Les programmes économiques des principaux candidats aux élections législatives sont scrutés à la loupe, malgré le temps réduit pour une enquête convenable. Les médias sont unanimes : celui du Rassemblement national est inepte. Pour ce qui est du Nouveau Front populaire, cela se discute.
Première diffusion le 22 juin 2024
L’OJIM prend ses quartiers d’été : du dimanche 28 juillet au dimanche 25 août nous republions les articles les plus significatifs du premier semestre.
Le Rassemblement national, du flou et l’absence de programme précis
Au Nouvel Obs, on dépeint un Rassemblement national « conscient de sa fragilité en matière économique » qui entretient un « grand flou ». Pour La Croix, « le Rassemblement national fait face à un enjeu de taille : prouver sa crédibilité au niveau économique. » Il est vrai qu’en fait de programme, le Rassemblement national présente plutôt des idées, et Libération regrette que « plutôt que de présenter un projet et un chiffrage avec un cadrage macro-économique comme en 2022, le RN choisit, à longueur d’interviews, d’égrener phrases chocs, mesures parcellaires et changements de pied. » Une analyse partagée par Alternatives Économiques, qui précise que « Le RN entretient volontairement le flou sur les questions économiques » parce que « son programme est incohérent, dangereux et peu crédible. »
Au Rassemblement national, les quelques mesures connues estimées trop chères
Le peu d’informations dont ils disposent permet néanmoins aux médias d’appeler les électeurs à un autre choix que celui du Rassemblement national. Ainsi, pour le Nouvel Obs, les mesures connues sont « ruineuses pour l’État », quand Alternatives Économiques titre « Pourquoi le programme économique du Rassemblement national ne tient pas la route. » Libération dénonce un « grand n’importe quoi », avec des « approximations, grosses ficelles et revirements », affirmant que le programme économique du RN donne « des sueurs froides à l’administration de Bercy. » Apparemment, pour Libé, cette administration n’a par ailleurs aucun intérêt politique.
Challenges, grâce aux analyses d’Allianz Research, use de chiffres et de pourcentage pour affoler les électeurs, affirmant que « l’arrivée à Matignon du candidat du Rassemblement national ferait plonger les comptes publics. » Diminution de la croissance déjà réduite à la portion congrue, augmentation d’une dette qui n’en a décidément pas besoin, le tableau est sombre. D’autant que, Challenges le souligne par un intertitre « Le projet du RN est déficitaire. » Un projet budgétaire déficitaire, on n’a jamais vu ça en France. Pour appuyer le danger que représente le Rassemblement national, Challenges a par ailleurs publié la mise en garde de dix économistes qui jugent son programme « irréaliste, inefficace et fallacieux. »
Les conséquences financières d’une majorité absolue du Rassemblement national
La dette de la France a largement dépassé les 3 000 milliards d’euros, et elle est largement détenue par des puissances étrangères. Comme le budget est par ailleurs déficitaire, la France a régulièrement besoin d’emprunter à nouveau. Dans ces conditions, elle a tout intérêt à ce que les taux n’augmentent pas. Or, pour cela, elle doit montrer un certain sérieux budgétaire, pour que les investisseurs aient confiance dans la capacité de la France à les rembourser. En cas de victoire du Rassemblement national, cette confiance semble moins que garantie. Ainsi, le cabinet Allianz, dont les conclusions sont reprises par Challenges, note que les taux pourraient être supérieurs à 3%. Seul espoir : « l’arrivée d’un gouvernement technocratique après le renversement de Bardella à l’Assemblée nationale suite à une motion de censure. »
Le Nouveau Front populaire bénéficie d’une certaine indulgence dans les médias de gauche
Le programme économique de la gauche bénéficie, lui, d’une certaine tolérance. Le Monde s’offusque ainsi le 15 juin que « alors même que les mesures présentées vendredi 14 juin ne sont pas chiffrées, le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, les fustige, tandis que le patronat fait part de ses inquiétudes. » Autrement dit, bien que l’on connaisse par cœur les objectifs des partis de gauche, il faut leur laisser le bénéfice du doute. Le Monde fustige ainsi le fait que l’exécutif « renvoie dos à dos l’extrême droite et l’extrême gauche. » Si le journal reconnaît que le programme « comporte de fait plusieurs mesures susceptibles de faire frémir les budgétaires de son ministère, dans un contexte de dégradation des comptes et de tensions sur les marchés » il précise que certaines mesures sont « peu populaires à Bercy, et plus généralement dans le monde économique, non pas du fait de leur coût mais parce que vues comme néfastes pour l’économie. » Il n’existe donc qu’un sentiment de danger pour l’économie. Citons le SMIC à 1 600 euros, dont seulement « une partie des économistes » craint les nuisances pour l’emploi.
Après le quoiqu’il en coûte, le gouvernement se pose en parangon de la raison
En réalité, après avoir usé du « quoiqu’il en coûte » lors de la crise sanitaire, puis lors de la guerre en Ukraine, le gouvernement tente de faire des économies. Naturellement, cela ne plaît guère au Français moyen. Les partis d’opposition ont alors beau jeu de promettre le maintien des aides, et il est tout aussi facile pour le gouvernement d’expliquer que ces aides sont intenables. Le Point explique ainsi que « la majorité sortante a répété comme un mantra son objectif de réduction du déficit à 3 % à la fin du quinquennat, seul moyen de rassurer les marchés et nos partenaires européens. » Des marchés qui doivent justement être rassurés à cause d’une gestion des comptes publics plus que moyenne pendant les sept dernières années. Pour Le Point, les programmes du RN et du NFP sont « une accumulation de solutions d’apparence de bon sens aux problèmes économiques. Mais derrière nombre de ces mesures apparemment logiques et efficaces se cachent des effets négatifs, ou un écran de fumée. »
Comme le quoiqu’il en coûte macronien en somme, mais celui-ci est fini et on se garde de le rappeler aux mémoires, mais l’heure est au souci de sauver l’extrême-centre, « quoiqu’il en coûte ».
Voir aussi : Front populaire : qui croit à l’alliance de la gauche ? Un peu les médias !