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Marseille : French Disconnection

19 septembre 2013

Temps de lecture : 15 minutes
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Marseille : French Disconnection

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De Plus belle la vie à un réel autrement moche, comment la vitrine du multiculturalisme est devenue le tableau de son échec.

« Tout est poli­tique », dis­aient les jeunes maos en mai 68. Il est dif­fi­cile de savoir dans quelle mesure cette asser­tion insi­dieuse­ment total­i­taire est juste, mais ce qui est cer­tain, c’est que lorsque ces enfants de la bour­geoisie prirent le pou­voir — qu’ils tien­nent tou­jours -, ils décidèrent de tout poli­tis­er. C’est ain­si qu’en France, plus que dans aucune autre démoc­ra­tie européenne, toute forme de médi­a­tion devint un vecteur pos­si­ble de pro­pa­gande. L’Éducation, l’art con­tem­po­rain, le ciné­ma, la chan­son, aucun secteur ne devait échap­per à l’effort de guerre idéologique inspiré des théories du penseur com­mu­niste ital­ien Gram­sci, pour lequel la révo­lu­tion devait égale­ment s’opérer dans un ren­verse­ment de l’« hégé­monie cul­turelle ». C’est pourquoi lorsqu’on se donne pour objec­tif d’étudier le tra­vail des médias, il est néces­saire, aujourd’hui en France, d’élargir le champ d’étude au-delà des médias pro­pre­ment dit, tout un pan de l’activité cul­turelle ayant été mobil­isé pour « informer » les citoyens, pour leur don­ner à voir la réal­ité de leur pays selon un prisme idéologique par­fois sin­gulière­ment déformant.

Dans cet ordre des choses, le feuil­leton « Plus belle la vie », dif­fusé tous les soirs sur France 3, chaîne publique, à une heure de grande audi­ence, est un véri­ta­ble cas d’école. Out­il de pro­pa­gande du « poli­tique­ment cor­rect » offrant une image idéal­isée et totale­ment fac­tice du « vivre-ensem­ble », ce feuil­leton au suc­cès crois­sant divulgue à plus de qua­tre mil­lions de téléspec­ta­teurs une image pos­i­tive de Mar­seille et de la « France telle qu’elle va vers un monde meilleur », que les événe­ments du mois d’août ont eu ten­dance à invers­er lit­térale­ment, révélant d’une manière sai­sis­sante l’arnaque intel­lectuelle en œuvre der­rière le feuil­leton à des­ti­na­tion des masses.

Marseille comme enjeu symbolique

Il n’est pas anodin que la série star de la télévi­sion publique se déroule à Mar­seille et dans un quarti­er, le « Mis­tral », directe­ment inspiré du quarti­er du « Panier », un quarti­er de forte immi­gra­tion maghrébine aujourd’hui en phase de « gen­tri­fi­ca­tion ». Mar­seille est en effet un enjeu sym­bol­ique fort, un sym­bole du mul­ti­cul­tur­al­isme tel qu’il doit réus­sir, une alter­na­tive au désas­tre de la Seine-Saint-Denis où la mer et les cigales se sub­stitueraient au bitume et aux crachats. « La ville est dev­enue un lab­o­ra­toire de la moder­nité, une grande expéri­ence de cohab­i­ta­tion entre Français d’origine et réfugiés d’Afrique du Nord. » expli­quait déjà en 2011, Julia Amalia Hey­er dans Der Spiegel. Ce sont pré­cisé­ment ces raisons qui ont été mis­es en avant pour faire de Mar­seille la cap­i­tale européenne de la cul­ture en 2013 : « Mar­seille est la ville la plus mul­ti­cul­turelle de France (…). Aux muta­tions cul­turelles qui touchent toute l’Europe, il faut pro­pos­er des répons­es cul­turelles, et la dimen­sion européenne est une clé pour dépass­er les blocages post­colo­ni­aux. Faire de Mar­seille une cap­i­tale européenne de la cul­ture, c’est adress­er un signe très fort à tous les néo-européens. » Ain­si s’exprimait le com­pos­i­teur Pierre Sauvageot pour soutenir la can­di­da­ture de la ville, sur le site Rue89. Mar­seille, cap­i­tale moins de la cul­ture, donc, que de l’utopie mul­ti­cul­turelle pro­posée comme mod­èle posi­tif aux « néo-européens » (i.e. les immi­grés d’origine extra-européenne), et comme exem­ple pro­pre à décrisper les archéo-européens récal­ci­trants au change­ment de régime. Car le « mul­ti­cul­tur­al­isme », rap­pelons-le, ne se résume pas à l’idée d’enrichissement d’une cul­ture par­ti­c­ulière par des apports exogènes, proces­sus qui a tou­jours existé dans n’importe quelle cul­ture, mais à un change­ment de régime politi­co-cul­turel. Là où jusqu’alors, une cul­ture locale dom­i­nante assim­i­lait des élé­ments extérieurs nou­veaux, le libéral­isme mon­di­al­isé pro­pose un régime de coex­is­tence de cul­tures dif­férentes, en quelque sorte « pri­vatisées », pour que se sub­stitue comme liant social, à une cul­ture ances­trale com­mune, deux seuls référents : l’argent et la lég­is­la­tion poli­tique­ment cor­recte. Tout cela se met­tant bien sûr en place sur les décom­bres de l’ancienne cul­ture nationale.

