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Matinale de France Inter de Demorand, à dieu-Morand

19 septembre 2017

Temps de lecture : 7 minutes
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Matinale de France Inter de Demorand, à dieu-Morand

Temps de lecture : 7 minutes

Du lundi au vendredi, de 7 heures à 9 heures, le duo Nicolas Demorand/Léa Salamé remplace Patrick Cohen aux manettes de la matinale de France Inter. Cette dernière était devenue le haut lieu national du politiquement correct tendance gauche sociale libérale. Ils sont deux sur le plateau mais Demorand en est le directeur des consciences. Des changements ? Un petit tour dans les studios pour voir.

La matinale de France Inter : changer pour ne rien changer

L’axe offi­ciel est le même que sous le (long) règne de Patrick Cohen : « Lib­erté, moder­nité, actu­al­ité, c’est la promesse de ces deux heures d’information. Deux heures pour décor­ti­quer avec la rédac­tion l’actualité poli­tique, économique, socié­tale… ». C’est l’accroche de l’émission sur la page qui lui est dédiée sur le site de la radio. La promesse est en par­tie tenue, c’est mod­erne comme l’ORTF et ouvert à la lib­erté au sin­guli­er. Nico­las Demor­and étant sem­blable à ce que ses audi­teurs con­nais­sent de lui : le ten­ant d’une cer­taine idée de la lib­erté. Celle de penser par Demor­and lui-même. For­cé­ment, le ton de la mati­nale de France Inter s’en ressent.

Pas tant du côté des invités. Ici, la mati­nale ne fait pas de remous, on reste à peu de nuances près idéologique­ment entre soi depuis fin août : Éric Woerth, Philippe Mar­tinez, Dominique Méda, Muriel Péni­caud, Thomas Piket­ty, Valérie Pécresse, Dominique de Villepin, Christophe Cas­tan­er, Anne Bert, Mar­tine Aubry, Philippe Besson, Annick Girardin, Ben­jamin Griveaux, Olivi­er Besan­cenot, Élis­a­beth de Fonte­nay, Alain Finkielkraut, Boris Fau­re, Thier­ry Solère, Anne Hidal­go… Libéral-libéral­isme der­rière tous les micros, à l’exception notable de Finkielkraut. La rumeur dit que cer­tains audi­teurs regret­tent Patrick Cohen. C’est dire ! Reste que deux invités par mati­nale, c’est la règle. Sauf le 12 sep­tem­bre 2017.

Bonjour Finkielkraut, vous êtes bien encadré ?

« Bon­jour, Nico­las. Oui, c’est cor­rect. Mon amie Élis­a­beth de Fonte­nay, avec qui je viens de pub­li­er un dia­logue ami­cal mais sans con­ces­sions, et Olivi­er Besan­cenot pour faire bonne mesure, je com­prends… ». Cet échange n’a pas eu lieu mais on pou­vait aisé­ment l’imaginer. Finkielkraut, dans la mati­nale de France Inter, c’est le risque max­i­mum que peu­vent pren­dre Nico­las Demor­and et Léa Salamé — au-delà c’est le Mor­dor. L’auditeur sent que l’animateur de la mati­nale a vécu une vraie aven­ture. Du coup, Besan­cenot sert encore à quelque chose. Finkielkraut a été autorisé à venir le 12 sep­tem­bre 2017 puisqu’il ne se déplace plus qu’accompagné de sa copine, Élis­a­beth, sans doute sous con­di­tion de ne pas en faire des tonnes au sujet de l’écrivain Renaud Camus, théoricien du grand rem­place­ment, que le philosophe a récem­ment eu le courage d’inviter dans son émis­sion Répliques sur France Cul­ture.

Ayant con­staté que « Renaud Camus n’a plus voix au chapitre mais qu’il est sur toutes les lèvres », Alain Finkielkraut lui a don­né la parole le 10 juin 2017 dans une émis­sion inti­t­ulée Le grand démé­nage­ment du monde. Noms d’oiseaux et autres mots cour­tois avaient bien enten­du fusé. Finkielkraut et de Fonte­nay ont pu expos­er leurs idées et dif­férences en toute com­plic­ité. Ce sont de vieux amis. Et Besan­cenot a rétabli la bal­ance « révo­lu­tion­naire ». Par con­tre, le nom de Renaud Camus n’a pas été pronon­cé. Ce devait sans doute être le deal. Bien sûr, Demor­and indique que les diver­gences entre de Fonte­nay et Finkielkraut sont « mas­sives » et que ce dernier « n’a pas du tout bougé de ses posi­tions ». Pour le jour­nal­iste, la pre­mière est du côté de « l’espérance », le deux­ième du « pes­simisme ». Ce que ses deux invités con­tre­dis­ent immé­di­ate­ment. Le philosophe trou­ve l’occasion de pré­cis­er ses posi­tions. Cela se passe tout de même entre pigistes ou salariés de Radio France, Nico­las Demor­and, Élis­a­beth de Fonte­nay et Alain Finkielkraut étant des habitués de l’antenne. La ren­con­tre s’intitulait « Mon­tr­er qu’on peut se dis­put­er autrement ». Le prob­lème avec France Inter est que cette dis­pute toute rel­a­tive ne dure pas, la preuve par ce qui suit.

