Le 22 novembre 2023, La Croix publiait le 37ème baromètre de la confiance des Français envers les médias, réalisé par l’institut de sondage Kantar Public. Comme le plus souvent avec ce genre d’études, ce baromètre confirme la défiance des Français vis-à-vis des médias et des journalistes.
Télévision toujours là
Ce baromètre nous en apprend plus sur la manière dont les Français s’informent. Ainsi, contrairement à une idée reçue, la télévision reste encore la source d’information privilégiée, que cela soit par le biais des chaînes d’information continue ou par les journaux télévisés. La petite lucarne est utilisée au moins une fois par jour pour s’informer par 69% des sondés, un score en baisse de deux points, tandis que la seconde source d’information, Internet, est en hausse de dix points et atteint 62%. Des chiffres parlants, qui montrent bien le rôle croissant d’Internet qui ne parvient pas, pour l’instant, à devenir un gage de confiance aussi grand que la télévision.
Presse papier en berne
Ce baromètre confirme également, s’il en était besoin, l’effondrement de la presse papier. Seuls 58% des sondés utilisent la presse quotidienne régionale pour s’informer, un score en baisse de sept points, un chiffre qui descend à 19% lorsqu’il s’agit d’une utilisation quotidienne. Un score plus bas encore pour la presse nationale papier, utilisée par seulement 50% des sondés, une baisse de sept points ; et seuls 14% ont une utilisation quotidienne de cette presse papier.
Médias, défiance et méfiance
Outre la manière de s’informer, ce baromètre nous en dit davantage sur le rejet et la défiance des sondés vis-à-vis des médias. En tout, 51% des sondés admettent ressentir de la fatigue vis-à-vis de l’information. Parmi les trois raisons principales de cette fatigue, le baromètre relève : la redondance des sujets (48%, une hausse de trois points), un sentiment d’angoisse face à l’actualité (38%, une hausse de trois points), enfin, un manque de confiance dans ce que disent les médias (27%, une hausse de cinq points).
Le manque de confiance est étayé dans ce baromètre. Ainsi, 57% des sondés – une hausse de trois points – déclarent qu’il faut se méfier des médias lorsqu’il s’agit des grands sujets d’actualité. S’agissant de la confiance, les sources qui notent la plus grande augmentation de leur côte de confiance sont la presse régionale – 64%, une hausse de cinq points – et les proches – 71%, une hausse de trois points –. La baisse de confiance la plus significative est subie par les réseaux sociaux. Sur ce sujet de la confiance, l’indépendance des journalistes est également interrogée. Globalement, 55% des sondés pensent que les journalistes ne sont indépendants ni des politiques et du gouvernement, ni des pressions de l’argent. Seuls 25% pensent qu’ils sont indépendants. Des chiffres qui rejoignent la tendance observée ces dix dernières années.
Pourtant, pour 75% d’entre eux, les sondés admettent avoir un intérêt pour l’actualité. Notons-le donc, il ne s’agit pas d’un discrédit de l’information en elle-même mais bien de son traitement par des journalistes considérés comme des perroquets.
Trop de Nahel et d’Ukraine
Le traitement de l’information des événements majeurs de 2023 est interrogé par ce baromètre. Un sondé sur deux juge que les émeutes suite à la mort de Nahel ont trop occupé l’actualité. Vient ensuite la guerre en Ukraine, jugée trop présente pour 41% des sondés (plus trois points). Parmi les sujets jugés pas assez présents, nous avons les débats sur la fin de vie, considérés comme trop peu présents dans les médias par 53% des sondés (plus un point). Vient ensuite les difficultés dans le service public, sujet jugé absent par 55% des sondés. Enfin, viennent les violences faites aux femmes, jugées peu présentes par 47% des sondés.
Un zoom est fait sur le traitement des questions environnementales. Il en ressort que 67% des sondés estiment que les médias n’appuient pas assez sur les raisons d’espérer, et pour 60% des sondés les médias n’évoquent pas assez les conséquences économiques et sociales de ce changement climatique. Enfin, 54% estiment que les médias n’évoquent pas assez les sujets connexes du changement climatique.
Fracture de génération sur les réseaux sociaux
Le point le plus intéressant porte sur les réseaux sociaux. Il met en avant une fracture générationnelle très nette. Lorsqu’il s’agit de demander plus de régulation concernant la diffusion d’informations sur les réseaux sociaux, 65% des 50–64 ans et 72% des plus de 65 ans répondent par l’affirmative. Parallèlement, 58% des 18–34 ans jugent qu’il faut moins de régulation. Un fossé intéressant, qui peut s’expliquer par la pratique des réseaux. Les réseaux sont souvent présentés comme étant des mines de fake-news – ce qu’ils sont dans une certaine mesure, admettons-le – par les médias plus classiques que consomment davantage les plus de 50 ans. Dès lors, ils en ont une idée faussée, tandis que les jeunes, usagers de ces réseaux sont davantage conscients de la censure qui peut peser sur certains réseaux.
Si l’on corrèle la demande de régulation au bord politique, les tendances sont assez similaires, la majorité des sympathisants politique veulent, globalement, plus de régulation, avec un score très élevé parmi les sympathisants du Parti Socialiste (69%), suivi des Républicains (67%) et enfin de Renaissance (63%). L’un des rares partis dont les sympathisants interrogés veulent majoritairement moins de régulation sont ceux de La France Insoumise (54% à vouloir moins de régulation).
Globalement, 59% des sondés veulent un plus grand contrôle sur les informations circulant sur les réseaux sociaux.
L’intelligence artificielle questionnée
Le sujet de l’intelligence artificielle est traité. Pour résumer, les sondés ne font pas confiance à cette technologie et souhaitent, à une large majorité, être prévenue lorsque celle-ci est employée dans le cadre de l’information. Enfin, la dernière question porte sur les états généraux du journalisme organisés à l’initiative du gouvernement. Pour 57% des sondés, ils sont utiles.
Si nous devions résumer ce baromètre, disons qu’il confirme les tendances que beaucoup – dont l’OJIM – observent depuis quelques temps. Une défiance croissante envers les médias de grand chemin, une lente progression de la place de l’information en ligne, que cela soit par les réseaux sociaux ou les sites d’informations, et la volonté de beaucoup de Français de voir un changement dans le traitement de l’information. Notons-le, beaucoup de gens sont conscients du traitement calamiteux de l’actualité par nos médias. Une situation encore confirmée par l’assassinat de Thomas à Crépol ou les manifestations patriotes en Espagne.
Voir aussi : Enquête confiance dans les médias Kantar/La Croix : toujours moins !