Qu’est-ce que j’apprends ? (Imaginez que je le crie sur le ton de José Garcia dans La vérité si je mens!). J’apprends que mon dernier article, à savoir La race mise à l’honneur chez Médiapart (voir infra) a été censuré par Facebook. De quoi confirmer la substance des propos tenus à cette occasion.
Je les reproduis ici : « Ils ont Netflix, Disney Plus, Google, Facebook, avec eux mais ils se vivent comme des chrétiens relégués dans les catacombes du temps des persécutions sous l’empire romain. C’est grotesque ! » Le grotesque, qui se prévaut d’un droit de conquête incontestable, a encore frappé. Petit rappel des faits : Mediapart a annoncé la création d’un poste de responsable éditorial à la question raciale. J’étais partagé quant à la réaction appropriée à adopter. Selon ma pente, j’ai versé dans l’ironie avant de relever les contradictions en froid logicien que je suis à mes heures perdues.
Voir aussi : La race à l’honneur chez Mediapart ! Coup de gueule
Une paëlla indigeste
La dialectique serrée qui consiste à agiter la question raciale tout en maintenant des déclarations d’intention antiracistes était aussi savoureuse que la Paëlla de maman, certes, mais gorgée de tant d’éléments disparates que l’harmonie gustative était sacrifiée sur l’autel de la tambouille intersectionnelle. J’ai voulu démêler dans ce foutoir les lignes claires de la sottise généreuse, du mensonge pur et simple et du culot.
La souplesse soyeuse du Camp du Bien
Pour le culot, je notais ceci : « « Parler de « race » aujourd’hui en France suscite des polémiques sans fin », assène Sabrina Kassa, la responsable éditoriale à la question raciale chez Mediapart. On se demande bien à cause de qui… Ce sont les mêmes qui – savourons l’ironie – ont exercé leur terreur politico-linguistique autour de l’emploi du mot « race », devenu prohibé par leurs décrets épiscopaux, qui mettent au cœur de leur vision du monde le concept de race aujourd’hui. Vous les trouvez culottés ? Si peu, si peu. Ils ont peut-être découvert que le mot « chien » n’aboie pas et que le mot n’étant pas la chose, ils pouvaient trouver dans ce vocable, tout compte fait, un formidable levier pour leur entreprise idéologique. Et rassurez-vous : le mot « race » n’a une saveur de soufre qu’à la condition d’être prononcé par un Renaud Camus, par exemple, mot auquel il consacra un ouvrage. Quand ce mot est dégluti savamment par un militant décolonial ou une Rokhaya diallo, il se déroule tranquillement, dans la souplesse soyeuse des vestales préposées à la défense du Bien en soi, sans platonisme excessif il s’entend – ce qui renverrait à l’essentialisme conspué par biais antiraciste mais c’est encore une autre question… »
Rokhaya Diallo, la martyre du magazine Vogue
Depuis, Facebook m’a apparemment donné raison sur le traitement à géométrie variable qui est réservé à ceux qui mentionnent cette fameuse question… La question raciale n’est affectée d’un coefficient négatif qu’en fonction de celui qui s’en empare. Autrement, elle est licite, voire encouragée dans son expression. Mais plus inquiétant encore, ou plus comique, je découvrais dans le même temps les déclarations de Rokhaya diallo à la tribune de l’ONU du haut de laquelle elle a courageusement dénoncé les “persécutions” qu’elle subirait en France : “La liberté d’expression des femmes non-blanches est singulièrement entravée”, selon elle. Rappelons que cette grande persécutée a travaillé pour Canal, LCI, LCP, RTL, Radio France, Walt Disney, qu’elle intervient régulièrement sur BFM TV, au Guardian, à Al-Jazeera, publie des chroniques pour le Washington Post, a les faveurs du Times ou de CNN. Rappelons-nous également de la montée des marches à Cannes et des défilés Vogue qui ont dû la faire atrocement souffrir. Je mentionnerai l’article – très significatif à mon sens — du New York Times du 15 juillet 2020 qui lui est consacré :
« Une prise de conscience raciale en France, où le sujet reste tabou. Le regard tourné vers les États-Unis, des enfants d’origine africaine et antillaise abordent ouvertement la question de la race, une forme de défi à l’universalisme français. »
Donc, si je comprends bien et si je récapitule : moi qui ne suis ni une femme ni non-blanc, je ne serai jamais invité aux Nations Unies à parler des persécutions que je subis et des entraves à la liberté d’expression dont je suis la cible lorsqu’on me censure pour avoir évoqué la question raciale – je me suis borné à citer l’intitulé du poste créé par Mediapart –, je n’aurai jamais le droit à un article du Times élogieux pour avoir abordé « ouvertement la question de la race », mais Facebook, au contraire me censurera allègrement. À part ça, c’est madame Diallo qui est oppressée et moi en qualité d’homme blanc qui suis oppresseur…
Je réitère ma question : « vous les trouvez culottés ? »
Jean Montalte
Voir aussi : Affaire Duhamel, nouvelle censure sur Facebook