Le tableau était presque parfait. Un jeune sans papier qui vient au secours d’un enfant suspendu à un balcon. Un clandestin, qui aux yeux de beaucoup de médias symbolise la vulnérabilité, sauve un enfant en détresse. Ce geste d’héroïsme a alimenté durant le dernier week-end de mai les médias en qualificatifs admiratifs. Un tableau parfait, à quelques détails près…
Il faut reconnaitre que le geste du « sauveur de l’enfant suspendu » samedi 26 mai est impressionnant et que la vidéo en ligne a contribué à son succès. Dès le dimanche, les médias s’enflamment :
Pour France Info comme pour Europe 1, Ouest-France, l’information importante est que « l’homme qui a sauvé un enfant suspendu à un balcon est un sans-papiers malien ».
Très vite selon BFMTV, « des élus parisiens réclament la régularisation de Mamoudou Gassama ».
Deux jours après son sauvetage, Le Monde nous informe que Monsieur Gassama a été reçu par Emmanuel Macron à l’Elysée, lundi 28 mai. Le président de la République « a assuré au migrant malien de 22 ans que tous ses papiers vont être régularisés ». M. Macron lui a également proposé d’engager les démarches en vue d’une naturalisation et il devrait intégrer le service civique des sapeurs-pompiers de Paris, déjà prêts à l’accueillir ».
L’occasion pour les médias et associations pro-migrants d’avancer leurs arguments
France Info profite de l’occasion pour faire débattre deux invités, un élu parisien et un membre d’une association d’aide aux migrants, qui regrettent que seul cet acte d’héroïsme permette une régularisation rapide d’un sans-papier. Pour ne citer que quelques exemples, le HuffPost donne la parole aux « défenseurs des migrants (qui) dénoncent “l’hypocrisie” de Macron » tandis que Slate évoque « la régularisation de Mamoudou Gassama, bonne conscience d’un État qui durcit sa politique anti-migrants ».
Un tableau presque parfait
Le tableau serait parfait s’il n’y avait cette vidéo sur internet où l’on voit le héros du week end chapeauté par un membre d’une association communautariste. Les propos introduisant le récit du sauvetage ne manquent pas d’étonner : « C’est un héros noir auquel nos enfants, notre communauté doivent s’identifier ». « On a forcé un peu les médias à parler de son cas à partir d’aujourd’hui ».
L’association dont fait partie celui qui donne la parole au sauveur d’enfant n’est pas inconnue. Les sites d’information Medias Presse Info et Boulevard voltaire lui ont consacré des articles, dans lesquels on apprend que l’association utilise des méthodes proches de l’intimidation.
Quelques jours après que le Président ait évoqué l’incompétence de « mâles blancs » pour résoudre les problèmes des banlieues, cette anecdote n’a pas retenu l’attention des médias mainstream. Un épiphénomène, sans doute…
Les héros du quotidien : pas si rares que ça
Pour introduire des éléments de contexte à l’héroïsme au quotidien, le site Damoclès a recensé quelques héros ordinaires qui n’ont pas été invités à l’Élysée. Entre Vincent qui sauve une famille de six enfants, victime d’un incendie en pleine nuit et Nicolas qui sauve une grand-mère et sa petite-fille de 3 ans en se jetant dans la Saône, la liste impressionnante et fait s’interroger sur la raison pour laquelle un événement fait le buzz et pas les autres. Pourquoi en effet ce geste a‑t-il été, au regard de tous les autres sauvetages héroïques, monté en épingle ? Parce qu’il a été filmé, ce qui, pour reprendre l’expression du militant communautariste, a « un peu forcé » les médias à en parler ?
Est-ce à cause du parcours du jeune malien, passé au peigne fin par l’Élysée selon Le Figaro qui nous apprend que le jeune clandestin en France usurpait une identité pour travailler de façon illégale sur les chantiers ? Beaucoup de questions, chacun se fera sa réponse… Et quoiqu’il en soit, on se réjouit d’une vie sauvée.