On aura tout vu dans la presse libérale libertaire, y compris le déchirement entre potes une fois révélés les tréfonds du fonctionnement du petit milieu médiatique : c’est fusillade en règle à Boboland Corral-LOL.
À lire, un article paru dans Le Monde du 21 février 2019, et signé par Raphaëlle Rérolle, Alexandre Piquard, Emeline Cazi et Brice Laemle. Étant donnée l’intense gravité de l’affaire dite de la « Ligue du LOL », il fallait bien qu’ils fussent quatre à la traiter, et surtout que dame parité soit respectée. Ce qui est le cas. Au Monde, on fait les choses en grand. Reste qu’à l’image de l’ensemble de ses confrères, Le Monde, bien que déléguant quatre de ses plus éminents reporters sur le terrain, ne s’est pas aperçu que l’expression « Ligue du LOL » fait peut-être aussi référence au jeu vidéo en ligne LOL ou League of Legends, jeu en forme d’arène de bataille en ligne – ce qui pouvait mettre la puce à l’oreille de longue date à qui était informé de l’existence des joyeux lurons, ce pour quoi il fallait être journaliste, communicant, graphiste etc, ou apprenti en ces domaines, au sein même du système des médias officiels. C’est un jeu à vocation drolatique, dans lequel le principal amusement réside justement dans l’éradication de la concurrence, à l’image de ce que pratiquait la bande de Vincent Glad. Notons que jamais ce nom n’est indiqué dans l’article du Monde. En tout cas : espérons que les juges penseront à les interroger quant à leurs connexions vidéogamiques !
Ce que Le Monde dit des Inrocks ?
En ouverture :
Passés les premiers moments de stupeur, c’est un flot de colère, de dégoût et même de douleur qui s’échappe des Inrockuptibles depuis bientôt deux semaines. Le 8 février, la rédaction de l’hebdomadaire apprend que deux de ses journalistes ont appartenu à la Ligue du LOL, ce groupe Facebook privé créé en 2009 dont des membres sont accusés d’avoir harcelé des internautes en ligne. Très vite, les responsables du journal publient un communiqué faisant part de leur « plus total effarement » et mettent à pied les salariés concernés qui sont convoqués à un entretien préalable dans le cadre d’une procédure pouvant aller jusqu’au licenciement pour faute.
Il est d’emblée intéressant de noter que, si les faits sont correctement relatés, Le Monde ne produit pas les mêmes insistances que lorsqu’il s’attaque à d’autres adversaires. Dans d’autres cas, le quotidien aurait sans aucun doute insisté sur l’anniversaire des dix ans de ces LOL, sur le harcèlement aussi. Là, l’insistance porte sur la stupeur (on a un peu de mal à croire que dans ce petit milieu et au vu du nombre de victimes cela n’ait pas fuité de longue date…) qui frapperait le milieu concerné et sur les sanctions. Elle aurait pu porter par exemple sur l’incongruité qu’il y a, dans un tel milieu perpétuellement moralisateur, à être empli de dangereux harceleurs (LOL), violeurs (pensons à “balance ton porc”, monde culturel-médiatique au premier chef) ou antisémites racistes (Mehdi Meklat où es-tu ?).
Ou même sur la culture spécifique des chefs, ce qui se fait automatiquement au sujet des personnes appartenant par exemple à des courants dits de droite. Ici, la question de la culture homo pouvait être posée. Ce n’est pas le cas : malgré la multiplication des cas de gangrène, le monde officiel de la culture et des médias poursuit son chemin vers le « Bien » dont il se pense le garant.
Lutter contre les toxiques ?
L’axe choisi par nombre de médias depuis la révélation de cette affaire est celui de la toxicité : un petit groupe d’individus toxiques, à ne pas confondre avec le milieu dans lequel il agit. Cependant, il y a drame (en général) et drames (en particulier, surtout les jeunes femmes et jeunes homosexuels harcelés par les ligueurs pour les pousser loin des postes convoités), alors de vraies mesures sont mises en œuvre : palabres et temps de paroles paritaires. Sans insister, Le Monde indique cependant qu’une trentaine de salariés des Inrocks expliquent que le fonctionnement toxique au sein de ce magazine, lequel titrait il y a peu sur la nouvelle gauche du « bien » de Glucksman fils, après avoir souvent mis Mehdi Meklat en Une, dure depuis plusieurs années. Notons qu’ils s’expriment sous couvert d’anonymat…
L’hebdo des masses populaires parisiennes des arrondissements centraux paraît tout de même avoir quelques soucis de fonctionnement humain, qui mériteraient une étude poussée pour voir si elle ne se retrouverait pas à l’identique en d’autres médias. Au sujet de comportements d’écosystème, une source personnelle et anonyme comme il se doit m’indiquait avoir été recrutée par un autre grand hebdomadaire parisien, en 1998, à l’occasion d’une partie fine organisée dans un appartement du centre de Paris, en fin de journée (de travail). Il était ressorti embauché, une fois ses preuves faites. C’est à se demander si cette fameuse (ou fumeuse ?) toxicité ne serait pas une sorte de mode de vie. D’autant que certains des toxiques ont montré ces dernières années une forte propension à la morale. Il en va ainsi de D. Doucet, co-auteur de la « fachosphère », livre par lequel il exposait combien nos vies seraient menacées par les médias non officiels de droite non libérale. Autrement dit, le prédateur se confond avec la proie.
Ah ! Ces potes !
Le monde des potes est tout de même exaltant. L’heure est venue pour Le Monde de lâcher les potes des Inrocks. Et de nettoyer les comptes twitter, sans doute. D’autant que l’un des défauts de cette affaire ne serait pas qu’il y ait des fascistes, des salauds, des salopes, des beaufs blancs incultes et homos ou hétéros, ou encore athées, new age, végans… comme il serait dit si les affaires concernaient d’autres bords politiques, non, pas de noms d’oiseaux. Cela concernerait tout au contraire… le sexisme masculin. Un groupe de garçons qui n’auraient pas réglé son machisme (il est vrai que les photos de la page wiki de Vincent Glad…) et serait malencontreusement entré, d’après Le Monde, dans la citadelle imprenable du Bien. Autrement dit Les Inrocks. Un aspect proprement extraordinaire de cet article du Monde est la façon de raconter dans le détail comment les choses se passaient dans l’open space des Inrocks, mais pas dans les arrières salles tout de même, des détails qui transforment cet article en article destiné à l’entre soi. Reste que D. Doucet ne mesure sans doute pas encore à quel point il va être lâché. Les temps à venir sont sombres :
Avant cela, des journalistes s’étaient émus du traitement du Front national par David Doucet et d’une interview, en 2012, de Jean-Marie Le Pen pas assez distanciée selon eux. Le journaliste a aussi été rappelé à l’ordre quand le site des Inrocks avait relayé, fin 2015, un entretien de Marion-Maréchal Le Pen qu’il avait coréalisé pour la revue Charles.
Ce n’est pas une fin d’article, dans ce monde-là, c’est une mise à mort professionnelle et sociale. Il fallait bien être quatre pour tenir le harceleur. Il faut dire que cette affaire est sans doute loin d’avoir délivrée toutes ses suites potentielles, et que le risque de polluer diverses rédactions semble grand. La chasse au blanc trentenaire est ouverte, tous aux abris.