Le 30 juillet 2018, Libération a voulu donner des gages à son lectorat vieillissant, et inquiet des progrès des populismes, en tirant à boulets (rouges) sur Valeurs Actuelles. Résultat ? Le ridicule ne tue plus mais il demeure ridicule. Comme souvent Libération.
Dans un article paru le 30 juillet 2018, la journaliste de Libération Virginie Bloch-Lainé, par ailleurs (et comme il se pratique en ces milieux) habituée de France Culture, s’attaque à l’hebdomadaire (des méchants, dans son esprit), Valeurs Actuelles. Elle reconnaît assez naïvement ne l’avoir jamais lu avant, sans doute à l’instar de tous ses collègues ou presque du monde médiatique de boboland. C’est dans Libération. La rédaction de l’hebdomadaire visé répond quant à elle le 1er août 2018.
La grande peur de la bien-pensante
Virginie Bloch-Lainé a donc décidé de se faire des frissons au cœur de l’été. Elle a lu Valeurs Actuelles, elle s’est en quelque sorte encanaillée. En effet, l’hebdomadaire clairement de droite (mot déjà sulfureux en lui-même du côté de Libération et de France Culture), ne manque pas de lecteurs, lesquels ne passent pas souvent dans les bureaux des arrondissements du centre de Paris. Encore moins depuis que la ville est électoralement En Marche. Que nous « apprend » cet article ?
- Que lire Valeurs Actuelles durant cinq semaines nécessiterait de « tenir le coup », car ce serait l’hebdomadaire « de la droite ultra » « propice » aux « dérapages ». Lesquels ? Pratiquer « la glorification de la France », du « gaspillage de l’argent public » ou de « l’essor de l’islamisme ». Le lecteur se dit que madame Bloch-Lainé devrait tout de même sortir un peu des locaux de Radio France si elle pense vraiment que ces thèmes sont « ultra » ou des « dérapages ».
- Que tout journaliste de boboland se doit à des passages obligés, à commencer par l’acte de foi narcissique et égocentré. C’est ainsi que Virginie Bloch-Lainé semble penser nécessaire de parler (d’entrée de jeu) de sa vie privée au peuple des lecteurs de Libération:
« Le magazine sort le jeudi et coûte 4,90 euros. Mon fils adolescent me donne un conseil depuis la cuisine, sa pièce de prédilection dans cette période de transition de sa vie : m’abonner en ligne pour réduire le prix au numéro. Il ajoute que je bénéficierais sûrement ainsi d’une newsletter quotidienne, gratuite, qui pimenterait mon article de scoops — des scoops aux yeux de Valeurs actuelles. C’est un bon plan. Je me rends sur le site de l’hebdo qui propose un kit regroupant l’abonnement «liberté» et la «lettre quotidienne». Je dois payer 58,80 euros, mais je ne comprends pas si je peux suspendre le tout quand je le souhaite. Ne prenons pas de risque. J’abandonne. »
La lecture faite par la journaliste est ensuite rythmée par les semaines
Semaine 1 : la journaliste de France Culture invitée dans Libération semble choquée par une couverture semblant supposer que l’euro aurait une responsabilité dans la dette publique de la France. Plus étonnant, elle affirme ne pas « connaître l’existence » de Sonia Mabrouk, ce qui indique un degré d’attention à sa prochaine (journaliste) de faible intensité. C’est à un entretien auquel est conviée Sonia Mabrouk, laquelle est par ailleurs auteur de livres. Son dernier roman a paru en 2018. Virginie Bloch-Lainé semble considérer que ne pas connaître Sonia Mabrouk, dont elle ne partage évidemment pas, social-libéralisme oblige, les idées sur l’Islam est un argument porteur. C’est surtout un révélateur de l’ambiance intellectuelle du monde des médias libéraux libertaires : on joue encore avec des malabars. L’attaque (prétendre ne pas connaître) a tout de la vindicte adolescente de niveau quatrième de collège. Virginie Bloch-Lainé trouve aussi que l’entretien accordé au magazine par « Robert O’Neill, le tueur de ben Laden » (il est en soit révélateur de considérer que cet homme est un « tueur ») est de « niveau CP ». Pourquoi ? L’homme qui nous a débarrassés d’un terroriste assassin de masse d’innocents a été oublié par les amis de Virginie Bloch-Lainé (la côte Est clintonienno-obamanienne des Etats-Unis) et est proche de Trump. Sa vision du monde ne compte donc aucunement. Elle ne saurait être que bête.
