du cours des actions. Bien que cela puisse sembler louable, les critiques estiment que les tentatives de PayPal pour améliorer la société ont débouché sur une répression des utilisateurs qui ne se conforment pas à sa vision spécifique du monde. »
Rétropédalage…
Mais en l’occurrence, dès le lendemain de la publication du Daily Wire, le même média informait que : « La société de services financiers, qui a à plusieurs reprises muselé des organisations et des commentateurs individuels pour leurs opinions politiques, a annoncé samedi, un jour après la publication de l’article du Daily Wire, que l’annonce avait été diffusée par erreur. “Un avis [de politique d’utilisation acceptée] a récemment été diffusé par erreur et contenait des informations incorrectes”, a déclaré un porte-parole de PayPal. “PayPal n’inflige pas d’amende pour des informations erronées et ce langage n’a jamais été destiné à être inséré dans notre politique. Nous sommes désolés pour la confusion que cela a causé.” »
Toutefois, comme informait par exemple la chaîne de télévision CNBC le 12 octobre, cet aller-retour de PayPal a réveillé les inquiétudes pour la liberté d’expression aux États-Unis face aux velléités de censure des géants progressistes de la Silicon Valley, et le recul du géant du paiement en ligne « n’a pas empêché le chef de la principale agence de protection des consommateurs du gouvernement fédéral de suivre de près ces développements et d’examiner comment les grandes entreprises de technologie financière dictent la façon dont les consommateurs utilisent leur plateforme. »
Du côté de l’opposition républicaine, de droite (alors que PayPal est clairement de gauche), et alors que les élections de mi-mandat auront lieu le 8 novembre, plusieurs membres du Congrès se sont émus, tel le sénateur Tim Scott qui a écrit une lettre au PDG de la compagnie californienne Dan Schulman dont voici un extrait : « J’ai été gravement préoccupé par les mises à jour récemment signalées de la politique d’utilisation acceptable (PUA) de PayPal, Inc. qui donneraient carte blanche à l’entreprise pour imposer des pénalités financières aux utilisateurs qui, selon elle, ont violé des politiques mal définies de lutte contre la “désinformation”. (…) Les institutions financières fournissent des services financiers, elles n’ont pas à faire de l’ingénierie sociale. (…) De plus en plus, des entreprises cherchent à bénéficier de la stabilité et de l’appui réglementaire des États-Unis, tout en ignorant ou en minant de manière flagrante les protections américaines de longue date en matière de liberté d’expression et de diversité politique. »
Il serait temps en effet que la classe politique américaine se préoccupe des agissements de la Big Tech en matière de censure, car c’est justement à cause de compagnies comme PayPal que les États-Unis sont perçus dans le monde comme un plus gros danger pour la démocratie que la Russie ou même la Chine communiste, ainsi que l’avait révélé une grande étude publiée au printemps 2021.