En plus d’énormes subventions reçues chaque année, le journal L’Humanité vient de se voir, sur demande de l’État, effacer une dette de 4 millions d’euros.
L’amendement voté par les députés mardi dernier 3 décembre, a décidé, en quelques minutes, que « les créances détenues sur la Société nouvelle du journal L’Humanité au titre du prêt accordé le 28 mars 2002, réaménagé en 2009 et imputé sur le compte de prêts du Trésor n° 903‑05, sont abandonnées à hauteur de 4 086 710,31 euros en capital. Les intérêts contractuels courus et échus sont également abandonnés. » Il estime que L’Humanité « ne peut faire face au remboursement de sa dette contractée auprès de l’État (…) parce que ses résultats financiers sont très faibles et qu’elle ne possède plus d’actifs ».
Pour Patrick Le Hyaric, président du directoire et directeur de L’Humanité, « il s’agit d’un des trois prêts que nous avons contractés en 2001–2002 quand nous étions proches de la cessation de paiement. Nous avons remboursé les deux premiers mais nous étions dans l’incapacité de rembourser le troisième ». Les deux premiers prêts accordés par le Fonds de développement économique et social avaient été remboursés, en 2007, suite à la vente du siège du journal à Saint-Denis. Rappelons qu’à l’époque, toutes les banques avaient refusé de prêter un centime au quotidien, qui s’était alors tourné vers l’État.
On peut s’interroger sur la nécessité pour l’État, et donc pour le contribuable, d’éponger la dette d’un journal dont la diffusion et les abonnements ne cessent de chuter (sur un an, la diffusion France payée a baissé de 7 %, à 41.623 exemplaires) et dont les pertes sont importantes : 1,9 million en 2011, 200 000 euros en 2012 et sans doute plus cette année, pour un chiffre d’affaires de près de 30 millions.
Selon un rapport de la Cour des comptes, L’Humanité a été le titre le plus subventionné par l’État (0,48 euro par exemplaire vendu à 1,40 euro, soit 32 % du prix), entre 2009 et 2011, touchant 6,8 millions d’euros par an en moyenne. Vous pouvez consulter toutes les subventions accordées par l’État au journal en téléchargeant l’infographie que l’Ojim lui a consacré.
La gronde ne s’est pas faite attendre. Le syndicat d’étudiant Uni a déjà lancé une pétition contre cet amendement. « Moi contribuable, je ne veux pas payer la dette du journal L’Humanité ! », écrit l’Uni. De son côté, le député UMP Thierry Mariani s’est interrogé sur son compte Twitter : « Aurait-elle (l’Assemblée, ndlr) fait de même pour un journal de Droite ? » Peut-être qu’à l’instar du Figaro, les journaux de droite ne sont-ils considérés que comme des « organes de propagande » (dixit Christiane Taubira) ?
« Si on peut s’émouvoir de l’abandon d’une telle rentrée d’argent dans les caisses de l’État à l’heure où l’on demande aux Français de se serrer la ceinture, on se demande également sur quels critères cet amendement favorise la survie de L’Huma alors que bien d’autres journaux se sont cassé la gueule et que la presse française est loin d’être au beau fixe », écrit Thibaut Ronet sur Boulevard Voltaire.
Sur Europe 1, Marine Le Pen a également évoqué ironiquement ce blanchiment en règle. « La République a beaucoup d’économies à faire. La subvention pour le journal L’Humanité est très lourde par exemple », a déclaré la présidente du Front National. Et les internautes, sur les réseaux sociaux, de se scandaliser de ce « traitement de faveur » à l’égard d’un journal communiste quand les familles et les PME surendettées n’y ont pas droit…
Mais L’Humanité continue son chemin. Grâce à cet effacement de dette, une nouvelle formule du quotidien sera lancée fin février ou début mars, avant un nouveau site Internet mi-avril. En toute indépendance ? À ce niveau d’aides publiques et de privilèges, il est sérieusement permis d’en douter…
Voir aussi : L’Humanité, infographie