Il y a pire que la peur, c’est la peur de la peur, un danger invisible comme le Covid ou encore plus effrayant : « l’extrême-droite ». Médiacritiques le trimestriel de nos camarades d’Acrimed, aimables troskistes égarés dans la critique des médias, consacre son édition de février 2022 à « médias et extrême-droite ». Rions un peu dans ces temps de manque.
Vade retro satana
« Cordon sanitaire, la grande banalisation, mutilation des débats, dédiaboliser un néo-fasciste, banaliser un délinquant raciste, blanchir un négationniste, complicités, mais que font les rédactions, business de la peur, légitimation médiatique, racisme chic, philosophie de l’imposture », quelques titres et quelques sous-titres qui donnent l’ambiance du journal, des rédacteurs terrorisés devant un terrible danger : la parole se libère et les débats ne se font plus seulement entre copains libéraux-libertaires et libertaires-libéraux, parfois – rendons grâce à Acrimed – badigeonnés de Marxologie gentiment datée.
Zemmour + Bolloré = le diable
Nous n’avons pas compté combien de fois le terme Zemmour revient dans le journal, sûrement à chaque page, sauf peut-être celles consacrées au RN et à la famille Le Pen.
Il est vrai qu’Eric Zemmour au début de la campagne électorale est apparu comme un météore et un « bon client » pour les médias. Bon client = bonne audience = invité souvent. Entre septembre 2021 et mi-février 2022 le journaliste devenu candidat était présent partout. Mais ce que la presse fait, elle le défait, suivant l’adage « Lécher, lâcher, lyncher ». Dès le 25 février, date de l’invasion russe de l’Ukraine, les médias se sont déchaînés contre Eric Zemmour, devenu malgré lui un fort utile paratonnerre pour Marine Le Pen. Ce que regrettent les rédacteurs d’Acrimed, c’est ce que souligne le journaliste libéral repenti Glenn Greenwald pour l’Amérique mais qui s’applique aussi bien à l’Europe :
« La religion centrale des libéraux américains est devenue la censure. Réduire au silence, déprogrammer et surtout empêcher leurs adversaires d’être entendus est maintenant leur objectif prioritaire, leur arme de choix ».
Glenn Greenwald, 15 avril 2022
Un peu de Patrick Buisson pour se remettre
Sur Éric Zemmour, on peut aisément préférer l’analyse de Patrick Buisson dans Le Point (15 avril 2022) :
« Contrairement à ce qu’a voulu croire son équipe, il n’était pas un candidat de rassemblement mais un candidat
de déblaiement. Il a pleinement rempli son office de brise-glace idéologique en acclimatant de nouveaux thèmes dans le débat comme celui, par exemple, du grand remplacement, jusque-là très conceptuel. Il n’a cessé tout au long de la campagne d’invoquer le retour du tragique dans l’Histoire et de convoquer un imaginaire anxiogène. Mais ce qui a fait sa fortune médiatique aura causé sa perte dans les urnes.
Lorsque le tragique est passé de la perspective à l’imminence avec la guerre en Ukraine, supplément non prévu au programme, le décor a brusquement changé. Zemmour est alors apparu comme le cavalier de l’Apocalypse. Emprunté au grec ancien, « apocalypse » signifie dévoilement. Zemmour aura été le candidat du grand dévoilement. Celui qui levait le voile sur un paysage terrifique.
Dans ces conditions, il était fatal qu’on en vînt à confondre le message et le messager et que ce dernier finît par faire figure d’épouvantail. Face aux prophètes du malheur, la majeure partie de la bourgeoisie française sera toujours du parti de Jeanne Bécu, alias la comtesse du Barry : « Encore un instant, monsieur le bourreau ! » C’est le syndrome du Titanic, qui veut que les passagers de première classe s’accrochent jusqu’à la dernière minute à leurs privilèges. »
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