Surprise ou plutôt pas surprise, alors que le Sénat annonce que le coût du Pass culture destiné aux jeunes a explosé — près de 30M€ en 2023 — certains font remarquer que Mediapart figure sur les bénéficiaires mais pas Valeurs actuelles, de même pour de nombreux festivals ou parcs mais pas pour le Puy du Fou.
Le Pass culture, kézako ?
Une application culturelle destinée aux jeunes de 15 à 20 ans qui comporte deux parties : l’une individuelle, l’autre collective. Par l’offre individuelle, la personne concernée peut profiter d’un crédit annuel de 300€, entre 15 et 18 ans, pour accéder librement à n’importe laquelle des propositions déposées sur l’application par les structures culturelles. Propositions gratuites ou payantes. La partie collective est proposée aux collèges et aux lycées pour les élèves de la 6e à la terminale. Elle est gérée par les enseignants. Son but est de financer des activités liées à l’éducation artistique et culturelle dans un cadre scolaire. D’après le ministère de la culture, et malgré de récurrentes critiques, principalement liées à son coût, le Pass culture serait un succès indéniable : 84 % des jeunes de 18 à 20 ans seraient inscrits, il y aurait des millions d’offres, plus de 35 000 partenaires proposant des offres (les plus utilisées par les jeunes étant le cinéma, la librairie et la musique) et l’application aurait donné lieu à plus de 30 millions de réservations depuis son lancement en 2019. Quoi qu’il en soit de ces affirmations du site de l’application, présentant le Pass culture comme un véritable succès, la ministre de la culture Rachida Dati a indiqué qu’elle ferait procéder à une évaluation. Les demandes en ce sens viennent souvent de médias conservateurs ou libéraux-conservateurs. Ainsi, le 23 janvier 2025, l’hebdomadaire Valeurs Actuelles s’interrogeait sur la pertinence de la présence du festival Longueur d’ondes (Brest) dans l’offre Pass culture, étant donné que ce festival s’affirme ouvertement en lutte contre les médias du groupe Bolloré et organise des ateliers afin de les combattre.
Le Pass culture est-il un outil de propagande de gauche ?
La réponse est en partie dans la question puisque l’essentiel de l’offre culturelle est, en France, dominée par cette même culture de gauche. Il est par exemple impossible de trouver les ouvrages, pourtant très populaires, de personnalités telles qu’Eric Zemmour, Philippe de Villiers, Jordan Bardella ou même parfois Boualem Sansal, un comble concernant ce dernier, dans nombre de librairies indépendantes. Il en va de même du récent livre de Julien Dray consacré à Jean-Luc Mélenchon. Le motif avoué par les libraires ? Ne pas faire de publicité pour des ouvrages qu’ils considèrent comme étant d’extrême-droite. Cependant, rien n’empêche le potentiel lecteur de commander ces livres dans les mêmes librairies… C’est un fait : la librairie est, en France, de gauche. Or, l’achat de livres est l’un des deux principaux actes des bénéficiaires du Pass culture. Ces jeunes bénéficiaires l’utilisent surtout au cinéma et en librairie. Ils ont évidemment accès à nombre d’autres « produits » dits culturels, dont certains médias.
Le Pass culture promeut-il des médias de gauche en particulier ?
Depuis longtemps les médias sont dominés par l’idéologie libérale libertaire de gauche. Une brèche s’est ouverte depuis peu vers une plus grande diversité d’appréhension de l’actualité. Cela apparaît-il dans l’offre du Pass culture ? Pas vraiment, selon l’association Parents Vigilants, dont l’information diffusée sur les réseaux sociaux le 16 janvier 2025, a été en premier lieu reprise par le média Frontières dès le 17 janvier 2025. Ce dernier média rappelait aussi que, malgré son immense succès populaire, Le Puy du Fou n’est pas disponible dans l’offre de l’application Pass culture. Frontières, et donc Parents Vigilants, signalaient que l’on trouve sur l’application des offres très avantageuses pour des abonnements à Libération, Le Monde et Médiapart. Notons qu’il y a aussi, par exemple, des offres pour Télérama ou Le 1hebdo.
Et en-dehors de l’élimination du Puy du Fou ?
Le 22 janvier 2025, le quotidien Libération a publié une « checknews » concernant cette information. La tentative de démontrer la possible fausseté de l’information diffusée par Parents Vigilants et Frontières s’est avérée délicate. En premier lieu, Libération tente de noyer les médias signalés dans une masse d’autres « médias » mélangeant des podcasts, Le Télégramme, Arte, Radio France, Franceinfo, So Foot, Le Journal du centre, Vocable, Cosinus… Outre que les radios indiquées sont clairement de gauche, les autres « médias » envisagés sont sans commune mesure avec ceux remarqués par Parents Vigilants et Frontières.
Libération reconnaît par ailleurs que l’essentiel de l’offre médiatique est de gauche. Le quotidien se refuse pourtant à y voir une « censure ». Pourquoi ? « Car concrètement, il revient aux médias d’effectuer une demande pour figurer dans le catalogue du Pass culture. » D’après Libération, Le Figaro aurait été sollicité en 2019… Les Échos aussi, mais le journal économique est un cas spécifique en l’espèce. Ainsi, le seul média de droite à avoir été envisagé, et plus précisément de droite très libérale, puisque Libération ne réfère à aucun média conservateur. Cela pourra sembler maigre comme esprit d’ouverture.
La « checknews » de Libération visant à contrecarrer l’information diffusée par Parents Vigilants et reprise par Frontières n’est pas convaincante. Tant en ce qui concerne les médias que le reste des offres culturelles présentes sur le Pass culture, l’essentiel appartient à la culture de gauche dans un pays où la pensée de droite ou conservatrice a le vent en poupe. La question n’est pas de savoir si l’application censure ou non. Elle est simplement de savoir à quoi ont concrètement accès les jeunes de 13 à 20 ans par le biais d’une application fortement financée par l’argent public.