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Le blitzkrieg trumpien rendra-t-il enfin les médias intelligents ?

22 février 2025

Temps de lecture : 12 minutes
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Le blitzkrieg trumpien rendra-t-il enfin les médias intelligents ?

Temps de lecture : 12 minutes

En quelques semaines, le couple Trump/Musk a bouleversé le paysage politique, géopolitique et idéologique. Notre correspondant en Amérique du Nord revient – avec la méthode des questions/réponses – sur les conséquences de ces bouleversements dans les médias, leurs actionnaires et les journalistes.

Comment se positionne aujourd’hui Trump dans l’eschatologie médiatique ?

Résumons en une seule phrase : les jour­nal­istes n’ont pas com­pris qu’il y a eu une élec­tion; leurs action­naires et patrons, oui! 

La fab­ri­ca­tion d’un Trump apoc­a­lyp­tique, scan­daleux et cro­quemi­taine, avait fait jadis gag­n­er beau­coup d’argent – ce n’est plus le cas !– à la cas­cade de hold­ings des grands médias télévisés qui somme toute for­ment un tout petit groupe en nombre :

  • AT&T : action­naire majori­taire de Warn­er Media, qui pos­sède des médias tels que HBO, Warn­er Bros., CNN et TBS.
  • Via­com-CBS : pro­prié­taire de médias tels que CBS, MTV, Nick­elodeon et Para­mount Pictures.
  • The Walt Dis­ney Com­pa­ny : pro­prié­taire de médias tels que ABC, ESPN, Dis­ney Chan­nel et
  • Com­cast : action­naire majori­taire de NBC Uni­ver­sal, qui pos­sède des chaînes telles que NBC, MSNBC, CNBC et Telemundo.
  • Warn­er Media /Warner.bros-Discovery: pro­prié­taires de
  • Quelques grands cap­i­tal­istes famil­i­aux con­tin­u­ent de jouer un grand rôle (les Mur­doch pos­sè­dent près de 40% du groupe FOX, tan­dis que les trusts famil­i­aux de John Mal­one ou de Steven M. Ross, sont très influ­ents dans la cas­cade Warn­er et Discovery)
  • Notons que les giga-cap­i­tal­istes tels que Black­Rock et Van­guard ou encore State Street sont à peu près présents partout dans le sys­tème médiatique.

Qu’ont compris les actionnaires… et pas les autres ?

Résumons là encore en une phrase : en con­séquence de plusieurs déci­sions de jus­tice, comme ici, l’Intelligence arti­fi­cielle va devenir une source de revenus colos­sale, assise sur des rede­vances, bien supérieure aux abon­nements et à la publicité.

Dans ce mod­èle, les médias devi­en­nent des « créa­teurs de con­tenu » dans lesquels vont puis­er les entre­pris­es d’intelligence arti­fi­cielle. Or, aujourd’hui, l’IA, c’est Trump. De plus les « cel­lules souch­es » de l’IA (les algo­rithmes de départ), sont cal­i­brés afin de pro­duire une cer­taine « vision du monde ». Et cette vision du monde, c’est encore Trump. donc ne serait-ce que pour cette rai­son, il vaudrait mieux thé­ma­tique­ment aller dans le bon sens.

Et les journalistes n’ont rien compris ?

Il va fal­loir leur expli­quer longtemps. Les jour­nal­istes « d’hier » ont été dressés à penser en silo, ou plutôt à col­porter une bonne parole écrite par d’autres. Les aboyeurs d’aujourd’hui ont du mal à com­pren­dre que le monde a changé et que la révo­lu­tion trump­iste a pris racine. Et que la bonne parole a changé. Ils con­tin­u­ent (pour l’instant) de voir Trump comme une anom­alie. Ils n’ont pas com­pris que Trump avait obtenu 66 mil­lions de votes en 2016, puis 72 mil­lions en 2020, puis main­tenant 77 mil­lions, de sur­croit bien mieux répar­tis dans dif­férentes caté­gories sociales. Il s’agit donc d’une poussée con­stante, en pro­fondeur et en spec­tre de plus en plus diver­si­fié. Ils n’ont pas com­pris que le Trump 2024 est un nou­v­el Oba­ma… à l’envers!

Ils n’ont pas com­pris non plus que le mod­èle d’affaire de leurs patrons a changé, il n’ont pas com­pris que le mod­èle d’affaire du pays (pseu­do-mul­ti­latéral­isme hyp­ocrite) a changé (impéri­al­isme économique et tech­nologique multipolaire).

En con­séquence, ils se com­por­tent comme des acteurs privés de texte, et, for­cés à impro­vis­er, s’épuisent à courir après toutes les balles.

Comment se fait-il qu’ils n’aient pas compris cette évidence ?