Semaine 2 : Virginie Bloch-Lainé est horrifiée. Pour elle, la couverture est « épouvantable ». Cette semaine-là, Valeurs Actuelles titre sur Soros, « Le milliardaire qui complote contre la France ». Elle voit là une manière journalistique digne des années 30 (évidemment) et de l’antisémitisme de l’époque (forcément). Valeurs Actuelles lui apparaît comme un magazine de type complotiste. À ses yeux, ce dossier pratiquerait la délation. Avec de telles personnes dans les médias d’État, nul doute que la diversité des opinions a du souci à se faire. Pourquoi ? Il est difficile de dénoncer ce que chacun sait déjà : le projet d’open society de Soros pour la France et l’Europe n’est pas caché et nombre de médias ont publié à ce propos. Qui suit réellement l’actualité sait que le milliardaire intervient beaucoup dans la vie politique du continent, au point que le gouvernement hongrois s’est attaché à limiter son influence sur son territoire. L’OJIM, par contre, n’a pas souvenir d’une intervention de madame Bloch-Lainé au sujet des numéros de Libération qui diabolisent Steve Bannon, comme ici (un titre qui ne sent évidemment pas ses années 30…).
Semaine 3 : tellement « choquée » par le numéro de la semaine 2, Virginie Bloch-Lainé n’a pas la force de lire celui de la semaine 3.
Semaine 4 : il y a un dossier sur les banlieues mais Virginie Bloch-Lainé se « dispense de sa lecture ». Elle pense trouver un article « moins obsessionnel », feuillette, lit un article consacré à l’Angola. Un bon article dit-elle mais… après avoir cherché dans les archives de Libération, elle trouve la même chose parue six mois auparavant… C’est ainsi : dans l’esprit des journalistes du genre de cette dame, il y a le vrai journalisme (la gauche sociale libérale) et le faux journalisme (la presse qui n’est pas de gauche sociale libérale). Il ne lui serait pas venu à l’idée d’aller voir si son Libération du jour ne reprenait pas des informations parue dans Valeurs Actuelles six mois auparavant (évidemment).
Semaine 5 : elle est gâtée ! Marion Maréchal et Serge Dassault en Une ! Le pire, vu depuis les studios subventionnés de Radio France et la salle de rédaction sous perfusion de Libération. Virginie Bloch-Lainé ne lit pas, nous l’avions deviné mais elle le précise : elle « feuillette ». Un peu comme avec la pensée et les idées, il faudrait avoir le courage de faire plus qu’effeuiller la pensée pour aller vers des conceptions moins binaires du monde, mais cela n’entrerait pas dans la politique éditoriale de Libération. En plus, l’hebdomadaire Valeurs Actuelles ose évoquer le référendum irlandais sur l’avortement sans « respirer l’enthousiasme » (contre ce résultat évidemment).
La conclusion permet de situer le lieu de la grande peur de la bien-pensante, peur qui semble de plus en plus partagée dans les médias officiels :
« Valeurs actuelles a des obsessions. Dans l’ordre et sans exhaustivité : glorifier la France, critiquer Emmanuel Macron, se plaindre du gaspillage de l’argent public et nous alerter sur l’essor de l’islamisme. Je termine ce test sans me livrer à l’exégèse de l’entretien avec Marion Maréchal, je vous l’épargne, mais selon eux, avec elle, on est sur la bonne voie. Rien à redire à sa vision du monde. En février 2016, Libération enquêtait sur Valeurs actuelles et se demandait pour quel candidat roulait le journal. Un an et demi plus tard, le doute n’est plus actuel. L’hebdomadaire espère 200 000 lecteurs par numéro d’ici 2020. »
L’ensemble suinte la pensée unique et l’incapacité à accepter la simple existence d’une pensée autre que la sienne, le tout au nom de ce qui serait Bien par nature : en particulier, tout sauf Valeurs Actuelles. Que pense ce magazine de la lecture de la journaliste salariée par l’État du côté de Radio France ?
La réponse de Valeurs Actuelles
Elle est signée de la rédaction et s’annonce ironique: « On n’a pas eu le temps de tester Libération ». L’ensemble peut se lire ici : la réponse de Valeurs Actuelles à Libération.
Drôle, souvent caustique, Libération reçoit une heure de colle. Nous laissons nos lecteurs juger plus avant de la réponse. Reste maintenant pour Virginie Bloch-Lainé à se cultiver un peu, histoire que sa plume ressemble à quelque chose de pensant le monde pour ce qu’il est : un lieu de complexité.