François Rebsamen, le nouveau ministre du Travail, se serait bien passé de ce petit article de la Bourgogne Républicaine daté du 9 août 1945 qui vient d’être exhumé par le site Enquête & Débat. On y voit en effet son père photographié en tenue d‘officier allemand ! Gênant pour quelqu’un qui a toujours affirmé que son père avait fui le nazisme…
Il a toujours qualifié « cela » de rumeur. Cela ? Un père collabo… Et en effet des rumeurs, il y en a eu dans l’après-guerre. En avril 2001, à peine élu à la mairie de Dijon, François Rebsamen, nommé il y a quelques jours ministre du Travail, de l’Emploi et du Dialogue social dans le nouveau gouvernement Valls, accordait une interview à L’Express que l’on aurait presque pu qualifier d’« interview vérité ». Rebsamen y confessait en effet son appartenance passée à la Ligue communiste révolutionnaire et celle, présente, à la franc-maçonnerie. Sauf qu’à la question : « Votre père a‑t-il été collaborateur ? », il répondait ceci : « Non, c’est une rumeur que fait courir la droite à Dijon depuis que j’y suis candidat. Il se trouve que mon père est originaire d’Alsace, de la région de Mulhouse-Bâle, précisément. Pendant la seconde guerre mondiale, mon père, pour ne pas être enrôlé dans l’armée allemande, a choisi de prendre la nationalité suisse. C’est tout ».
C’est vraiment tout ? Hum hum. Selon le site Enquête & Débat, ce n’est pas exactement pour fuir l’enrôlement forcé que Rebsamen père aurait fui en Suisse mais plutôt… pour échapper à un avis de recherche pour fait de collaboration ! Et la droite dijonnaise n’y est pour rien…
Le premier à avoir soulevé le lièvre est Yves Bertrand, directeur des renseignements généraux de 1992 à 2004, disparu en juin 2013. Dans ses « carnets » qui ont fait trembler la République, publiés en partie par la presse et saisis en partie par la justice, il notait en effet ceci : « Père Rebsamen serait un ex-agent de la Gestapo d’origine russe. Un Rebsamen russe s’installe à Dijon en 39 ‑photo de lui en uniforme d’officier gestapo (…) »
Or, la photo existe en effet, elle a été publiée quelques jours après la Libération dans la Bourgogne Républicaine (ancêtre du Bien public) daté du 9 août 1945 en accompagnement d’un appel à témoin aujourd’hui exhumé par le site Enquête et Débat. En cette période d’épuration, les résistants utilisaient en effet les journaux pour lancer des avis de recherche visant les collabos, dont Éric Rebsamen.
Voici le texte de l’article : « Eric Rebsamen est né à Stuttgart le 9 janvier 1917 mais il est de nationalité suisse. Inculpé d’atteinte à la sécurité extérieure de l’État, il est actuellement en fuite. Arrivé à Dijon en novembre 1939, il a été interprète et chef d’atelier au garage Renault jusqu’en novembre 1943, date à laquelle il part pour Paris. Il aurait rejoint la Suisse. Le voici photographié en tenue d’officier allemand. Tous renseignements utiles sur son activité au cours de l’occupation peuvent être adressés à M. Geoffroy de la Mothe, juge d’instruction. Cour de Justice, cabinet n°5, Dijon »
Comme le souligne le site « Enquête et débat », la description de ce Eric Rebsamen correspond bien à celle du père de François Rebsamen telle que proposée par exemple par la fiche Wikipédia du ministre du Travail qui est déclaré fils de « Erich Gottfried Rebsamen, né à Stuttgart le 9 janvier 1917 et décédé à Dijon le 19 février 1974 ». Le doute n’est donc plus possible.
Certes, personne n’est responsable des agissements de ses parents. Mais personne n’est non plus obligé de mentir pour servir ses intérêts et sa carrière politique.
Crédit photo : Parti socialiste via Flickr (cc)