Après Time racheté à l’automne 2018 par le propriétaire de Salesforce Marc Beniof pour un peu moins de 200 millions de dollars, c’est Fortune qui change de mains et prend la direction de la Thaïlande.
Chatchaval Jiaravanon
Il faut apprendre à prononcer Charoen Pokphand Group et Chatchaval Jiaravanon, le second possèdant le premier. Charoen Pokphand Group possède des intérêts dans les télécoms, la pharmacie, la distribution, l’agroalimentaire, l’immobilier et la finance, essentiellement en Thaïlande mais aussi dans d’autres pays d’Asie. Plusieurs des sociétés du groupe sont cotées en Thaïlande et aux États-Unis.
Le groupe Meredith qui s’était déjà séparé de Time empoche 150 millions de dollars soit environ quinze fois les bénéfices annuels de Fortune, le magazine créé juste après le crash économique de 1929. Il faut plutôt parler du groupe Fortune maintenant puisque les conférences et la publicité digitale représentent plus de 60% des revenus, nettement plus que la publication elle-même.
Tendance de fond, soft power et gloire
Ce nouvel achat conforte une tendance déjà notée : les grandes fortunes américaines rachètent des médias classiques. Non pour gagner de l’argent, mais pour exercer une influence. Si Jeff Bezos d’Amazon a investi dans le Washington Post ce n’est pas pour y gagner quelques pauvres millions de dollars mais pour protéger son empire de la distribution d’aléas politiques potentiels.
La gloire ou le sentiment d’exister autrement que comme « businessman qui a réussi » sont aussi des moteurs pour de tels achats. Monsieur Jiavaranon a racheté Fortune en son nom propre, il est maintenant connu bien au-delà des frontières de la Thaïlande ou de Hong Kong où le rachat a été signé. Laurence Powell Jobs, veuve de Steve Jobs le fondateur d’Apple, s’offre ainsi une nouvelle vie en société en rachetant en 2017 le California Sunday Magazine et un peu plus tard le mensuel The Atlantic. De même, le Dr Patrick Soon Shiong (malgré son nom, il est américain) restera plus connu comme celui qui a racheté le Los Angeles Times que comme le fondateur d’une société de biotechnologie qui a réussi. Si vous avez quelques centaines de millions de dollars ou d’euros devant vous, vous savez ce qu’il vous reste à faire.