Faire imprimer son journal à l’étranger quand les rotatives sont bloquées par des ouvriers en grève : voici la solution imaginée et mise en œuvre par Michel Lucas, patron du Crédit Mutuel, et donc du groupe Ebra qui regroupe la plupart des titres de l’est de la France, pour sortir le journal L’Alsace, mardi 25 novembre dernier !
Comme le rapporte Rue89 Strasbourg, « des instructions avaient été données à la rédaction pour « bater » (c’est à dire valider) les pages à 17h30, afin qu’elles soient imprimées ailleurs, probablement par l’imprimerie d’un journal du Bade-Wurtemberg. Les exemplaires ont ensuite été ramenés dans la nuit près de Mulhouse, un rendez-vous a été donné aux employés de L’Alsace en charge de la distribution pour qu’ils les récupèrent ».
Le 25 novembre, une édition spéciale de L’Alsace pour la venue du pape François à Strasbourg, était donc distribuée chez les abonnés et disponibles dans les kiosques.
Forcément, les grévistes, eux, ne sont pas contents. « Michel Lucas nous a fait le coup une fois mais il n’y en aura pas deux », prévient Brahim Bouchareb, délégué syndical Filpac-CGT, de l’imprimerie du journal, évoquant un « coup de force », qui va à l’encontre d’un « droit constitutionnel ». Et d’annoncer : « nous avons des relations avec les ouvriers des journaux en Allemagne et nous en appellerons à leur solidarité le cas échéant ».
Mais si le délégué CGT espère compter sur la solidarité des imprimeurs allemands, force est de constater qu’il n’a pas obtenu celle des journalistes du quotidien. Comme le note Rue89 Strasbourg, « les journalistes apprécient à mots couverts de voir le monopole de la Filpac-CGT sur l’impression battu en brèche ». Et de citer l’un d’entre eux : « s’ils perdent leur capacité de blocage, ils arrêteront peut-être de tirer contre tout un journal à 30 ! ». Pire : pour les grévistes, « les retours des abonnés ont été très bons ».
Période difficile, donc, pour les syndicalistes. « La Filpac-CGT est encore sous le coup » estime Rue89 Strasbourg. Et l’avenir ne s’annonce pas plus simple : « Michel Lucas a prévenu dans un email que si les ouvriers se mettaient à nouveau en grève, il fermerait purement et simplement le centre d’impression de L’Alsace ».
À suivre…
Source : Rue89 Strasbourg — crédit photo : L’Alsace / montage : Ojim