La question de l’Islam

L’un des prin­ci­paux prob­lèmes auquel est con­fron­té le pro­jet mul­ti­cul­tur­al­iste, se trou­ve être l’expansion de l’Islam en Europe et les réac­tions de rejet que cette reli­gion sus­cite. For­cé­ment, on vante les joies de l’échange et de la ren­con­tre des cul­tures, mais lorsque les musul­mans se trou­vent majori­taires sur un ter­ri­toire : ils l’islamisent. Ce qui est bien naturel, au demeu­rant. Et le mul­ti­cul­tur­al­isme n’apparaît alors que comme une phase tran­si­toire entre deux dom­i­na­tions cul­turelles. D’où les crispa­tions des autochtones, aux­quels on avait promis une liesse bigar­rée, et qui se retrou­vent à vivre dans un univers par­ti­c­ulière­ment uni­forme et con­trôlé où ils fig­urent en tant que scories pressées de dis­paraître. L’intégration de l’Islam, quitte à pass­er par mille « accom­mode­ments raisonnables », est donc une pri­or­ité des ten­ants du mul­ti­cul­tur­al­isme. Or Mar­seille, sur la ques­tion de l’Islam, revêt encore une dimen­sion stratégique. Com­prenant la plus impor­tante com­mu­nauté musul­mane de France (un mar­seil­lais sur qua­tre y appar­tiendrait), et le pro­jet de con­struc­tion de la plus grande mosquée du pays, c’est bien là que doit se prou­ver la sol­u­bil­ité de l’Islam dans l’utopie mul­ti­cul­turelle. En out­re, les musul­mans ne s’y sen­tent pas « stig­ma­tisés ». Tolérance des Mar­seil­lais ? Plus triv­iale­ment, cela tiendrait à la posi­tion de force des musul­mans : “A Mar­seille, la com­mu­nauté est telle­ment impor­tante qu’on n’a pas de prob­lème de stig­ma­ti­sa­tion. On n’en avait pas avant les débats sur le port de la burqa, on n’en aura pas non plus après”, assur­ait ain­si le gérant d’un snack hal­lal au JDD en 2010.

Une ville « euro-méditerranéenne »…

En somme, Mar­seille est moins dev­enue une cap­i­tale mul­ti­cul­turelle qu’une grande ville française islamisée. Pour faire digér­er cette réal­ité, le Pou­voir a recours à des fig­ures de style, Mar­seille se trou­vant présen­tée comme le phare de l’« euroméditer­ranée » et, pour implanter cette idée dans la con­science col­lec­tive, on ouvre le Mucem en juin dernier, le « Musée des civil­i­sa­tions de l’Europe et de la Méditer­ranée ». Quelle est la mis­sion offi­cielle de ce musée ? Il serait « con­sacré à la con­ser­va­tion, l’é­tude, la présen­ta­tion et la médi­a­tion d’un pat­ri­moine anthro­pologique relatif à l’aire européenne et méditer­ranéenne, à par­tir de col­lec­tions d’o­rig­ine inter­na­tionale et de recherch­es tournées vers une approche trans­dis­ci­plinaire, con­cer­nant les sociétés dans leur total­ité et dans l’é­pais­seur du temps. » Ce jar­gon tech­nocra­tique trahit à quel point le pro­jet du musée est sim­ple­ment d’être un fourre-tout dénué de con­tours et de direc­tion, mais qui parvien­dra à fab­ri­quer de toutes pièces l’idée d’une cohérence civil­i­sa­tion­nelle entre l’Europe et la Méditer­ranée, laque­lle jus­ti­fierait, en somme, l’africanisation de la sec­onde ville de France. Un dis­posi­tif de pro­pa­gande qui fait songer à l’évocation de Charle­magne par les Nazis occu­pant la France : « Non, vous n’êtes pas envahis par les Alle­mands, vous venez juste de retrou­ver votre bon vieil empire car­olingien ! » Tour de passe-passe assez grossier, surtout que dans le cas de Mar­seille, il ne repose sur aucune réal­ité tan­gi­ble. S’il y a bien eu une Europe méditer­ranéenne, ce fut à l’époque de l’empire romain, alors que les Berbères et les Ethiopi­ens étaient des citoyens romains, par la suite chris­tian­isés, et cette « euroméditer­ranée » là s’est éteinte avec la chute de l’Empire et l’expansion musul­mane, c’est dire qu’elle appar­tient davan­tage à l’archéologie qu’à une His­toire vivante.

