Le ministère de la culture a distribué plus de 200 millions d’euros d’aides à la presse en 2023. Le journal Le Monde est l’organe le plus aidé avec près de 19 millions d’euros. Le système de soutien aux titres de presse fait la part belle à quelques titres dont ceux appartenant à des milliardaires.
Première diffusion le 11 juillet 2024
L’OJIM prend ses quartiers d’été : du dimanche 28 juillet au dimanche 25 août nous republions les articles les plus significatifs du premier semestre.
Des aides diversifiées de tous côtés, 200M€ en direct
C’est « dans un objectif de transparence » que le ministère de la Culture publie chaque année depuis 2012 la liste des titres de presse ayant bénéficié d’aides directes et indirectes. Défendant sa démarche de soutien aux médias par leur contribution « essentielle à l’information des citoyens et à la diffusion des courants de pensées et d’opinions », le ministère détaille un total d’aides directes de 204,7 millions d’euros dont 22,7 au titre des six aides au pluralisme. 133 millions d’euros concernent les aides au transport et à la diffusion et 19,1 M € les aides à l’investissement en faveur de la modernisation.
Par ailleurs 30M€ ont été versés dans le cadre d’une aide exceptionnelle visant à compenser la hausse des coûts de production, essentiellement due à l’explosion du prix du papier, à laquelle la presse a dû faire face en 2023.
Et plus de 140M€ en aides indirectes
Il convient de rappeler qu’en sus des aides à la presse, les aides indirectes pèseraient 84 millions d’euros, c’est le cas notamment de la TVA à 2,1 % qui participe du soutien aux médias et coûterait à elle seule 60 millions d’euros selon Bercy.
Evoquant dans le choix des titres aidés « des critères objectifs et transparents qui sont les garants de la neutralité et de l’impartialité des décisions d’octroi », le ministère se pique de pluralisme et égraine les millions d’aides titre par titre dans un fichier téléchargeable en ligne.
Champion du Monde toute catégorie !
Cumulativement, selon La Lettre, le groupe Le Monde a bénéficié d’un total de 18,99 millions d’euros. Au côté du titre phare Le Monde, se trouvent les revues L’Obs et Télérama mais aussi Courrier International et La Vie. Vient ensuite le groupe Les Echos-Le Parisien (LVMH) avec 17,02 millions d’euros. Le groupe Ouest France complète le podium avec 14,53 millions d’euros.
En quatrième position se trouve le groupe Ebra-Crédit-Mutuel (titres de presse régional) puis Bayard Presse (La Croix) et enfin le groupe Dassault (Le Figaro).
À lui seul, le vieux journal L’Humanité perçoit la coquette somme de 6,58 millions d’euros soit plus que Libération alors même que le premier diffuse près de trois fois moins que le second.
L’inflation apparente de l’aide à la presse, elle, était de 110,4 millions en 2022 contre plus de 200 millions en 2023 ; elle doit cependant être relativisée puisqu’elle intègre désormais une subvention indirecte autrefois non comptabilisée qui représente quelques 73 millions d’euros : les aides « à l’exemplaire posté ». A cela s’ajoute une aide spéciale de 30 millions d’euros mise en place en mai 2023 pour prêter main forte au secteur dans un contexte d’explosion du coût du papier.
Les milliardaires aussi adorent les subventions !
Parmi les grands groupes médiatiques français se trouvent plusieurs grandes fortunes. Pour la première fois depuis 2022 Bernard Arnault (Les Echos, Le Parisien) perd la première place dans la course aux subventions avec « seulement » 17M€ de picaillons dans sa poche de pauvre. Auquel il faudrait rajouter un morceau de l’aide à Challenges dont il possède 40%. Si Dassault est bien placé avec Le Figaro et ses 10,6 millions d’euros de subventions, on retrouve aussi le groupe Vivendi de Vincent Bolloré, qui perçoit ainsi 6,52 millions d’euros dont 1,8 millions pour le JDD et un peu moins d’un million pour Paris Match pour l’aide exceptionnelle pour compenser le prix du papier. Le milliardaire tchèque Daniel Kretinsky a lui bénéficié d’une enveloppe de 3,81 millions pour ses médias dont 1,4 million pour le journal Marianne.
Xavier Niel (NJJ holding) se trouve à 2,85 millions au titre de sa participation dans le groupe Le Monde. La famille Pinault avec Artémis et le journal Le Point est à 2,65 millions et enfin Rodolphe Saadé via CMA CGM 2,09 millions pour La Provence et Corse-Matin.
Les aides à la presse pourraient faire l’objet d’économies dans les années à venir. En mars 2024, la Cour des comptes publiait un rapport intitulé : « Les crédits exceptionnels à la culture et aux industries créatives. Des moyens considérables, une logique de guichet, un contrôle insatisfaisant » dans lequel était épinglée l’importance de l’aide de l’Etat pour les médias.