Dans son dernier point financier sur sa collecte, Le Média donne sa liste d’invités de la saison 2 – un pur concentré d’entre-soi, un « Best Of » qui n’a rien de très ébouriffant et la liste de son équipe. Tout ceci ressemble beaucoup à un générique de fin. Bien qu’Aude Lancelin assure que « notre destin n’est pas joué », sa tenue plus triste et noire que jamais dit ce qu’il en est : la mort du Média, qui n’a collecté que 31.500 des 90.000 € mensuels nécessaires à sa survie, semble pour bientôt.
Il en va du Média comme de l’État français vilipendé par les gilets jaunes en ce moment : les seconds demandent qu’est-ce que l’État peut bien faire des 1057 milliards d’euros de rentrée fiscales en 2018, les socios du premier se demandent où va l’argent de la collecte et des levées de fonds. Des 1,7 millions d’euros collectés à l’automne 2017, il ne reste rien, sauf des dettes.
Invités du Média : prolétaires sous-représentés, entre-soi bourgeois et gauchiste avant tout
Le Média donne aussi la liste de ses invités de la saison 2 – c’est-à-dire depuis le départ de Sophia Chikirou. Curieusement, pour un média censé représenter le terrain, la France au travail qui souffre et lutte, les invités prolétaires sont très peu nombreux. Sont surreprésentés en revanche des « experts » somme toute très bourgeois aux salaires confortables et divers militants de la mouvance gauchiste – l’un n’empêche d’ailleurs souvent pas l’autre.
Par exemple, on y trouve Dominique Plihon, porte-parole d’Attac France, le rédacteur en chef de Canal+ Jean-Baptiste Rivoire, le militant d’extrême-gauche « journaliste » voleur d’images Gaspard Glanz, le réalisateur Gilles Perret, Thomas Dietrich (ancien haut-fonctionnaire), le sociologue Ugo Palheta, le journaliste et actionnaire du très rentable Mediapart Laurent Mauduit, les historiens Pascal Blanchard, François Durpaire et Laurence de Cock, le sociologue Éric Fassin (pour lequel le racisme anti-blancs n’existe pas), la présidente de l’Institut des relations internationales et stratégiques Leslie Varenne, le professeur d’économie à Sciences Po Paris Julia Cagé, le démographe Emmanuel Todd, le politologue Michel Kaufman…
En politique, deux seules exceptions au gauchisme ambiant : le maire de Montfermeil Xavier Lemoine (LR), figure médiatique honnie des « progressistes » des beaux quartiers et le maire adjoint Modem du Blanc-Mesnil Abdeslan Itache. Sinon, on trouve tout de même la sénatrice EELV de Paris Esther Benbassa – 8550 € par mois de revenus en 2017, selon sa déclaration d’intérêts, la conseillère nationale de Paris et oratrice de la France Insoumise Danièle Simonnet, l’adjoint au maire FI de Champagne sur Marne François Cocq, le député de la France Insoumise Sabine Rubin
On y trouve tout de même quelques syndicalistes : Gaël Quirante (SUD poste 92), Gauthier Tachella (FO cheminots Paris Nord), Anne-Sophie Pelletier (déléguée CGT EHPAD de Foucherans 39), Alain Jeault (délégué central CGT Amazon), la secrétaire de la CGT-FAPT d’Aveyron et de l’union locale CGT de Decazeville Laurence Cahors… presque tous des salariés protégés – plus difficiles à licencier. Il semble que pour le Média, la parole de l’ouvrier ou de l’employé ne vaut rien en-dehors du cadre syndical, de préférence un cadre syndical très à gauche.
Une équipe limitée à 13 journalistes, dont deux en alternance
Une autre liste témoigne de l’attrition des équipes du Média : il s’agit de celle des collaborateurs. Au lancement, 14 personnes à plein temps formaient l’ossature de la rédaction, dont Noël Mamère et Sophia Chikirou qui eux deux n’étaient pas journalistes, et d’autres les avaient rejoints, pour animer des émissions ou y contribuer. Cet été, onze rejoignent la SDJ formée par Aude Lancelin et Théophile Kouamouo, quatre la dénoncent – dont trois s’en vont.
Après le départ de Jacques Cotta qui a estimé, lapidaire, que le Média n’était plus qu’un « simple lieu de propagande », restent à bord 13 journalistes et deux alternants. Soit Irving Magi, Yanis Mhamdi, Aude Lancelin – à la barre du navire désemparé – Théophile Kouamouo, présentateur lorsque le Média a annoncé sur la foi de militants d’extrême-gauche qu’il y avait un mort à Tolbiac, ce qui s’est avéré faux et a porté un coup majeur à sa crédibilité, Romain Moriconi, Virginie Cresci, Julien Brygo, Dolores Bakèla, Kevin Boucault-Victoire, Serge Faubert, Franck Dedieu, Rémi Kenzo-Pages et Lisa le Texier. Et deux alternants, Arnold Nguenti (du Bondy Blog, étudiant en DUT métiers multimédia à Paris) et Romain Mahdoud (récupéré à l’Humanité, étudiant à l’ESJ de Lille).
Gauchisme culturel et emplois multiples
Encore faut-il se demander combien de ces journalistes et alternants – tous sans exception issus du gauchisme culturel voire des milieux communautaristes – travaillent encore à plein temps pour le Média. Arnold Nguenti a ainsi un pied dans la restauration depuis 2016 – c’est plus rémunérateur que le journalisme et nourrit mieux son homme. Irving Magi, éphémère assistant parlementaire en 2014 du député PS Pascal Cherki, a une expérience de chargé de communication, autre métier bien plus rémunérateur que le journalisme… et qui nécessite bien moins de rigueur et d’indépendance.
Yanis Mhamdi pige pour Infomigrants, le site lancé par France Média Monde pour avoir des subventions de l’UE et non plus seulement de l’֤État français, Théophile Kouamouo a un pied en Côte d’Ivoire, le journaliste reporter d’images Romain Moriconi est associé d’un studio nommé Bankut avec le toulousain Baptiste Henry et a mis un pied l’hiver dernier dans Viceland, la TV de Vice France qui est un four complet, Virginie Cresci est toujours pigiste indépendante, Dolorès Bakèla est blogueuse (l’Afro) depuis 2015 et sur Africultures depuis 2012, Kevin Boucault-Victoire passé par l’Humanité… mais aussi le site d’information catholique Aleteia a gardé ses piges chez Vice, Polony TV et Slate, Serge Faubert, chargé de cours à l’Université catholique de l’Ouest écrit toujours pour son site Horizondurable.info, Rémi Kenzo-Pages, inquiet de la disparition du Média le 30 novembre, écrit pour le site réunionnais BioAgri, et Lisa le Texier fait des scripts à France Télévisions. Tous trouveront donc à rebondir – même Aude Lancelin qui pourrait retourner à la philosophie.
Et si le 30 on disparaissait? https://t.co/NeFx1oShxV
— Rémi-Kenzo (@RemikenzoPages) November 16, 2018
Quant à Julien Brygo, le Média n’apparaît même pas sur son CV… mais le Monde Diplomatique et CQFD, si (CQFD justement). Pas plus que sur celui de Franck Dedieu, ancien de l’Expansion, délégué général du club politique de Jean-Pierre Chevénement République moderne et professeur d’économie à l’IPAG Business School – d’ailleurs il n’a fait qu’une chronique en septembre 2018, d’après le site du Média. L’intégrer dans l’équipe semble un peu limite… ou révélateur de ce qui reste du Média : des ruines.