« Plus belle la vie » ou le réalisme socialiste 2.0

« Plus belle la vie » ou le réalisme socialiste 2.0

« Plus belle la vie » ou le réal­isme social­iste 2.0

C’est donc pour toutes ces raisons que Mar­seille est dev­enue le ter­ri­toire d’élection de l’utopie mul­ti­cul­turelle, et que le feuil­leton de prop­a­ga­tion de cette utopie y a pris ses quartiers. Le titre même de la série sem­ble sug­gér­er au téléspec­ta­teur : « La vie sera plus belle quand elle sera vécue selon les par­a­digmes que nous allons expos­er dans la fic­tion suiv­ante. » Quels sont-ils ? Le soci­o­logue Jean-Yves le Naour, qui a con­sacré une étude extasiée à la série (Plus belle la vie, la boîte à his­toires, PUF) les expose ain­si : « On y voit des jeunes filles avorter, des homo­sex­uels en veux-tu en voilà, une apolo­gie de l’amour libre et du métis­sage, des plaidoiries pour les sans-papiers, etc. Même la ques­tion de l’islam (…) est abor­dée dans le feuil­leton. Au cen­tre du réc­it, on trou­ve le vivre-ensem­ble, le rejet du com­mu­nau­tarisme, la pro­mo­tion de ce que l’on appelle la « diver­sité », et ce n’est pas un hasard si la plu­part des cou­ples de « Plus belle la vie » sont mixtes. Les scé­nar­istes ont même poussé la per­ver­sion démoc­ra­tique jusqu’à faire tomber amoureux un flic raciste et une poli­cière beurette. » D’une cer­taine manière, le feuil­leton suit une démarche esthé­tique sem­blable à celle prônée autre­fois par le « réal­isme social­iste » en art et en lit­téra­ture, trans­posée sur l’idéologie de l’époque, l’enjeu étant de décrire le monde non tel qu’il est, mais tel qu’il devrait être si l’utopie pro­mue était réalisée.

Un instrument de lutte idéologique au quotidien

En plus de cette vision arti­fi­cielle du monde délayée tout au long de la série, celle-ci développe au jour le jour une lutte idéologique sur les sujets que soulève l’actualité. Un récent arti­cle d’Arrêt sur images va jusqu’à affirmer qu’ « à par­tir de 2007/2008, la série a engagé une lutte idéologique con­tre le sarkozysme en détri­cotant com­plète­ment les argu­ments de l’UMP qua­si­ment au jour le jour. » En quoi con­siste ce pré­ten­du « détri­co­tage » ? Eh bien par exem­ple : « Lorsque Sarkozy s’at­taqua pour la pre­mière fois aux Roms, un per­son­nage de gen­til jeune gitan apparut très peu de temps après et enta­ma une his­toire d’amour avec une des jeunes vedettes de la série. » « Détri­co­tage » ultime, et éthique­ment très lim­ite sur le ser­vice pub­lic : « Quelques jours avant les élec­tions prési­den­tielles, nous avons été témoins d’une scène extra­or­di­naire. Dans le café du Mis­tral qui est le point de ral­liement de tous les per­son­nages, au comp­toir, le doc­teur Leser­man, une des fig­ures les plus pos­i­tives de la série a exprimé, évidem­ment sans le nom­mer, mais de manière très claire, qu’il n’é­tait pas ques­tion de vot­er pour Sarkozy. Les autres ont opiné comme si ça allait de soi. » Plus récem­ment, lors du débat sur le mariage gay, pour don­ner la parole aux opposants, d’après le site de Jean-Marc Moran­di­ni, on a vu une mère de famille acar­iâtre insul­ter deux hon­nêtes homo­sex­uels qui s’embrassaient inno­cem­ment. Ce « détri­co­tage » n’a donc stricte­ment rien à voir avec le moin­dre début d’argument rationnel, il con­siste sim­ple­ment à exploiter le sen­ti­ment d’identification du spec­ta­teur à des fig­ures pos­i­tives, lesquelles relaient l’idéologie poli­tique­ment cor­rect, et sont vic­times de fig­ures néga­tives car­i­cat­u­rales qui assu­ment et résu­ment tout dis­cours divergeant. Une sim­ple manip­u­la­tion émo­tion­nelle de masse sous le cou­vert d’un diver­tisse­ment bas de gamme.