Parce que, con­traire­ment à leurs action­naires, ils ne com­pren­nent pas qu’une oli­garchie vient d’en rem­plac­er une autre. Et que s’y sont ral­liés les grandes machines comme Black­Rock et Van­guard, et de nom­breux autres. Ils sem­blent ne pas com­pren­dre que si les GAFAM avaient mis en place Barak Oba­ma et Joseph Robi­net Biden, ce sont bien aujourd’hui les grands pontes de l’intelligence arti­fi­cielle et du numérique qui ont instal­lé Trump à la Mai­son blanche. Ce sont eux, les nou­veaux patrons. Et ce sont les patrons de leurs patrons. Et déjà les con­trats des jour­nal­istes se renou­vel­lent à une frac­tion du mon­tant antérieur, quand ils ne sont pas sim­ple­ment ter­minés. Blessés dans leur van­ité, ils aboient tou­jours, mais le cœur n’y est plus.

Pourquoi tous les démocrates capitalistes ont-ils misé sur Trump ?

D’abord parce que les équipes de Biden ont voulu faire avec eux ce qu’ils avaient fait avec Twit­ter et Zucker­berg. Ils pen­saient pou­voir impos­er leurs règles (et leur normes) aux géants en herbe de l’IA. Ils se situ­aient men­tale­ment dans le mod­èle qui fixe l’État comme patron des tech­nolo­gies. Ils sem­blent ignor­er que ce sont les tech­nolo­gies qui vont main­tenant con­trôler l’État.

Or, deux­ième rai­son, Trump et les oli­gar­ques se tien­nent par la bar­bi­chette. Ce qui con­stitue la force de la nou­velle coali­tion : Trump et les siens tout comme Musk et les siens, sans omet­tre Kennedy et les siens, tous veu­lent démolir un sys­tème rongé par les coche­nilles, mais ni les uns ni les autres ne pour­raient le faire seuls.

La troisième rai­son serait que cette nou­velle généra­tion d’entrepreneurs com­prend que les États-Unis sont un Titan­ic qui flotte encore, ne réal­isant pas qu’il est déjà mort. Il faut donc, pensent-ils, recon­stru­ire le bateau en pleine mer plutôt que le sauver. Car l’iceberg chi­nois a causé beau­coup trop de dom­mage à la coque. Et les équipages du mon­stre sont dépassés par le principe de Peter. Il faut en fait tout recon­stru­ire : une économie adap­tée au futur, une armée adap­tée au futur, pour réin­ven­ter l’hégémon améri­cain du futur. Et tout cela passe par une dom­i­na­tion tech­nologique mas­sive, face à la Chine qui fait vite, mieux et moins cher. Pour mieux com­pren­dre cette vision nous référons vos lecteurs au pod­cast All In, dont les par­tic­i­pants ont joué un grand rôle dans la cam­pagne Trump, et le suiv­ent encore aujourd’hui.

Réinventer en même temps l’économie, l’armée et la technologie, ça semble prometteur. Mais est-ce faisable ?

C’est ici que s’impose la pro­phy­lax­ie en cours qui a pour objec­tif de net­toy­er les écuries d’Augias et réor­gan­is­er en accéléré la bureau­cratie, la ramen­er à ses mis­sions orig­inelles, ren­dre l’État à la pop­u­la­tion. Bill Clin­ton et Al Gore avaient essayé, Barak Oba­ma aus­si. Sans succès.

Or, cela change aujourd’hui. Il faut not­er que tous les hauts respon­s­ables aux postes cri­tiques récem­ment nom­més (San­té, Défense, Affaires étrangères, Tré­sor, Sécu­rité nationale, Édu­ca­tion, etc.) vont, out­re leurs tâch­es usuelles, join­dre leurs forces avec le min­istère tem­po­raire de l’efficacité gou­verne­men­tale dirigé par Musk, le DOGE.

Une telle opéra­tion cumule trois objec­tifs pour 2026 :

  • Opéra­tionnelle­ment : l’optimisation de la per­for­mance du système
  • Cul­turelle­ment : l’éradication du paysage éta­tique et fis­cal des églis­es wok­iste, cli­ma­tiste, et belliciste.
  • Finan­cière­ment : la récupéra­tion en cash de deux à trois mille mil­liards de dollars.

Pourquoi un objectif si court, si impensable ?

Il faut d’abord agir avant que le par­ti démoc­rate rejail­lisse de ses cendres.

Ensuite, date impor­tante, les élec­tions lég­isla­tives de mi-man­dat auront lieu en 2026. Sur un plan politi­cien, il sera impor­tant certes de démon­tr­er la réal­i­sa­tion d’un pro­grès, mais prin­ci­pale­ment de met­tre en lumière les bien­faits atten­dus de la con­tin­u­a­tion des nou­velles poli­tiques, c’est-à-dire le stop­page de la Chine dans ses pro­grès exponentiels.

