Les informations commencent juste à filtrer sur la manière dont les géants du numérique, autrement dit la quinzaine d’acteurs majeurs du web, préparent les élections présidentielles de 2020 aux Etats-Unis. Acteurs devenus incontournables des médias modernes, souvent plus importants que nombre de médias traditionnels, qu’ont-ils décidé ?
Concertation au sommet
Le 5 septembre 2019, les responsables de la cybersécurité de Facebook, Microsoft, Google, Twitter mais aussi les plus prestigieuses universités américaines et des représentants des principales agences de renseignement du pays se sont réunis « pour garantir l’intégrité des élections » et « mettre en place des stratégies pour en garantir la sécurité ». Pour le responsable de la cybersécurité de Facebook les débats principaux concernaient « la coordination à mener entre l’industrie et le gouvernement pour détecter et réduire les menaces ».
Plusieurs remarques viennent immédiatement à l’esprit :
- La puissance concentrée de ces acteurs médiatiques, impressionnante, est plus à même d’effrayer l’électeur lambda que de le rassurer.
- Un doute surgit, au vu des expériences récentes (obsession de complots non prouvés contre les candidats préférés du système, pour soutenir des candidats devenus par contre coup candidats « officiels », à commencer par une Hillary Clinton dont personne ne sait si elle aurait ou non choisi Jeffrey Epstein comme secrétaire d’Etat à la petite enfance) : ne s’agirait-il pas plutôt d’orienter les élections dans le bon sens ? Celui voulu par les idéologues des grandes métropoles des côtes Est et Ouest du pays ? Les médias officiels étaient ainsi à 98 % violemment anti Trump en 2016.
- Une cybersécurité reliant multinationales ultra puissantes, services secrets et milieux intellectuels (« liberals », autrement dit de centre gauche au sens français du mot), cela ne sent-il pas bon (ou plutôt mauvais) son 1984 ?
Que veulent faire toutes ces bonnes âmes éprises de démocratie à 14 mois de la tenue de l’élection sans doute la plus importante de la planète :
- Repousser les attaques de pirates (les supposés méchants russes, sachant qu’il ne viendrait jamais aux États-Unis l’idée de, par exemple développer un système d’écoute des conversations à l’échelle mondiale, y compris celles des présidents de ses pays alliés…) ;
- Surveiller la « propagande » sur les réseaux sociaux (faux comptes Twitter par exemple) ;
- Lutter contre les deepfakes, trucages vidéos plus vrais que nature qui permettent de mettre en scène une personne dans n’importe quelle position et, pire encore, d’intégrer sa voix. La lutte contre les deepfakes (qui n’existeraient pas sans les GAFA — le principe est le même que celui des virus informatiques, nés au sein d’un univers qui peut finalement produire ses propres outils de lutte ‑payants- contre ce qu’il a contribué à fabriquer) s’organise par le biais d’un concours doté de 10 millions de dollars de prix, destinés aux chercheurs, supervisé par le consortium Partnership on AI. Ce dernier est une vaste entreprise de collaboration dont la vocation est de développer au maximum l’utilisation de l’Intelligence Artificielle dans l’avenir proche, dans le but de… « défendre les droits de l’homme ». Les membres fondateurs de ce consortium sont Amazon, Facebook, Google, Deepmind, Microsoft, IBM et Apple. Qui n’est pas rassuré ? Le principal concurrent de cet ensemble est l’OpenAI d’Elon Musk…
- La lutte contre ces deepfakes va conduire à générer… le plus de deepfakes possibles, des millions, de façon à « entraîner les algorithmes de détection ». La tête à l’envers, en somme, comme tout ce qui concerne l’IA, laquelle apprend par elle-même. Bien sûr, Facebook a tenu à préciser qu’« aucune donnée d’utilisateur ne sera utilisée ». Chacun est encore plus rassuré, c’est certain.
GAFA maîtres du monde ?
Les GAFA font donc maintenant partie intégrante du jeu des élections eu sein de la démocratie représentative et libérale et cela semble globalement « normal », les principaux médias n’en parlant pas, jouant même plutôt le jeu voulu par les multinationales. Richard Salgado, l’un des principaux dirigeants de Google, précise cependant que la technologie des GAFA ne sera pas la seule solution permettant à elle-seule de garantir l’intégrité des élections….
De toutes les façons, les élections américaines ne sont pas à observer avec des yeux français : outre- Atlantique, tous les coups sont permis, y compris les coups de millions de dollars et de mensonges éhontés, en formes d’interrogation, balancés par des spots publicitaires.
Ce qui est réellement surprenant, c’est plutôt que la démocratie libérale ait besoin de s’interroger sur le trucage de ses propres élections par des procédés technologiques qui lui sont inhérents, ceux du « Progrès » sans pensée ni limites.