Le pure player d’informations Médiapart.fr, dirigé par Edwy Plenel, reste menacé, malgré ses bons résultats en 2014, par le contrôle fiscal initié par Bercy fin 2013. Une vraie épée de Damoclès que “le procureur” Plenel fustige sans grand succès pour l’instant. Sans compter le poids de la technocratie européenne qui ne fait pas non plus les affaires de Médiapart.
Avec 1,4 million d’euros de bénéfice pour près de neuf millions d’euros de chiffre d’affaires en 2014, Médiapart.fr se porte bien. Le site bénéficie de surcroît d’une trésorerie de l’ordre de trois millions d’euros. De quoi assurer ses arrières après six ans d’existence et plus de 115 000 abonnés conquis ex nihilo. Dans ce contexte favorable, l’avenir de Mediapart est pourtant moins rose qu’il n’y paraît. Le site traîne depuis 15 mois un contrôle fiscal, déclenché par les services de Bercy à Noël 2013. L’administration réclame 4,2 millions d’euros (4,7 maintenant) pour des arriérés de TVA. De quoi sérieusement minorer les performances de Médiapart.fr. Explication d’un feuilleton en deux actes et à trois participants : Paris, Bruxelles et le pure player.
Acte 1.
En guerre depuis des années pour la reconnaissance aux sites d’information du taux de TVA super réduit (2,10%), dont bénéficie la presse écrite au titre de vecteur de la démocratie, Médiapart déterre en 2013 l’affaire Cahuzac. Plenel en est convaincu, le redressement signifié par huissiers interposés, est la réponse de la haute administration de Bercy au débarquement du ministre. Le bruit médiatique provoqué par le site donne lieu dans la foulée au vote de la loi reconnaissant la neutralité des supports, print et web. Le texte, soutenu par le gouvernement, est voté à l’unanimité des parlementaires dès janvier 2014. Pour Médiapart, il ne change rien : le redressement, qui inclut 1,4 million d’euros de pénalités, reste dû dans le cadre de la rétroactivité des décisions fiscales. On se retrouve dans une situation abracadabrantesque avec des hauts fonctionnaires soucieux de venger leur ex-patron, et de l’autre l’ensemble de la classe politique (Parlement, Matignon, Élysée) qui ne parvient pas à les contrôler.
Acte 2.
Le dossier se corse de surcroît au niveau d’une seconde technocratie après Bercy : l’Europe. Elle considère, prenant appui sur des textes datés, que les sites d’informations sont des services en lignes à l’instar de Meetic ou Leboncoin. A ce titre, ils doivent être assujettis au taux normal de TVA des pays concernés (20% en France). Le 8 mars, la Commission européenne a condamné la France à retirer le décret de 2011 sur la neutralité des supports concernant le livre. Depuis cette date, la TVA avait été harmonisée dans l’Hexagone à 5% qu’il s’agisse d’ouvrages print ou numérique. Proche dans l’esprit, la loi française sur la presse de 2014 pourrait être la prochaine sur la liste des oukases de Bruxelles.