Bienvenue dans le monde réel

Dans la réal­ité, cepen­dant, Mar­seille est loin de cette réus­site voulue par le pou­voir libéral-lib­er­taire et anticipée par « Plus belle la vie » ; dans la réal­ité autrement plus moche, la sec­onde ville de France est même l’exemple le plus man­i­feste de l’échec du mul­ti­cul­tur­al­isme, et cette dis­so­nance est telle qu’elle ren­voie le dis­cours offi­ciel comme l’univers de car­ton pâte du feuil­leton à leur nature de farce sin­istre et à leur pure fonc­tion de pro­pa­gande. En effet, si Mar­seille a été sous le feu des pro­jecteurs en cette fin d’été, ce n’est pas tant parce qu’elle était cette année la « cap­i­tale européenne de la cul­ture » ou parce que le « vivre-ensem­ble » y était aus­si mer­veilleux que dans le quarti­er du Mis­tral, mais parce qu’elle n’est plus que le ter­ri­toire de jeu des ban­des rivales maffieuses. Sur le ter­rain, la belle utopie mar­seil­laise se résume à une ville dont la moitié des arrondisse­ments est classée en zone de sécu­rité pri­or­i­taire et où la vio­lence est telle et la police si dépassée par les événe­ments, que Samia Ghali, pour­tant « néo-européenne » encar­tée au PS en appelle depuis un an à l’armée. «Il y a un an jour pour jour, j’avais tiré la son­nette d’alarme en lançant un appel à l’armée dans les cités, et la sit­u­a­tion est tou­jours la même !», a‑t-elle déclaré alors que les min­istres Ayrault et Vals venaient assur­er un min­i­mum de com­mu­ni­ca­tion après le treiz­ième meurtre de 2013 com­mis par les trafi­quants. Il faut dire que ces règle­ments de compte provo­quent des dom­mages col­latéraux jusque dans les hôpi­taux, comme à La Con­cep­tion, le dimanche 18 août, lorsqu’un infir­mi­er est agressé au couteau parce qu’il ne veut pas pren­dre assez rapi­de­ment en charge un groupe d’hommes qui venait de poignarder à mort un rival de 18 ans. Les infir­miers récla­ment des ren­forts de police aux urgences. Après l’armée dans les cités, doit-on envis­ager que l’Etat français ruiné paie un polici­er der­rière chaque infir­mi­er pour que celui-ci puisse soign­er gra­tu­ite­ment des assas­sins sans risque pour sa vie ? À ce compte-là, l’utopie mul­ti­cul­turelle risque de coûter une fortune…

Le multiculturalisme : retour au chaos

« La France mul­ti­cul­turelle est un échec. Cet idéal, pro­mu depuis trente ans par l’idéolo­gie antiraciste, pro­duit plus de racisme encore. C’est ce qui ressort du rap­port de la Com­mis­sion nationale con­sul­ta­tive des droits de l’homme. Il est urgent de stop­per la liban­i­sa­tion de la France », affir­mait le jour­nal­iste Yvan Rioufol, il y a quelques mois et peu de temps avant que ce lab­o­ra­toire du mul­ti­cul­tur­al­isme qu’est la citée phocéenne illus­tre son pro­pos d’une manière aus­si élo­quente que sanglante. Cet échec était pour­tant prévis­i­ble, non seule­ment parce que cette utopie est absurde, mais de sur­croît parce que les con­di­tions de son hypothé­tique réal­i­sa­tion sont absentes. En effet, comme nous l’avons dit, renonçant à faire com­mu­nier le peu­ple dans une cul­ture his­torique dom­i­nante, le pro­jet mul­ti­cul­turel, pro­jet libéral, ne dis­pose plus, comme fac­teur de lien social, que des deux ressorts de la loi et de l’argent — les bien­faits du doux com­merce qui domes­tiquent les rela­tions humaines sur la base de l’intérêt bien com­pris, et la coerci­tion de l’Etat. Quand les pris­ons sont sat­urées et le pays en pleine crise économique, for­cé­ment, on va droit au chaos, et l’idéal mul­ti­cul­turel se retourne en société mul­ti-raciste, ultra-vio­lente et atom­isée, dont les symp­tômes sont par­ti­c­ulière­ment nom­breux à Mar­seille, bien au-delà des règle­ments de compte.

