Le statut d’«expert » est fort enviable. Invité sur les ondes et dans la presse écrite, consulté, convoité, cajolé l’expert (ou supposé tel) voit sa réputation auto-entretenue. Même si celle-ci est créée de toutes pièces, confortée par une camarilla de copains, tous sur la même longueur d’ondes. Exemple avec un « expert » qui porte un très beau nom Olivier Le Cour Grandmaison, ci-devant réputé spécialiste en islamophobie.
Mortels ennemis
Se voyant régulièrement ouvrir les colonnes de la presse de gauche et d’extrême-gauche, qu’il s’agisse du Monde, de L’Humanité où il y est présenté comme un expert, politologue et spécialisé sur l’histoire coloniale, Olivier Le Cour GrandMaison, mérite qu’on s’intéresse à lui. Il vient en effet de publier un nouvel ouvrage, intitulé Ennemis mortels, visant à trouver la source d’une prétendue islamophobie française dans son histoire coloniale. Cet ouvrage bénéficie d’une campagne promotionnelle avec l’appui de RFI, des Inrocks et de Médiapart, autant de médias qui se répandent en interviews du prétendu spécialiste qui en est l’auteur.
Une analyse qui se retourne contre son auteur
Pour jauger du sérieux et de la crédibilité de ce personnage, il convient de remonter à un article à charge contre Claude Guéant, qu’il publie sur Internet en avril 2011 et dans lequel, non sans virulence, il dénonce ceux qui excipent, sur les questions migratoires, du risque de l’arrivée de centaines de milliers de migrants en Europe et de l’émergence d’une menace terroriste. Est-il nécessaire de rappeler que, depuis cet article, ce ne sont pas des centaines de milliers, mais des millions de migrants qui ont déferlé en Europe, et que la France, avec 252 morts dus au terrorisme islamique, a, depuis 2011, été le pays occidental le plus durement frappé sur son sol par cette menace ?
« Tromperies de bonimenteur » s’exclame dans cet article Olivier Le Cour Grandmaison, à l’encontre de Claude Guéant ! Rarement, sans doute, quelqu’un aura‑t’il qualifié de manière si pertinente ses propres propos …
Touche-à-tout
En effet, si Olivier Le Cour Grandmaison (alias OLCG) touche un peu à tout, tout indique qu’il ne maîtrise pas grand-chose, à commencer par la plupart des sujets sur lesquels il s’exprime publiquement. Après avoir enseigné le droit public et donné des cours de sociologie et de philosophie à l’université du Maine, il est devenu responsable du Deug de droit à l’université d’Evry-Val d’Essone. Dans cette université très marquée par le militantisme communautariste, auquel nous verrons qu’OLCG ne manque pas de fournir l’appui de ses quelques connaissances acquises en sciences politiques, il dirige actuellement un master intitulé « Coopération et solidarité internationales . Vaste programme.
S’appuyant sur cet apparent éclectisme académique, l’ami Olivier tente de se faire passer pour un historien spécialisé sur les questions coloniales, avec la complaisance de certains médias vis-à-vis de ses publications sur la question. Or, l’intéressé ne bénéficie ni de la légitimité académique ni de la reconnaissance des vrais historiens spécialisés sur ces questions pour se prétendre expert dans ce domaine.
Titulaire d’une maîtrise d’histoire, après avoir réalisé un mémoire portant sur la révolution française, qu’il a publié en 1992 sous le titre Les Citoyennetés en Révolution (1789–1794), il quitte la discipline historique pour se consacrer à la philosophie et aux sciences politiques, domaines dans lesquels il passe un DEA. Après une seconde publication, Les Constitutions françaises aux éditions de La Découverte, dans le domaine du droit public qui touche à son champ de compétences, OLCG se lance sur un thème où il possède encore un peu de légitimité, compte-tenu de son DEA, mais dont le titre résume sans doute le moteur intellectuel de ses combats ultérieurs : Haine(s) : Philosophie et politique. Dernier ouvrage avant de partir en roue libre.
« Sottisier » et « entreprise frauduleuse »
C’est en effet à partir de ce moment que, prenant sans doute un peu d’assurance au terme de ces trois publications, Olivier Le Cour Grandmaison s’invente des capacités d’historien sur le thème de la colonisation, en publiant, chez Fayard, en 2005, Coloniser, exterminer. Sur la guerre et l’État colonial ! Édité en arabe, en 2007, en Algérie. Une manière, sans doute, pour l’auteur, de contribuer à la « coopération et solidarités internationales » entre la France et l’Algérie. Sauf que… Patatras ! Tous les historiens experts de ces questions lui tombent dessus, soulignant l’absence de rigueur historique de son travail : Jean-Guillaume Lanuque qualifie de « hors sol » son étude des discours de l’époque, tandis qu’Emmanuelle Saada considère que l’ouvrage « s’ancre dans un refus de l’histoire ».