Avec égale­ment le rêve secret de la nou­velle oli­garchie : réin­staller la Russie et ses promess­es économiques dans le giron du « Make the World Great Again », ou encore « Make the World Intel­li­gent Again ». avec à terme un décou­plage de la Russie et de la Chine.

Soyons clair : l’administration Trump ne réus­sira que dans le cas où elle aura dégagé deux à trois mille mil­liards de $, ce qui per­me­t­trait non seule­ment de col­mater pro­gres­sive­ment les déficits budgé­taires, de com­penser l’inflation tar­i­faire et d’inverser le cer­cle vicieux de la dette.

Car ce sera entre 2026 et 2028 que tombera la guil­lo­tine. Les États-Unis auront à rem­bours­er des por­tions impor­tantes de leurs cap­i­taux emprun­tés. Habituelle­ment, ils emprun­tent à nou­veau pour rem­bours­er le prin­ci­pal. Mais, cette fois-ci pour­ront-ils le faire, et à quelles con­di­tions? Faute de pro­duire à nou­veau des excé­dents, l’Amérique devien­dra l’Angleterre post-impéri­ale des années cinquante et soix­ante : un pays en fail­lite. Les jour­nal­istes le savent-ils ?

Revenons aux médias, juste­ment. Pourquoi ces plans « futur­istes » de la nou­velle équipe ne sont-ils pas accep­tés, ou du moins admis­si­bles en tant que sujet d’étude. Pourquoi entend-on tou­jours la même ren­gaine, à savoir « Hitler avait per­ver­ti la démoc­ra­tie pour organ­is­er le géno­cide, Trump et Musk font de même », comme cela s’est dit après le dis­cours de Munich du Vice-Prési­dent Vance ?

D’abord faute de nou­veaux maîtres démoc­rates capa­bles de leur ven­dre un mes­sage cohérent, les jour­nal­istes améri­cains, après avoir ten­té de recy­cler quelques vieil­leries sur Trump (oubliant au pas­sage qu’il n’est plus le prin­ci­pal de la fable), devi­en­nent à leur tour des per­son­nages en quête d’auteurs. Il vont donc acheter leur drogue chez les grossistes européens. Or, en Europe, le sys­tème médi­a­tique né de la généra­tion Oba­ma tient encore. La presse européenne elle non plus ne saisit pas les enjeux struc­turels et cul­turels qui vont faire implos­er l’ordre mon­di­al actuel. L’Amérique pense de plus en plus que les Européens vivent encore dans les années quatre-vingt-dix.

Mais il y a une autre rai­son à la per­sis­tance d’une cer­taine hos­til­ité à l’égard de ce mou­ve­ment MAGA.2 : la peur. La nomen­klatu­ra des élites poli­tiques, médi­a­tiques, cul­turelles, bref la classe dirigeante, est ter­ror­isée par l’émergence de cette nou­velle lutte des class­es qui se con­stitue sous leurs yeux. Ils ont béné­fi­cié de la lutte des races et des gen­res, mais sont per­dus face à ce nou­veau bloc inat­ten­du et désor­mais com­pact qui vient de se soud­er pour les con­fron­ter… sans culpabilité.

En quoi consiste cette terreur ?

Les travaux du « DOGE » de Elon Musk sem­blent pro­duire un effet qui n’était ni atten­du ni pri­or­i­taire au départ : de nou­veaux lièvres sont lev­és, et peut-être de nou­velles incrim­i­na­tions « en col blanc » à venir. Il fau­dra cepen­dant atten­dre pour en mesur­er la magnitude.

Ensuite, la stratégie de désarchivage des doc­u­ments con­fi­den­tiels sur le Prési­dent  Kennedy et son frère, ou sur la vie et la mort d’Epstein, ou encore le dévoile­ment des cir­con­stances autour des deux ten­ta­tives d’assassinat de Trump, puis enfin les enquêtes qui vont démar­rer au Min­istère de la Jus­tice sur le « War­fare » judi­ci­aire mené con­tre Trump pen­dant la dernière cam­pagne élec­torale, toute cette masse risque d’être lourde de con­séquences pour beau­coup de monde, et donc aus­si par­mi les jour­nal­istes et action­naires, que ce soit au pénal ou au civ­il. En effet, les groupes de presse craig­nent une épidémie de procès, dom­mages et intérêts astronomiques à la clé.

