Certains se souviennent de l’excellent film (1974) de Marco Ferreri, Touche pas à la femme blanche, avec Mastroianni, Piccoli, Deneuve, Toggnazi et Noiret, un retour grotesque sur la défaite du général Custer par les Sioux à Little Big Horn en 1876. Une farce tournée dans le trou des Halles de l’époque. Pour les convalescents Inrocks, c’est Black is black, pas la version chantée de Los Bravos en 1966 (dans un tout autre contexte) et reprise par Johnny Halliday non, c’est une injonction diversitaire devenue classique.
Inrocks l’été sexe et sombre
Pour relancer Les Inrocks passés d’hebdomadaire à mensuel et même à bimestriel pour le numéro d’été juillet-août 2021, quoi de mieux qu’un marronnier devait se demander le banquier Matthieu Pigasse. Le marronnier, soit la scie médiatique resservie comme une soupe froide quand on ne sait pas quoi dire : le marché de l’immobilier, la rentrée des classes, les francs-maçons et en été le sexe sur fond de sable chaud, de plages (avec masques) et de fantaisies LGBTQ+ (avec ou sans masques).
Le marronnier d’été des Inrocks annonce la couleur en couverture, Sexe 2021. Et même deux fois avec une blanche de dos (elle a des arguments) pâmée dans les bras d’un solide africain (la partie la plus enviable de son anatomie est cachée). Une image performative comme celles que l’on voir s’étaler partout sur les publicités : une sympathique blanche dans le giron d’un non moins sympathique noir. Devinette estivale, qui remplace qui ? Derrière cette accroche incitative le contenu est varié avec Annie Ernaux (degré dix en-dessous de zéro de l’écriture, mais premier prix de censure), le gentil conformiste Augustin Trapenard admirateur de Youssoupha, l’incontournable Metoo. Vous pourrez vous initier au chemsex (sexe+drogues) pour les homosexuels, ou pour les autres au cul imbibé d’alcool ou sans alcool (c’est une image).
Tout n’est pas nul, les photos du Thaïlandais Tada – si elles ne valent pas celle du japonais Haraki – ont un côté amusant et dans un autre article la pratique de l’étranglement amoureux rappellera aux cinéphiles le film L’Empire des sens d’Oshima. Mais il vous faudra supporter du trash (qui fait vendre, voir les publicités de Dior ou d’Yves Saint-Laurent), comme une pseudo-enquête sur les gourous sexologues de Los Angeles, soi-disant pour les dénoncer, en réalité empreinte de complaisance ou des photos prises d’un vagin. Croyant et pratiquant d’une autre chapelle, nous passons sous silence les photos d’icônes gays et un dossier sur les jeunes dominatrices. On devine que l’ambiance de la rédaction doit être néo-féministe en diable et que le rédacteur mâle de trente ans y est du genre soumis.
Un peu de publicité ?
Non, beaucoup de publicité ! Si le numéro promet cent pages de volupté, il est enrichi — dans tous les sens du terme — de 50 pages de publicité, comme quoi le capital se trouve à l’aise dans le porno commercial, estival et libéral libertaire. Vingt-neuf pages dans le secteur cinéma/théâtre/musique. Quatre pages (Back Market, Apple) dans la technologie, quatre dans l’alimentaire, deux d’auto-publicité, une de Total (?), une du Seuil avec Édouard Louis qui doit représenter une sorte de modèle masculin de la rédaction, Pinault, Cartier, la Fnac, le ministère de la culture, on n’oubliera pas Libération ni le département des Alpes-Maritimes de Christian Estrosi.
PS : Nous n’avions pas remarqué le dossier de la « jeune photographe autodidacte Camille Mompach » sur quatre pages. La jeune Camille – sans doute admiratrice de Soulages – n’a pas peur de la couleur sombre, ni du nu. Comme le disait Ford en parlant de la fameuse Ford T, chacun peut choisir la couleur de sa voiture, pourvu qu’elle soit noire.