C’est après que des actrices, des célébrités, ou des femmes politiques, aient témoigné avoir été victimes de harcèlement et d’agressions sexuelles d’Harvey Weinstein, un producteur de cinéma hollywoodien réputé, que naquit le mouvement « MeToo ». Mais lorsque d’autres femmes témoignent des mêmes faits perpétrés par des personnes issues de l’immigration, les faits sont passés sous silence. Un deux poids deux mesures de nouveau mis en lumière par l’affaire Thaïs.
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Thaïs agressée, Thaïs oubliée, Thaïs niée
Le 7 décembre 2021, Thaïs d’Escufon, ancienne porte-parole de Génération Identitaire, publie une vidéo sur son compte Instagram où elle raconte comment un homme d’origine tunisienne l’a séquestrée pendant une demi-heure avant de se rendre coupable d’une agression sexuelle. Certains internautes n’ont pas hésité à nier la réalité des faits vécus par Thaïs, alors même qu’une enquête est ouverte par le parquet de Lyon pour agression sexuelle, violation de domicile et harcèlement sexuel. Ces internautes ne voient dans cette agression qu’un mensonge inventé par la jeune femme pour servir ses idées. Considérant l’engagement de Thaïs d’Escufon, la parole de la victime, pourtant sacralisée dans d’autres affaires, apparaît douteuse à certaines personnes et certains médias.
Libération précise : « Sollicitée Thaïs d’Escufon n’a pas souhaité communiquer des éléments sur la procédure à Libération, permettant de vérifier les faits. »[1], comme si le procès-verbal, posté sur les réseaux sociaux, ou l’ouverture d’une enquête n’étaient pas suffisants pour appuyer la réalité des faits. Autre élément, Géraldine Maillet dit à Thaïs, lors de son passage sur le plateau de Touche pas à mon poste, « Je ne suis pas de votre bord, mais je vous crois. ». Le choix des mots est intéressant. Pourquoi ce « mais ». Le « mais » indique une opposition dans l’esprit de la chroniqueuse entre le bord politique de Thaïs et son honnêteté concernant son agression. Néanmoins, là n’est pas le principal élément intéressant sur cette affaire.
Pas touche aux extra-Européens
Le principal reproche fait à Thaïs, notamment lors de son passage chez Cyril Hanouna, est de faire de son agression le symbole d’une violence sur les femmes commise par des personnes issues de l’immigration extra-européenne. Un reproche qui ne manque pas d’être fait par Gilles Verdez, qui déclare : « Vous faites de ce drame un fait politique ». Pourtant d’autres agressions, sexuelles ou non, ont donné lieu à des faits politiques, sans que personne ne s’en émeuve.
Nous citions le mouvement « MeToo », Mediapart consacre un large dossier à ce mouvement qui devient un fait politique par la multiplication des témoignages et la couverture médiatique qui en est faite, aucun article concernant l’agression de Thaïs n’a été trouvé sur ce site.
Lorsque plusieurs affaires – citons l’affaire Mila, l’affaire des viols commis au nouvel an 2016 à Cologne par des migrants ainsi que l’affaire Thaïs – pointent toutes vers un même profil, pourquoi est-il interdit d’en faire un fait politique appelant à une prise de conscience collective ? Nous n’avons cité que quelques exemples, mais les témoignages sont nombreux.
Voir aussi : [Dossier] Cologne : chronique d’un mensonge rattrapé par le réel
Cécité sélective
Cette cécité – qui n’est pas pour nous surprendre — souligne la déconnexion entre d’une part, la majorité du milieu politique, médiatique et intellectuel, et d’autre part, le réel subi quotidiennement par des centaines de jeunes femmes françaises et européennes. Le premier refusant de voir ses certitudes balayées par la réalité quotidienne vécue par les deuxièmes. Un sociologue dirait « ils ne croient pas ce qu’ils voient, ils voient ce qu’ils croient ».
Notes
[1]Que sait-on de la plainte de Thaïs d’Escufon pour agression sexuelle ?, CheckNews de Libération (consulté 13/12/2021)