Ce que vous ne verrez jamais dans « Plus belle la vie »

Il est aisé de mon­tr­er à Mar­seille le revers de la fic­tion, en lis­tant par exem­ple un ensem­ble d’anecdotes qui en dit beau­coup sur la réal­ité de cette ville et de son lien social, mais qui, pour­tant, ne seront jamais exploitées par les scé­nar­istes de « Plus belle la vie », seule­ment occupés à peaufin­er leur décors fac­tices. Vous ne ver­rez jamais, dans ce feuil­leton : « des asso­ci­a­tions tenues par des deal­ers notoires (…) sub­ven­tion­nées par des fonds publics. En échange (de quoi), les caïds de quarti­er tien­nent les bureaux de vote ! », comme le rap­porte Saïd Ahama­da, créa­teur du col­lec­tif AME. Aucun per­son­nage, comme Fabi­en, vic­time au quo­ti­di­en d’un racisme anti-blanc dans les quartiers nord, ne sera épaulé ou écouté par les clients du Mis­tral, alors qu’il témoign­erait de son cal­vaire : «Plusieurs fois, dans le métro, j’ai dû subir des “sale Gaulois”, “mécréant” ou d’autres injures en arabe (…). Une fois, ils ont même sor­ti un couteau, j’ai pris un coup de bouteille de Coca-Cola sur la tête et un coup de poing sur la tempe. Des inscrip­tions “va crev­er, Français”, il y en a jusque sur les murs de ma rue. » Jamais, le sym­pa­thique médecin de la série ne sera con­fron­té à une sit­u­a­tion comme celle que rap­por­tait dans Le Point du 16 juil­let, cette médecin mar­seil­laise, « séquestrée dans un apparte­ment au milieu d’une dizaine de per­son­nes qui (lui) deman­dent d’établir un cer­ti­fi­cat de vir­ginité pour l’une de leurs filles. ». Jamais vous n’assisterez non plus à l’éviction vio­lente d’un camp de Roms par des habi­tants maghrébins excédés, comme cela s’est pro­duit pour­tant l’année dernière sans sus­citer l’émotion des asso­ci­a­tions anti-racistes.

L’avenir de la France

Il serait pour­tant judi­cieux de se pencher sur ce genre de cas, puisque si Mar­seille est un lab­o­ra­toire du mul­ti­cul­tur­al­isme, la moin­dre des choses serait tout de même, plutôt que fan­tas­mer sans cesse le pro­gramme, de s’intéresser aux résul­tats con­crets de l’expérience. Résul­tats d’autant plus impor­tants qu’ils con­cern­eraient, à terme, le ter­ri­toire entier, où est déjà engagée la « mul­ti­cul­tur­i­sa­tion » à marche for­cée. C’est pourquoi, très naturelle­ment et prenant au mot la doxa offi­cielle, le jour­nal­iste dis­si­dent Éric Zem­mour peut con­clure au vu des événe­ments : « La trilo­gie de Mar­seille n’est plus Mar­ius, Fan­ny, César mais désin­dus­tri­al­i­sa­tion, décen­tral­i­sa­tion, défran­ci­sa­tion. La trilo­gie noire de Mar­seille est la pointe émergée du mal­heur français, Mar­seille est l’avenir de la France. » Pen­dant ce temps, la presse dom­i­nante à d’autres com­bats. Rel­a­tivis­er la sit­u­a­tion pour Le Monde et Libéra­tion, ou bien, comme à Téléra­ma ou à La Provence réagis­sant à une enquête du Figaro, s’élever con­tre le « Mar­seille Bash­ing ». Ain­si, pen­dant que « Plus belle la vie » con­tin­ue d’entretenir le rêve, la presse bien-pen­sante traque ceux qui ten­teraient de le bris­er, tout cela dût-il s’achever dans le pire cauchemar.

M.D.

Crédit pho­tos : France 3/DR

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