Les travaux du « Depart­ment of Gov­ern­ment Effi­cien­cy » pour­raient pro­duire une masse de matériels com­pro­met­tants sus­cep­ti­bles d’être util­isés à des fins de négo­ci­a­tions poli­tiques ou inter­na­tionales. Car, à l’inverse de son pre­mier man­dat, Trump dis­pose d’une solide équipe offi­cielle et offi­cieuse qui pro­lon­gent ses tentacules.

Pour en revenir aux action­naires, il est prob­a­ble que ces derniers soient en posi­tion d’attente. Les dirigeants lan­cent déjà des mes­sages, et dis­ci­plinent d’avantage leurs jour­nal­istes, en licen­cient quelques-uns par­mi les plus déjan­tés. Et attendent.

On parle beaucoup des juges en ce moment. Est-ce un problème ?

Oui. Comme d’habitude, les juges activistes, sont ici pour prévenir l’émergence de la vérité, se sub­sti­tu­ant un jour au pou­voir lég­is­latif, un autre au pou­voir exé­cu­tif. Leur déci­sion la plus prob­lé­ma­tique vise à blo­quer – au moins le temps des procès-  l’accès aux infor­ma­tions du Min­istère du Tré­sor par le DOGE (sur les don­nées dites per­son­nelles). L’incident a com­mencé lorsque l’équipe de Musk a décou­vert que le bien-fondé du paiement de  4,7 mille mil­liards de $ sont poten­tielle­ment con­testa­bles, les verse­ments ayant été exé­cutés sans inscrip­tion au dossier  des codes d’identification usuels, ce qui rendait les opéra­tions « pra­tique­ment intraçables ».

Le DOGE a alors demandé au tré­sor d’avoir accès aux don­nées brutes, mais 21 États démoc­rates ont inten­té un procès, ce qui a entrainé une injonc­tion de sur­soir à exé­cu­tion de la part du juge en charge de l’affaire. Ce qui retardera le proces­sus. Or le DOGE n’est pas une créa­tion dia­bolique : l’agence a sim­ple­ment rem­placé une agence dig­i­tale préex­is­tante (fondée par Oba­ma) en charge d’introduire et d’améliorer le dig­i­tal dans les ser­vices gou­verne­men­taux en vue d’une ges­tion plus effi­ciente. Le site inter­net actuel de l’agence illus­tre les sujets majeurs et les entités qui sont dans son col­li­ma­teur, procé­dant à des mis­es à jour quotidiennes.

Par­mi les pris­es de chas­se, l’USAID, qui reste encore à débobin­er, l’administration en charge des ressources humaines, la Sécu­rité Sociale qui sem­ble-t-il entre­tient des rela­tions avec une ving­taine de mil­lions d’américains de plus de cent ans, ce qui entraine quelques soupçons.

Le mot de la fin ?

En résumé :

  • Une nou­velle oli­garchie est en train de pren­dre le pou­voir sur le monde, celle de l’intelligence arti­fi­cielle et des mon­naies numériques
  • Les action­naires de presse ten­tent sem­ble-t-il de procéder par petites touch­es à des réa­juste­ments, con­scients de leurs futures straté­gies de crois­sance ou de délestage.
  • Les chaînes ont per­du cer­tains ténors, et, en général, les attaques per­son­nelles con­tre Trump ont grande­ment diminué.
  • Le nou­veau cro­quemi­taine est Elon Musk. Il était un génie venu du Cana­da. Il est désor­mais un Sud-Africain raciste qui libère le monde de la cen­sure pour instau­r­er le total­i­tarisme. Mais le cœur n’est plus dans ces attaques. Les action­naires recom­man­dent une cer­taine mesure.
  • Les jour­nal­istes sont encore boulever­sés par les récents dis­cours sur l’Ukraine du Vice-Prési­dent Vance, du Min­istre des affaires étrangères Rubio et du min­istre des Armées Heghseth.
  • Ils sont tout aus­si désori­en­tés dans les affaires de Gaza, de Pana­ma, du Cana­da, du Groenland.
  • Les jour­nal­istes, donc, font peine à voir. Ils craig­nent de per­dre leur poste, l’environnement tech­nologique mod­i­fie les mod­èles d’affaires, le busi­ness va mal. Ils décou­vrent leur pro­pre vacuité. Alors com­bi­en de temps leur fau­dra-t-il pour rede­venir humains ?
  • Le para­doxe veut que les pod­casts des anciens mis à la porte par FOX – Tuck­er Carl­son, Bill O’Reilly, et Meg­yn Kel­ly – ont tous les trois des taux d’audience, à cer­taines heures, supérieurs aux audi­ences des médias de grand chemin. D’où le rachat par FOX de Red Seat Ven­tures, leur courtier en pub­lic­ité. Ce qui les ramèn­erait de façon détournée à la mai­son mère.

Mimar Sinan

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