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Les plateformes streaming déjà ringardisées ?

28 octobre 2022

Temps de lecture : 4 minutes
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Les plateformes streaming déjà ringardisées ?

Temps de lecture : 4 minutes

Dans un environnement médiatique et culturel en renouvellement permanent, les plateformes de streaming se sont taillées une belle part du gâteau en quelques années. Un succès qui pourrait s’effriter à la faveur de l’éclatement des pratiques en matière de consommation numérique.

Le succès du McDonald de l’audio-visuel

Depuis plusieurs années, les plate­formes de stream­ing (vidéo à la demande) ont pris une place cen­trale dans le paysage cul­turel numérique. A tra­vers des séries mais aus­si des doc­u­men­taires et la dif­fu­sion d’évènements sportifs et cul­turels, Net­flix, Dis­ney+ ou encore Ama­zon Prime sont devenus incontournables.

L’ascension ful­gu­rante et le décor qui entoure le géant améri­cain Net­flix a été résumé dans une brochure de l’OJIM : L’empire Net­flix, l’emprise du diver­tisse­ment. Pro­longe­ment de l’esprit de la télévi­sion qui con­siste à choisir le pro­gramme que l’on veut quand l’on veut, le con­cept a rapi­de­ment trou­vé un écho dans un société avide de zap­per en per­ma­nence. Alliant les lubies « wokes » au man­age­ment libéral, le phénomène Net­flix a con­nu un pre­mier à‑coup dans son développe­ment. Les expli­ca­tions à ce coup d’arrêt sont nom­breuses : effet pla­fond, con­cur­rence, las­si­tude… Une cause sem­ble cepen­dant avoir été nég­ligée : l’attrait des 15–24 ans pour des con­tenus plus courts.

Toujours plus courts, toujours plus simples

Ce seg­ment d’âge aban­don­nerait ain­si ces ser­vices vidéo par abon­nement. Le baromètre SVoD Médi­amétrie / Har­ris Inter­ac­tive estime ain­si qu’au troisième trimestre 2022, les plate­formes ont per­du 400 000 abon­nés dans cette tranche d’âge par rap­port à l’exercice précé­dent et 800 000 de moins qu’en 2020. Par­al­lèle­ment le nom­bre de con­som­ma­teurs des plate­formes de plus de 50 ans a pro­gressé de 52 % entre 2020 et 2022. Cette tranche d’âge étant très dense en Occi­dent, elle pour­rait à moyen terme être l’assurance vie de ces plate­formes. Une ten­dance qu’évoquait Le Figaro en août 2022 avec « l’infidélité » de la clien­tèle des plate­formes. Le phénomène n’est pas vrai­ment éton­nant, à con­sid­ér­er que ces plate­formes font l’apologie de mœurs libérale et prône une société du choix per­ma­nent et de la libre concurrence.

Si les plate­formes n’ont plus la cote chez la « généra­tion Z », en revanche Youtube (ici dans sa ver­sion Shorts) et Tik­Tok font un tabac. Au Roy­aume-Uni, les jeunes passeraient aujourd’hui plus de temps sur le réseau social chi­nois que devant la télévi­sion, on par­le de 57 min­utes quo­ti­di­ennes.

Les for­mats pro­posés ont pour par­tic­u­lar­ité d’être très courts et d’éviter toute forme de stim­u­la­tion intel­lectuelle tout en per­me­t­tant l’insertion furtive de con­tenue pub­lic­i­taire. Un for­mat bref que tente de s’accaparer la con­cur­rence, notam­ment Snapchat avec Spot­light, Youtube a lancé Shorts et Insta­gram a de son côté expéri­men­té Reels. Une lame de fond qu’il sera dif­fi­cile de con­tr­er ; la force des con­tenus courts est d’être créés par ceux-là même qui les con­som­ment et deman­dent donc un investisse­ment min­i­mum en com­para­i­son à celui des séries et autres droits de dif­fu­sion. Si les méfaits de la télévi­sion con­som­mée en grande quan­tité sont con­nus, ceux des appli­ca­tions de con­tenus instan­ta­nés com­men­cent à faire l’objet d’étude… Et évidem­ment de récupéra­tion com­mer­ciale sur fond d’industrie de la san­té.

La fracture numérique verticale et horizontale

A défaut d’éliminer les plate­formes de stream­ing, les appli­ca­tions, appuyées sur des for­mats d’échanges très courts, diver­si­fient les canaux de dif­fu­sion cul­turels et médi­a­tiques. Elles par­ticipent du remod­e­lage du marché numérique. On par­le d’ordinaire de frac­ture numérique en évo­quant les pop­u­la­tions qui n’auraient pas accès à inter­net faute de com­pé­tence tech­nique, d’appétence pour l’outil mais aus­si par inca­pac­ité d’accès pour des raisons géo­graphiques et finan­cières. Cette frac­ture que l’on qual­i­fiera de ver­ti­cale, sem­ble aujourd’hui se dou­bler d’une frac­ture hor­i­zon­tale. Cette dernière s’opère entre des usages dif­féren­ciés des out­ils numériques et se fonde sou­vent sur des cli­vages généra­tionnels (Tik­Tok pour les jeunes, la télévi­sion pour les plus âgés) mais peut aus­si refléter des dis­par­ités sociales (usage de LinkedIn pour les CSP+).

Au-delà de la vie et de la mort des plate­formes, des moyens de dif­fu­sion ou des médias, cette rup­ture généra­tionnelle et sociale par­ticipe de l’émiettement des sociétés numérisées, des sociétés où l’on ne se par­le plus et dans lesquelles il sera de plus en plus dif­fi­cile de se comprendre…

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