À l’occasion du G7 tenu en France ce mois d’août, le président Macron s’est trouvé un nouveau représentant du « mal » en la personne du président brésilien Bolsonaro, accusé d’être responsable des incendies de l’Amazonie, lui qui est au pouvoir depuis seulement huit mois. Il s’est trouvé aussi une nouvelle conscience écologique dans laquelle seuls des esprits chagrins verront de l’opportunisme. Le président français ne rate jamais une occasion de parler de tout, de tout savoir sur tout etc, qui semble énerver ses condisciples, ainsi Merkel, mais amuse de plus en plus la presse étrangère. Un exemple avec le mensuel américain The Atlantic.
The Atlantic mensuel démocrate bon teint
Le mensuel de Boston, The Atlantic, aux publications quotidiennes sur le web, s’intéresse de près à la vie politique européenne et par contrecoup française. L’organe de presse a une correspondante en France, Rachel Donadio, et ne peut guère être accusé de mauvaise foi a priori vis-à-vis du courant de pensée libéral-libertaire : The Atlantic s’est rangé derrière la candidature Clinton en 2016 et s’affiche très critique contre Donal Trump, au point de participer à la campagne en faveur de la destitution de ce dernier. On n’accusera donc pas le mensuel d’anti-macronisme primaire quand il évoque le président français. Notons que The Atlantic n’est pas un organe de presse anodin, ayant près de 150 ans d’existence, 500 000 abonnés papier et son site ayant de l’ordre de 14 millions de visites uniques par mois. D’après le Chicago Tribune, The Atlantic serait l’un des dix meilleurs magazines de langue anglaise.
Ironie anglo-saxonne
Le 22 août 2019 au moment du lancement du G7, et alors que le président français s’invite au Journal de 13 heures pour sauver le poumon de la terre, l’Amazonie, The Atlantic publie un article tout en ironie au sujet du président français, intitulé « Emmanuel Macron explique que le monde brûle ». Le sous-titre ? « Le président français a réponse à tout mais est-il écouté par quelqu’un ? ». Le ton ironique est lancé et l’article ne s’en départira plus. Ainsi :
- « Une soirée parfaite pour une fin d’été, quand le président Macron, bronzé et regonflé à bloc, vêtu d’un costume bleu foncé et d’une chemise blanche impeccable, s’est exprimé devant la presse sur les questions internationales. La jet set parisienne était en grande partie toujours en vacances ailleurs qu’à Paris. A proximité de l’Elysée, boulangeries, magasins et députés étaient toujours en vacances ».
- « Pourtant, Macron avait un message à faire passer au monde : je suis le dernier homme debout, l’unique défenseur du multilatéralisme, celui qui conserve la tête froide dans un monde sous tension menacé par le réchauffement climatique. Le message n’est pas neuf mais Macron a pensé qu’il était préférable de le répéter ».
- Les rencontres du G7 ont lieu dans un « cadre idéal », une station balnéaire du 19e siècle, pour « des relations au bord du gouffre : l’Union Européenne, l’ordre transatlantique, l’ordre mondial ». Macron : « Nous vivons une période absolument historique en ce qui concerne les relations internationales. Il existe une crise profonde de la démocratie représentative en Europe, une crise du changement climatique, de la biodiversité, des technologies, des migrations, des inégalités qui traduisent la crise du capitalisme contemporain. Le monde risque de redevenir bipolaire, entre les Etats-Unis et la Chine. La question est celle de la perte de souveraineté où des pays deviendraient les vassaux des nouveaux pôles. Je ne veux pas de cela, ni pour l’Europe ni pour la France ».
- « Macron s’échauffait à peine. Ses premières déclarations furent suivies d’échanges durant deux heures. Plus il parlait, plus il affirmait la puissance française et européenne, plus il semblait que ce moment-là était dépassé. Macron pourrait regarder un bâtiment en feu et considérer cela comme une excellente occasion de comprendre le rôle de l’oxygène dans le processus de combustion. Il examine les flammes, les décrit avec talent, mais quel pouvoir a‑t-il ? »
- « Finalement, Macron a livré la performance que l’on attendait de sa part. Toutes ses interventions sont celles que l’on attend. Il n’est rien de plus qu’un orateur doué, maîtrisant brillamment les sujets et ses fiches politiques, prenant conscience de l’importance du moment historique, obsédé par le passé sombre de l’Europe et les enjeux actuels. Il a raison. Il a toujours raison. Et il veut toujours nous rappeler qu’il a toujours raison. Macron semble dire : le monde est peut être en feu mais ne vous inquiétez pas : je suis là ».
- « Quelqu’un, à Biarritz, a‑t-il l’intention de l’écouter ? ».
Le moins que l’on puisse dire est que The Atlantic n’est guère tendre avec le président français, y compris au sujet de sa personnalité, le problème principal qui inhibe sa capacité à être un véritable chef d’Etat. Reste que ce regard ironique et somme toute bien peu positif à son égard provient d’une presse qui lui est a priori acquise, celle des élites dites mondialisées, une presse proche des amis démocrates américains de Macron. C’est dire l’image que la France donne actuellement au monde.
(NdE : la traduction de l’article américain, et donc des propos de Macron initialement traduits du français par The Atlantic, est le fait de notre rédacteur)
PS et pour l’anecdote : le président Macron appelle le G7 à s’occuper du Brésil. À l’appui de sa harangue, il publie une photo d’incendie prise par Loren McIntyre, photographe de National Geographic, mort en 2003 ! Information reprise de notre confrère Antipresse.
Notre maison brûle. Littéralement. L’Amazonie, le poumon de notre planète qui produit 20% de notre oxygène, est en feu. C’est une crise internationale. Membres du G7, rendez-vous dans deux jours pour parler de cette urgence. #ActForTheAmazon pic.twitter.com/Og2SHvpR1P
— Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) August 22, 2019