Il prendra ses fonctions le 10 juin 2024 comme président directeur général de LCP : Emmanuel Kessler a été choisi à la surprise générale par la présidente de l’Assemblée nationale, alors même que le comité de sélection lui avait préféré la candidate Brigitte Boucher.
Le comité de sélection avait choisi : Brigitte Boucher devait être la prochaine figure à incarner LCP. C’était sans compter sur Yaël Braun-Pivet, la présidente de l’Assemblée nationale, qui n’a pas tenu compte de cet avis et nommé à la présidence de la chaîne parlementaire l’ancien président de Public Sénat, Emmanuel Kessler.
Cinq candidats pour un élu
Quels étaient les projets respectifs des cinq candidats présélectionnés pour LCP ? Les cinq heureux élus pressentis pour prendre la tête de la chaîne parlementaire avaient été entendus le 6 mai à l’Assemblée nationale pour présenter leur vision. Ils avaient auditionné par le comité de sélection composé de la délégation du Bureau de l’Assemblée nationale responsable de la communication et de la presse. Bérénice Ravache, Michaël Szames, Emmanuel Kessler, Brigitte Boucher et Laure Kaltenbach-Fournier avaient alors présenté leur vision de la direction de la chaîne parlementaire. À l’issue de cette audition, trois candidats avaient été retenus pour être présentés au bureau de l’Assemblée nationale qui devait trancher en nommant, par voie de proposition de la présidente de l’Assemblée Yaël Braun-Pivet, l’un d’entre eux.
Une chaîne de la « proximité » ?
La proximité avec le public local avait été l’un des arguments avancés par différents candidats. Bérénice Ravache, ancienne directrice déléguée de France Bleu avait ainsi souligné que : « Le sentiment d’invisibilité c’est le mal moderne d’une époque où on a tant de moyens d’expression et de communication, et pourtant tant de mal à se faire entendre ». Celle qui fut aussi secrétaire générale de Radio France avait présenté un plan, dénommé « LSD » (soit local, social et direct), en insistant sur le fait que la proximité devait aussi intégrer dans les programmes les travaux des députés en circonscription.
Michaël Szames, deuxième candidat et directeur des relations institutionnelles et de la communication de l’Union nationale des centres communaux d’action sociale, avait indiqué vouloir faire de LCP un « média citoyen de proximité de référence, capable de répondre au défi démocratique inédit qui est devant nous ». Aspirant à transformer LCP en média global, il avait proposé trois engagements pour la chaîne, incluant la notion « « d’aller vers » pour la proximité ».
Emmanuel Kessler, l’ancien directeur des rédactions économiques de Prisma Média avait quant à lui souligné que la chaîne « a[vait] un rôle à jouer pour retisser du lien entre élus et citoyens ».
« Moderniser » LCP ?
Sur le web, la chaîne LCP apparaissait à la peine pour les différents candidats. Bérénice Ravache avait souligné que « le site web de LCP [était] à la peine, faute de contenus et de référencement qui rendent un site visible et attractif ». De son côté, Michaël Szames aspirait à créer des partenariats avec des « acteurs clefs du numérique comme Konbini, Brut, Twitch ». Emmanuel Kessler voulait quant à lui solliciter « les influenceurs » et créer un nouveau rendez-vous pour faire de la « téléréalité citoyenne ». Souhaitant générer un « réflexe LCP », Brigitte Boucher, quatrième candidate, espérait aussi de la chaîne qu’elle devienne « réactive à l’actualité » et qu’elle réaffirme ses trois missions, soit « la mission parlementaire, la mission citoyenne et la mission éducative ». Elle souhaitait également créer un « The Voice » adapté à la chaîne, dont l’enjeu du concours ne serait pas musical mais s’apparenterait à un concours d’éloquence.
Les cinq candidats avaient eu avec plus ou moins de parcimonie, recours à un vocabulaire très convenu. « Antidote à la fièvre » (E. Kessler), la chaîne LCP devrait être le « réflexe citoyen » (M. Szames), un « formidable outil au service de la démocratie » (B. Boucher) comme un « label de référence » (L. Kaltenbach-Fournier). Cette dernière candidate, dont la carrière (présidente de l’agence d’ingénierie culturelle Creative Tech) était plus singulière que celle de ses homologues, avait été la seule à évoquer l’augmentation du temps d’antenne des parlementaires dans son programme, proposant que ce temps atteigne les 55 % contre les 42,5 % en 2023.
Emmanuel Kessler : le choix du réseau ?
Malgré la large avance prise par Brigitte Boucher dans les votes du comité de sélection (10 points d’avance sur Kessler), c’est à Kessler qu’est revenu le poste. Celui qui avait été nommé par Pierre Moscovici à la communication de la Cour des comptes aurait, si l’on en croit Le Figaro, « convaincu la présidente ». « Elle trouve qu’il a une vraie vision à court, moyen et long terme », a expliqué un proche de Braun-Pivet au quotidien. À l’inverse, Brigitte Boucher aurait essayé de jouer de ses relations avec certains députés pour appuyer sa candidature. Le choix de la présidente a quoiqu’il en soit déplu à certains membres du comité de sélection, qui ont souligné : « Supprimons le comité de sélection puisqu’il ne sert à rien. » D’autres sources que Le Figaro indique « proches du dossier » se sont également émues : « L’Assemblée nationale est censée être le temple de la démocratie. Faire fi du vote des députés est contraire à toutes les valeurs de cette institution. » Les députés ont la mémoire courte : un tel mépris du vote n’est pourtant pas une première pour l’institution…
Voir aussi : Emmanuel Kessler, portrait