Les historiens Gilbert Meynier et Pierre Vidal-Naquet, pourtant peu soupçonnables de malveillance à l’égard des entreprises idéologiques venant de la gauche ou de l’extrême-gauche, se sentent même obligés de déclarer au sujet de son ouvrage, dans un article publié dans Esprit et considéré par l’historien Claude Liauzu comme une « critique rigoureuse » : « à le lire, on ne peut s’empêcher de poser la question : un sottisier peut-il tenir lieu d’œuvre de réflexion et de synthèse historique ?... Assimiler peu ou prou le système colonial à une anticipation du 3ème Reich, voire à un « précédent inquiétant » d’Auschwitz, est une entreprise idéologique frauduleuse. »
Malgré ce tir de barrage unanime de la communauté des historiens, qui aurait dû encourager notre ami à cesser de parler d’histoire coloniale pour revenir à sa zone de confort, l’« entreprise idéologique frauduleuse » ne s’est pas arrêtée là et l’intéressé a, depuis, multiplié sur ce thème les sottisiers… La République impériale : politique et racisme d’Etat en 2009, De l’indigénat. Anatomie d’un « monstre » juridique : le droit colonial en Algérie et dans l’empire français en 2010, L’Empire des hygiénistes. Vivre aux colonies en 2014, et l’actuel Ennemis mortels. Autant d’ouvrages salués de même manière tout aussi critique, par les historiens, que la première publication par laquelle cet auteur a initié sa longue dérive visant à exprimer, sous couvert d’une prétendue expertise qui relève de l’imposture, sa haine politique et philosophique contre la France et son histoire.
Choix militants
Sans surprise, cette dérive idéologique s’est aussi manifestée dans les choix militants de ce prétendu expert. Ainsi, l’intéressé, qui tombait dans son article de 2011 à bras raccourcis sur les journalistes qui, selon lui, ne vérifiaient pas les faits avant d’interviewer Claude Guéant – on ne peut que le rejoindre sur cette lacune journalistique au vu de la bienveillance avec laquelle Le Cour Grandmaison est présenté par les journalistes qui l’interviewent – aime aussi expliquer à la justice comment elle doit fonctionner.
En effet, pour lui, le discours critique sur l’islam prononcé par Eric Zemmour lors de la Convention de la droite doit le conduire devant les tribunaux, tandis que Tariq Ramadan, aujourd’hui mis en examen à la suite de cinq dépôts de plainte pour viol, ne devait pas être maintenu en prison pour éviter les pressions sur les premières plaignantes, pourtant visées par des menaces de mort. Olivier Le Cour Grandmaison avait même donné sa signature à une tribune publiée dans Mediapart pour réclamer la libération du prédicateur proche des frères musulmans. Ce dernier, s’il n’a pas reconnu les viols dont il est accusé, a toutefois fini par reconnaître des relations sexuelles violentes et « adultères », ce qui reste inquiétant pour celles qu’il qualifie ainsi de partenaires sexuelles, compte-tenu du châtiment de lapidation promis par les islamistes et auquel Tariq Ramadan n’entendait proposer qu’un simple moratoire, le temps, peut-être, qu’il remette sa situation personnelle en ordre sur ce sujet !
Toutes sortes de choses qui n’indisposent pas OLCG qui préfère militer pour la régularisation massive des clandestins et participer, à l’université d’Évry où il sévit désormais, à des colloques communautaristes, organisés par le « centre Malcom X » et dans lesquels la dénonciation de la montée de l’antisémitisme dans certaines banlieues est qualifiée « d’islamophobe ».
Ses prises de positions sur le média communautariste Oumma.TV, à la ligne éditoriale proche des frères musulmans, prêteraient à rire aux éclats si elles ne s’inscrivaient pas dans un contexte où de tels propos, comme l’ensemble des travaux d’Olivier Le Cour Grandmaison, n’avaient, sinon pour but, pour effet certain d’attiser la haine anti-française de communautés qui s’organisent sur leur sol d’accueil. Sans sourire, il ose en effet affirmer que la France serait le seul pays au monde qui porterait un regard bienveillant sur son histoire coloniale (ce qui reste à démontrer) en s’exprimant sur une webTV qui sert de vecteur d’influence à l’idéologie « frériste » visant, précisément, à proposer un regard bienveillant sur l’impérialisme arabo-musulman qui reste, avant tout… une histoire coloniale !