Face au feu nourri des critiques, le « ministère de la Vérité » créé par l’administration Biden a été suspendu le 16 mai 2022, trois semaines seulement après sa création. Nina Jankowicz, qui avait été nommée à la tête de ce Conseil de la gouvernance de la désinformation (Disinformation Governance Board), rattaché au Département de la Sécurité intérieure des États-Unis, a présenté sa démission le lendemain.
Nina Jankowicz en martyre
« Comment l’administration Biden a laissé les attaques de la droite faire dérailler ses efforts de désinformation », titrait le Washington Post le 18 mai, précisant en chapô : « La “pause ” du nouveau conseil du département de la Sécurité intérieure intervient après que sa directrice, Nina Jankowicz, eut été victime d’attaques coordonnées en ligne et alors que l’administration s’efforçait de réagir. » Un article signé de la plume de la journaliste Taylor Lorenz décrite par le site conservateur chrétien Lifenews comme « perpétuelle pleurnicheuse d’extrême gauche ».
Lorenz rappelle que : « Le 27 avril au matin, le département de la Sécurité intérieure avait annoncé la création du premier Conseil de gouvernance de la désinformation, dont l’objectif déclaré était de “coordonner la lutte contre la désinformation liée à la sécurité intérieure”. L’administration Biden avait nommé Nina Jankowicz, une figure bien connue dans le domaine de la lutte contre la désinformation et l’extrémisme, au poste de directrice exécutive du conseil. » Et de déplorer dans son papier le fait que Jankowicz est tombée victime « des forces mêmes qu’elle a consacré sa carrière à combattre » après avoir « fait l’objet des attaques les plus dures, son rôle ayant été déformé alors qu’elle devenait une cible privilégiée de l’Internet de droite. Elle a fait l’objet d’un barrage incessant de harcèlement et d’abus, tandis que les déformations incontrôlées de son travail continuent à devenir virales ».
Une habituée de la désinformation
Il faut dire qu’il y avait provocation à mettre à la tête d’une nouvelle institution que l’on pouvait légitimement soupçonner de participer d’une dérive orwelienne de l’administration fédérale américaine une personne qui s’était distinguée, entre autres choses, en soutenant la thèse complotiste de gauche selon laquelle le scandale du contenu compromettant de l’ordinateur portable de Hunter Biden, le fils de l’actuel président et ancien vice-président, était une opération de désinformation russe. Ce qui fait dire au média conservateur The New American que Nina Jankowicz est « une agente politique ayant elle-même participé à des opérations de désinformation ».
C’est pourquoi, contrairement à ce qu’ont prétendu l’intéressée et des représentants de l’administration Biden, de même que les médias libéraux qui les soutiennent, les attaques contre le nouveau Conseil de gouvernance de la désinformation ne venaient pas que d’une droite dure et/ou complotiste sur Internet et dans quelques médias, dont bien sûr la chaîne Fox News, mais plus généralement de l’opposition républicaine. Car est-ce bien au gouvernement de lutter contre ce qu’il considère ou prétend considérer comme faux ?
Un projet qui pourrait rebondir
Dès le 29 avril, l’éditorialiste et animateur de télévision Benny Johnson annonçait sur son compte Twitter : « OFFICIEL : Une “loi sur l’élimination du ministère de la Vérité” vient d’être proposée. Met fin à tous les financements du Département de la sécurité intérieure pour le Conseil de gouvernance de la désinformation et interdit tout financement de toute entité de restriction de la liberté d’expression à l’avenir. »
Un projet de loi qui pourrait vite s’avérer utile, car suspension ne veut pas dire suppression. Ainsi que l’écrivait l’hebdomadaire conservateur Washington Examiner le 25 mai sur son site :
« Les Américains auraient tort d’être rassurés en se disant que les efforts de l’administration Biden pour censurer les informations depuis le département de la Sécurité intérieure et d’ailleurs vont prendre fin. En fait, l’administration a annoncé que l’ancien secrétaire à la sécurité intérieure Michael Chertoff et l’ancien procureur général adjoint Jamie Gorelick prendraient le relais de Jankowicz et continueraient sur la voie de la désinformation. » Pourtant, s’insurge le journal, « Le gouvernement fédéral n’a pas à déterminer ce qu’est la vérité, ce n’est en rien la mission de la Sécurité intérieure, et Jankowicz avait un historique constant d’identification erronée de la “désinformation”. »
Réticences jusqu’au Washington Post
Mais les médias conservateurs ne sont pas les seuls à s’inquiéter des velléités de Joe Biden et de son administration démocrate en matière de contrôle de l’information. Même au Washington Post, il se trouve des journalistes pour s’en inquiéter, tel le très respectable éditorialiste du journal George Will, prix Pulitzer 1977, dans un éditorial du 25 mai intitulé : « Attendez-vous à un retour de l’ignoble Conseil de gouvernance de la désinformation ». « La “pause” annoncée par le département de la Sécurité intérieure concernant son Conseil de gouvernance de la désinformation, 21 jours après sa création en tant que mesure de “sécurité nationale”, est probablement elle-même de la désinformation. », met en garde l’éditorialiste du Washington Post.
En ce qui concerne le choix initial de Nina Jankowicz, même dans les colonnes du très anti-Trump Washington Post, on le reconnaît :
« Avant d’être, pendant trois semaines, à la tête de ce Conseil de la désinformation “non partisan” (c’est ce qu’a déclaré l’attaché de presse du président), Nina Jankowicz a mené une carrière haute en couleur en réprimandant “les républicains et autres désinformateurs”. Le contenu de l’ordinateur portable de Hunter Biden ? “Un produit de la campagne Trump”, a‑t-elle décrété. Ses certitudes sont nombreuses. »
Plus loin, dans son éditorial, George Will énumère les mensonges récents du président Biden lui-même, avant de conclure :
« Si – quand – la “pause” du département de la Sécurité publique prend fin et qu’un bureau de désinformation ressuscité s’attelle à la protection des Américains contre les mensonges, il ne s’occupera bien sûr que de la désinformation d’origine étrangère, la théorie étant que seule cette sorte de désinformation menace la sécurité nationale. »
Alors qu’il interrogeait le secrétaire à la Sécurité intérieure Alejandro Mayorkas au Sénat le 4 mai 2022, le sénateur républicain Rand Paul s’est inquiété : « Nous ne sommes même pas d’accord sur ce qu’est la désinformation ». Et Paul de remarquer : « Savez-vous qui est le plus grand propagateur de désinformation de l’histoire du monde ? Le gouvernement américain. »
Voir aussi : Nina Jankowicz ministre de l’information de Joe Biden et Castafiore