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Manipulation par l’image : le coup de gueule du quotidien italien Il Giornale

16 août 2021

Temps de lecture : 5 minutes
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Manipulation par l’image : le coup de gueule du quotidien italien Il Giornale

Temps de lecture : 5 minutes

Red­if­fu­sion esti­vale. Pre­mière dif­fu­sion le 17 juin 2021

L’Observatoire du journalisme le soulignait récemment : à chaque crise migratoire aiguë, les médias de grand chemin mettent en avant un symbole de la détresse humaine pour faire accepter à l’opinion publique une immigration extra-européenne massive.

Cela a été le cas en 2015 avec la pho­to du jeune Alan, mort sur une plage grecque, qui a fait le tour de la terre. Cela a été égale­ment le cas en 2021, lors des fran­chisse­ments mas­sifs de la fron­tière du ter­ri­toire espag­nol de Ceu­ta par des clan­des­tins, avec la dif­fu­sion de la pho­to du sauve­tage d’un bébé de la noy­ade par un garde civ­il espagnol.

Le créa­teur de l’ONG Open Arms, qui a été pour­suiv­ie pour « asso­ci­a­tion de mal­fai­teurs en vue de favoris­er l’immigration clan­des­tine », a récem­ment voulu de nou­veau cho­quer l’opinion publique en dif­fu­sant une image mor­bide. Pas de chance, le quo­ti­di­en ital­ien Il Gior­nale n’a pas mor­du à l’ameçon. Bien au con­traire, dans un arti­cle paru le 27 mai, le jour­nal cri­tique verte­ment cette nou­velles ten­ta­tive de manip­u­la­tion de l’opinion publique.

Nouvelle photo choc sur les réseaux sociaux

Le 24 mai, le créa­teur de l’ONG Open Arms pub­li­ait sur son compte Twit­ter la pho­to d’un enfant mort sur une plage libyenne. La date de la paru­tion de cette pho­to très large­ment com­men­tée et relayée n’a pas été choisie au hasard : les chefs d’État de plusieurs pays européens devaient le week-end suiv­ant se réu­nir pour trou­ver une solu­tion aux très nom­breuses arrivées clan­des­tines en Europe par la mer méditer­ranée, que ce soit sur les côtes ital­i­ennes ou en Espagne. En fait de solu­tion, c’est la répar­ti­tion des migrants entre pays européens qui est de nou­veau envis­agée, en dépit d’un opin­ion publique majori­taire­ment réfrac­taire à cette poli­tique débridée de peuplement.

La réac­tion de nom­breux médias n’a pas tardé. Ain­si, très rapi­de­ment, le jour­nal ital­ien La Stam­pa met­tait en cou­ver­ture de son édi­tion du 26 mai la pho­to de l’enfant mort, dans un arti­cle repris notam­ment par Cour­ri­er inter­na­tion­al en France. Le même jour, le site d’information Infomi­grants nous infor­mait que le pre­mier min­istre ital­ien Mario Draghi avait qual­i­fié cette scène d’« inac­cept­able ».

Réaction négative du quotidien italien Il Giornale

Il Gior­nale est un quo­ti­di­en ital­ien con­ser­va­teur à grand tirage. Cer­tains de ses arti­cles ne cèdent pas au con­formisme ambiant. La dif­fu­sion de la pho­to d’un enfant mort sur une place libyenne par le créa­teur de l’ONG Open Arms a amené l’un de ses jour­nal­istes, Faus­to Bilosla­vo, a réa­gir vive­ment à cette nou­velle ten­ta­tive de manip­u­la­tion de l’opinion publique. Nous repro­duisons quelques extraits sail­lants de cet article :

« Dès qu’elle le peut, l’ONG médi­a­tique et machine de guerre de pro­pa­gande utilise des pho­tos de corps noyés flot­tant, de sauve­tages dés­espérés et d’en­fants qui ne peu­vent plus respir­er. S’ils le fai­saient unique­ment pour sig­naler les morts en mer, ce serait accept­able, mais en réal­ité, ils utilisent les mas­sacres d’in­no­cents pour ren­vers­er la réal­ité tragique.

Les seuls vrais coupables des enfants sans vie, le vis­age dans le sable, sont les trafi­quants, qui envoient les migrants sur leurs radeaux de la mort en Ital­ie con­tre rémunéra­tion. Des ONG, comme Open Arms, qui grâce à son fon­da­teur Oscar Camps ont lancé des images choquantes, préfèrent point­er du doigt notre pays et l’Eu­rope qui, selon elles, ont aban­don­né le sauve­tage en mer. Le résul­tat évi­dent est que pour éviter des drames, la flotte human­i­taire doit s’en occu­per en débar­quant des migrants en Ital­ie  (…). Le moment du coup de poing pho­tographique dans l’estom­ac n’est égale­ment jamais choisi au hasard. Les dernières pho­tos sor­tent à l’oc­ca­sion du som­met des chefs de gou­verne­ment de l’UE, qui devait abor­der la ques­tion de l’ur­gence des migrants. De plus, les navires des ONG, comme l’Open Arms, sont ralen­tis par des arrêts et des con­trôles admin­is­trat­ifs. Et bien­tôt le Par­lement devra vot­er pour renou­vel­er, ou non, les mis­sions en Libye dont le sou­tien aux garde-côtes qui ont ramené plus de 9 000 migrants depuis jan­vi­er. Et aus­si les Nations Unies, avec le Haut-Com­mis­sari­at aux droits de l’homme, deman­dent à la Libye et à l’UE de mod­i­fi­er les opéra­tions de recherche et de sauve­tage en Méditerranée.

Open Arms et plaque tournante

Face à l’indig­na­tion, per­son­ne ne se demande com­ment ces pho­tos sont sor­ties. Le porte-parole d’Open Arms le passe sous silence, mais la plage des enfants noyés est proche de Zuwara, la prin­ci­pale plaque tour­nante de départ des migrants, où les trafi­quants et les mili­ciens com­man­dent. Les trafi­quants auraient intérêt à faire cir­culer les pho­tos des enfants noyés pour voir réap­pa­raître la flotte des ONG au large des côtes libyennes.  Le Haut Comité aux Réfugiés des Nations Unies a du per­son­nel sur le ter­rain, mais ils ne con­nais­saient rien des images au point qu’ils ont ouvert une enquête pour en savoir plus. Le Crois­sant-Rouge, l’équiv­a­lent musul­man de notre Croix-Rouge, récupère sou­vent les cadavres des noyés, mais aurait pu sig­naler le naufrage sans avoir à trans­met­tre les pho­tos via Open Arms. (…).

Une flopée de pseu­do-bien­fai­teurs par­ticipe au chœur de l’indig­na­tion, qui ne se ren­dent pas compte de la réal­ité : le prob­lème doit être résolu sur terre et non en mer, quand il est trop tard. Moins de pho­tos qui font ser­rer le cœur et plus de faits, qui blo­quent les départs, garan­tis­sent l’hu­man­ité dans les cen­tres de réten­tion et ramè­nent chez eux les nom­breux migrants qui veu­lent sor­tir de l’en­fer libyen. Les plans sont là, mais per­son­ne n’a la volon­té de les appli­quer, en Ital­ie et en Europe ».

À quand un tel accès de clair­voy­ance dans un média français de grand chemin ?

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