Le meilleur de l’Ojim en 2014 (7) — Pendant les fêtes, l’Ojim fait relâche et se rallie à la trêve des confiseurs. L’occasion de vous faire revivre les grands moments de l’année 2014 du point de vue de la critique des médias. Cette année, l’Ojim s’est particulièrement attaché à décrypter le discours produit par les médias par une analyse exhaustive de certaines émissions ou de certains supports de presse. Mais l’Ojim continue également de débusquer petites et grosses manipulations dont se rendent coupables certains journalistes, et tente de mettre à jour les enjeux qui se cachent derrière ce combat de la parole. N’oubliez pas que l’Ojim est un site entièrement indépendant qui ne vit que grâce à vos dons. Aidez-nous à remplir notre rôle d’Observatoire des médias et à exercer librement notre critique du système médiatique. Tout don nous est utile.
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Le sociologue et politologue Pierre-André Taguieff publie aujourd’hui, aux éditions du CNRS, un ouvrage qui fait déjà du bruit dans les rédactions parisiennes. Dans Du diable en politique, il démonte en effet le discours médiatique convenu et systématique vis à vis du Front National et le dénonce comme inepte et inefficace.
Décrivant avec minutie et de multiples exemples la « diabolisation » dont le parti de Marine Le Pen fait l’objet depuis de nombreuses années, l’auteur affirme que celle-ci s’est toujours révélée contre-productive et n’a eu pour résultat que de faire progresser les scores du FN.
Selon PA Taguieff en substituant l’indignation morale et la condamnation diabolisante à la critique argumentée et à la lutte politique, le discours médiatique dominant a offert au parti nationaliste le rôle valorisant et électoralement porteur de « bouc émissaire du système » et de héraut de la « France d’en bas ».
L’auteur affirme que, depuis le milieu des années 1980, l’antilepénisme est devenu « l’opium des élites ». Il constitue pour lui un breuvage idéologique qui les soulage et les endort, en les confortant dans l’idée qu’elles appartiennent au camp du Bien. Par ailleurs, l’antilepénisme jouerait également le rôle d’un ersatz de programme politique, masquant l’impuissance intellectuelle de la gauche, privée des illusions mobilisatrices du communisme, et de la droite « libérale », incapable d’assumer ses promesses électorales.
Un pavé dans la mare du conformisme…
Or, pour faire face aux nouvelles formes de l’extrémisme, on ne peut se borner à lancer des imprécations et à égrener des clichés, il faut étudier, argumenter et comprendre, en basant sur l’analyse des faits et des actes et non sur de prétendues « intentions » ou « arrières pensées » prêtés à ses adversaires. Mais le discours médiatique continue pourtant à utiliser les mêmes recettes qui ont échoué jusque là et ne semble pas parvenir à se réformer ni à s’adapter au nouveau paysage politique français qui est en train de glisser du bipartisme à un tripartisme à l’avenir encore indéterminé.
C’est donc un véritable pavé dans la mare du conformisme intellectuel et de la bonne conscience médiatique que jette l’auteur de La Force du préjugé ou de La Nouvelle Judéophobie, avec cet ouvrage de 400 pages qui allie la rigueur universitaire à la vigueur polémiste.
Une lecture passionnante et instructive à la veille des élections européennes où, selon de nombreux observateurs, la « vague bleu Marine » s’annoncerait déferlante.
Du diable en politique – Réflexions sur l’antilepénisme ordinaire, de Pierre-André Taguieff, Editions du CNRS, 400 pages, 26,40 €