Le moins que l’on puisse dire, c’est que la semaine passée n’aura pas été la meilleure de l’année pour les journalistes. En l’espace de quelques jours, trois d’entre eux ont été plus ou moins expulsés des endroits qu’ils étaient venus couvrir.
Leïla de Comarmond tout d’abord. Journaliste aux Échos, celle-ci était venue assister, jeudi 4 septembre, à une conférence de presse organisée par la CGT. Alors qu’elle s’était présentée à l’entrée du siège de l’organisation syndicale, elle s’est vue refuser l’accès.
« Nous n’avons jamais vu cela », s’est plaint Nicolas Barré, directeur de la rédaction des Échos. « Une feuille avec son nom et sa photo avait été affichée à destination du personnel chargé de l’accueil pour être sûr de la reconnaître et ne pas la laisser entrer. Ce sont des méthodes inadmissibles », a‑t-il ajouté.
Finalement, grâce à l’instance de l’Ugict-CGT, la journaliste a pu tout de même accéder à la salle. Mais pour l’Association des journalistes de l’information sociale (Ajis), « le principe même d’empêcher l’accès d’un journaliste à une conférence de presse ou à des locaux alors qu’il y a été invité représente un précédent inquiétant ». L’association s’est par ailleurs dite « indignée par de telles méthodes ».
Samedi après-midi, une journaliste de Mediapart a vécu la même aventure. Présente à Fréjus pour couvrir l’Université d’été du Front national de la jeunesse (FNJ), Marine Turchi en a été éjectée dès l’après-midi. « Je me suis fait éjecter au retour de la pause déjeuner. Le service de presse ’’a reçu des consignes en début d’après-midi de la direction’’. Ils m’ont sortie en me demandant de rendre mon autocollant presse, ils m’ont suivie pour le reprendre jusque sur la route », a‑t-elle déclaré à l’AFP.
Pour le patron du FNJ, Julien Rochedy, « il y a eu un petit problème de coordination et d’organisation ». Ce dernier a expliqué à l’AFP que Marine Turchi, bien connue pour son hostilité à peine dissimulée à la droite et à l’« extrême-droite », n’était même pas censée entrer sur les lieux dès le matin car « Mediapart ne rentre pas dans les manifs du Front depuis très longtemps, depuis que Mediapart a boycotté le FN à la présidentielle ».
Celui-ci a par ailleurs confirmé que des consignes avaient été données par la direction du FNJ. Suite à cet épisode, de plus en plus courant, d’autres journalistes (AFP, Le Monde, Le Canard Enchaîné, L’Opinion, L’Humanité, RFI) ont quitté les lieux en signe de désapprobation.
Autre manifestation, autre incident. Ce dimanche 7 septembre, après une heure de couverture de la manifestation « Mistral Gagnons » (pour s’opposer à la suspension de la livraison d’un navire Mistral à la Russie), les équipes du « Petit Journal » de Canal+ ont été obligées de quitter les lieux devant l’hostilité des manifestants.
« On va y aller, je pense », a déclaré un envoyé de Yann Barthès devant la colère de ses interlocuteurs, qui l’ont qualifié de « pseudo journaliste ». Lorsque l’équipe s’est décidée à tourner les talons, un manifestant s’exclame : « Le Petit Journal porte bien son nom. »
La scène a été filmée par l’Agence Info Libre, un petit média indépendant sur internet qui se veut incarner cette nouvelle presse en qui les gens peuvent retrouver confiance.
Voir notre portrait de Marine Turchi ainsi que notre infographie de Mediapart
Crédit photo : capture d’écran vidéo Agence Info Libre (DR)