Femmes et migrantes ? L’âge de bronze à la rescousse !

Le 13 sep­tem­bre 2017, suite à l’annonce par la min­istre de l’Égalité des femmes et des hommes, Mar­lène Schi­ap­pa que la PMA serait bien­tôt ouverte à toutes les femmes en France, le Jour­nal de 7 heures indique que « les femmes seules et homo­sex­uelles pour­ront donc en béné­fici­er ». Sim­ple annonce factuelle. Nul doute que la radio revien­dra sur ce sujet dans les semaines à suivre.

Ce 13 sep­tem­bre, ce n’est pas la peine : cinq min­utes après le Jour­nal, la ques­tion du droit des femmes reçoit un éclairage nova­teur grâce à la chronique « sci­en­tifique » de Math­ieu Vidard, annon­cé ain­si par Nico­las Demor­and : « Ce matin, une étude qui apporte un nou­v­el éclairage sur le rôle des femmes à l’Âge de Bronze ». En appelant aux plus récentes dis­ci­plines sci­en­tifiques, dont la paléo-géné­tique, laque­lle récupère des traces d’ADN dans les restes d’humains et autres ayant vécu dans le passé, Math­ieu Vidard explique que des chercheurs alle­mands ont « révélé des infor­ma­tions sur les déplace­ments des femmes entre 2500 et 1600 av. J.C », grâce à des dents et à des os. Donc : « Con­traire­ment aux idées machistes large­ment répan­dues, les femmes pou­vaient voy­ager sur des cen­taines de kilo­mètres pen­dant que les mâles repus à la bouil­lie de céréales ne bougeaient pas d’un iota. Je vous rap­pelle pour­tant qu’à l’Âge du Bronze, Télé­foot n’existait pas » (rire audi­ble de Demor­and à l’antenne). L’information a fil­tré suite à l’analyse de molaires de 84 humains. Tu doutes que la PMA pour toutes est un pro­grès ? PAF ! Prends donc tes ancêtres dans les dents petit réac qui m’écoute ! L’intelligence, c’est femelle, on te le dit. Dans la zone étudiée par les chercheurs, « on décou­vre ain­si que les femmes venaient de loin, prob­a­ble­ment de Bohème ou de l’Allemagne cen­trale, alors que les bon­hommes n’avaient pas évolué au-delà de leur lieu de nais­sance. Ces femmes ont aus­si joué un rôle moteur dans la cul­ture en appor­tant avec elles de nou­velles tech­nolo­gies et de nou­velles idées, bien que déjà très occupées à faire des enfants [en migrant entre femmes ? NdA], un par an en moyenne à cette époque, elles ont voy­agé dans des char­rettes tirées par des bovins et ont con­tribué à la dif­fu­sion de cer­taines tech­niques de céramique. Beau­coup de femmes de l’Âge du Bronze maîtrisent par­faite­ment l’art de la poterie [ce sont les molaires qui le dis­ent, ne perdez pas le fil, NdA] et pour­tant ce sont les hommes qui font fig­ure de potich­es dans cette histoire ».

Le petit Nico­las pose alors une ques­tion quant aux déplace­ments de ces pau­vres types sans aucun doute blancs, machistes et hétéros de l’Âge du Bronze, dont un Trump doit bien être le descen­dant, une trou­vaille den­taire fini­ra par le démon­tr­er. Réponse : « Quand mon­sieur Âge du Bronze daigne sor­tir de chez lui, c’est pour exploiter sa nou­velle pas­sion pour la vio­lence, son cerveau devient très binaire, hémis­phère droit la chas­se, hémis­phère gauche la guerre. C’est le début de la course aux arme­ments. Les femmes, elles, préfèrent voy­ager en paix et trans­met­tre de la cul­ture et des idées, foi de molaires ».

Dans 5000 ans, des chercheurs alle­mands trou­vant une molaire de Muriel Péni­caud, par exem­ple, sur la côte Est des États-Unis déduiront ain­si sans aucun doute que notre min­istre du tra­vail est l’introductrice de l’ordinateur portable Apple sur le con­ti­nent améri­cain. La sci­ence a sou­vent servi l’idéologie dans l’Histoire. Ser­vant le stal­in­isme à des fins de pro­pa­gande elle encense ici l’idéologie lib-lib dont Demor­and sem­ble vouloir faire le pain quo­ti­di­en de ses audi­teurs. La preuve, le 14 sep­tem­bre 2017, Les Inrocks con­sid­éraient avec un ton qua­si mes­sian­ique que « le mozart de la radio » et « la voix la plus puis­sante de l’hexagone », Dieu­Morand donc, est revenu sur Inter.

Pas de tsuna­mi. La mati­nale d’Inter garde le même fond idéologique. Un même ton aus­si, sim­ple­ment accen­tué par duo Demorand/Salamé — arrivée au pou­voir d’un archange lib-lib oblige. Si on se grat­te un peu les idées le matin entre visions iden­tiques ou presque du monde, il en restera bien quelque chose dans la tête des audi­teurs, non ?

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