Le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel adressait ce 10 octobre un avis au sujet de l’exécution en 2017 du contrat d’objectifs et de moyens (COM) de France Médias Monde (France 24, RFI, MCD). Si l’audience est au rendez-vous, 2017 enregistre un déficit avec des modifications unilatérales du périmètre de plusieurs indicateurs du COM et des ressources propres toujours très insuffisantes. Le site InfoMigrants permet de glaner d’autres subventions que celles de l’État français.
Un site en français, anglais et arabe
Acclamé par les médias, en 2017 était lancé le site InfoMigrants qui permet l’ « accès à une information vérifiée pour les réfugiés et les migrants. Le site est décliné en français, en anglais et en arabe. Fin 2017 [en novembre], InfoMigrants touchait en moyenne 3 millions de personnes sur l’ensemble de ses environnements. Le projet a été reconduit en 2018 avec certaines innovations techniques et l’ajout de nouvelles langues », relevait le CSA le 10 octobre 2018
Plus prosaïquement Le Monde relevait lors du lancement que ce site lancé par France Médias Monde (RFI, France 24), Deutsche Welle et l’agence italienne ANSA avait pour but « de fournir aux migrants une information fiable et vérifiée sur leurs pays d’origine, sur les routes qu’ils empruntent ou encore sur les pays d’accueil ». Bref, de participer à l’invasion migratoire. Bien sûr décliné sur les réseaux sociaux, le site fait travailler 8 journalistes à Paris, 6 à Bonn, 6 à Rome et une à Bruxelles.
France 24, audience au rendez-vous, en Afrique et au Moyen-Orient
Le CSA adresse un satisfecit sur l’audience de France 24, en hausse. « La couverture mondiale a été portée à 355,5 millions de foyers, en croissance de 6,8 % par rapport à 2016, avec une progression particulièrement marquée en Afrique subsaharienne (+ 44 %). La diffusion sur la TNT a fortement progressé en Afrique, où son taux de pénétration a été porté à 77 % grâce au déploiement de la chaîne sur la TNT dans des pays non francophones (Botswana et Comores notamment). L’objectif du COM de 62 % de taux de pénétration en 2020 est ainsi d’ores et déjà atteint ». Elle progresse aussi à Gaza et en Irak où deux émetteurs ont été remis en service.
RFI connaît en revanche des résultats en baisse : « Les résultats d’audience des antennes de RFI, mesurés dans 37 pays (sur les 150 où la station peut être reçue) sont en légère baisse : 40,7 millions d’auditeurs au lieu de 41,3 millions en 2016. Cette tendance a été observée en Afrique subsaharienne, le principal bassin d’audience de RFI. Celle-ci doit être toutefois relativisée compte tenu de la fermeture de l’émetteur FM de RFI à Kinshasa pendant 9 mois en 2016–2017 ainsi que par l’arrêt de la mesure de l’audience en ondes courtes au Tchad pour des raisons sécuritaires. Pour autant, c’est une audience en hausse qui a été enregistrée dans les zones d’Afrique subsaharienne où la radio est diffusée en mandingue ».
France Médias Monde bricole avec les effectifs et les indicateurs du COM
Pour contenir la masse salariale, il y a trois solutions : licencier, ne plus embaucher ou alors compter autrement. FMM semble avoir choisi la troisième solution, remarque le CSA : « La part des emplois non permanents diminue fortement en 2017. Ceci provient de la décision de France Médias Monde de ne plus comptabiliser les correspondants étrangers salariés au sein de ses effectifs à partir de 2017. Cette nouvelle méthodologie de calcul provoque une baisse des effectifs totaux de 70 ETP, bien qu’à périmètre constant ces effectifs aient progressé (de 19 ETP selon France Médias Monde) ».
Le CSA relève aussi que FMM procède à la « modification unilatérale du périmètre de plusieurs indicateurs du COM » qui « ne semble pas conforme à l’engagement de « veiller à la stabilité des périmètres d’un exercice à l’autre »…L’autorité de contrôle a également fait état des manquements répétés de France Médias Monde à l’arrêté sur le contrôle financier (non communication de reportings, déficit de contrôle en matière de rémunérations) ».
France Médias Monde, déficitaire et ultra-subventionné
Conséquence d’une gestion à l’à‑peu-près, il y a du déficit en 2017, mais rassurez-vous tout va bien, dit en substance le CSA : « France Médias Monde présente en 2017 un résultat net déficitaire (-1,5 M€), après cinq années de résultat net équilibré et de respect du budget adopté par son Conseil d’administration. Ce déficit provient du coût des départs volontaires négociés par le groupe. Ces départs sont destinés à anticiper les économies demandées à l’entreprise dans le cadre de la Loi de Finances pour 2018. Celle-ci réduit de 1,9 M€ le montant de la dotation à France Médias Monde prévue par le COM 2016–2020 au titre de 2018, tout en maintenant sa croissance (+2,3 %). »
Plus inquiétant, « les ressources propres (revenus publicitaires et autres recettes commerciales, de France Médias Monde demeurent modestes puisqu’elles représentent moins de 5 % des produits d’exploitation du groupe, taux le plus faible parmi les (16) groupes audiovisuels publics français. Le COM 2016–2020 fixe un objectif de progression de ces ressources de 15 %, soit 1,1 M€, à l’horizon 2020 ». Mais c’est mal parti pour l’atteindre, car les recettes publicitaires baissent de 5.1% sur RFI et sont stationnaires depuis 2014 sur France 24 « en raison de la difficulté à monétiser les nouvelles audiences numériques ».
Infomigrants subventionné par l’UE
Finalement, c’est le site Infomigrants qui sauve la mise pour France Médias Monde : « Les ressources propres ont progressé de 1 M€ en 2017, essentiellement sous l’effet des subventions internationales qui composent les recettes de diversification. Ces subventions progressent de 0,67 M€ à 1,77 M€ (+ 1,1 M€), grâce à des aides européennes perçues pour la création du portail Info-migrants ». Ou la version moderne des trente deniers de Judas.
Infomigrants avait un budget de 2,4 millions d’euros à son lancement – il a donc été financé pour 46% par des subventions de l’Union européenne — et pour le reste par la contribution audiovisuelle des français, qui ne cesse d’augmenter. Tout cela pour expliquer aux migrants comment trouver la meilleure route, trouver un logement, de quoi se nourrir, éviter les expulsions. En bref, inciter les migrants à venir en Europe, et surtout en France. Merci qui ?
Photo : InfoMigrants via Facebook (DR)