Sous pression, le patron du « premier groupe de presse français » démissionne après avoir « aimé » des messages de Sarah Knafo et Marion Maréchal.
Le président du groupe de presse EBRA (Est Bourgogne Rhône Alpes), sous la pression des syndicats (CGT et Syndicat National des Journalistes) a été obligé de démissionner de ses fonctions le 28 janvier dernier. Son crime : avoir « liké » (aimé) sur son compte LinkedIn des publications des députés européens Sarah Knafo (Reconquête!), Marion Maréchal (Identité Libertés), de Matthieu Valet (Rassemblement national) ou des « prises de positions chantant les louanges de la politique de Viktor Orbán ou réclamant plus de fermeté contre les étrangers. »
Dénonciation du SNJ
Ce scandale dans le microcosme médiatique a éclaté le 23 janvier à la suite d’une enquête du Syndicat National des Journalistes et de Mediapart.
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Devant la tempête soulevée au sein des rédactions des neufs quotidiens de L’Alsace, Le Bien public, Le Dauphiné libéré, Dernières Nouvelles d’Alsace, L’Est républicain, Le Journal de Saône-et-Loire, Le Progrès, Le Républicain lorrain et Vosges Matin, détenus par le groupe de presse EBRA, le tout aux mains du Crédit mutuel Alliance fédérale, Philippe Carli avait d’abord affirmé que son compte LinkedIn était géré par une autre personne, avant de présenter un « mea culpa » dans les journaux du groupe le 26 janvier :
« En “likant” récemment des contributions de comptes et de personnalités politiques sur les réseaux sociaux, j’ai provoqué des réactions et des interrogations, au sein de notre groupe de presse, sur ma neutralité politique. Oui, ma pratique rapide des réseaux sociaux a été maladroite. J’en suis désolé. Ce n’est pas ce que je suis en tant qu’homme et dirigeant d’un groupe de presse indépendant. Ces réactions ne représentent en rien un soutien à quelconque parti, courants politiques ou tout autre mouvement extrémiste. Au contraire, mes valeurs personnelles comme mes engagements associatifs m’ont toujours placé dans un seul camp, celui de l’humanisme, du respect des autres, de l’intégration, dans l’opposition au racisme, aux discriminations, au sexisme. Je veux solennellement vous en assurer. »
5 jours pour faire tomber une tête
Ce qui interroge dans cette histoire, c’est la rapidité (5 jours) avec laquelle le Syndicat National des Journalistes a obtenu la tête de Philippe Carli et les caisses de résonance (Le Parisien, Libération, Le Monde, etc) dont bénéficie ce syndicat clairement marqué à gauche et à l’extrême-gauche et qui n’hésite pas à afficher clairement sa lutte contre « l’extrême-droite » (Rassemblement national, Reconquête!) comme une priorité :
Le syndicalisme fait reculer l’extrême droite. Syndiquez-vous.
— Aurélien Boudon (@aboudon.solidaires.org) 29 janvier 2025 à 09:54
Ne pas laisser le soutien à l’extrême-droite se banaliser. Nul part, jamais.
Belle action du @snjournalistes.bsky.social
— Simon Duteil (@simon.duteil.solidaires.org) 28 janvier 2025 à 20:07
Dans son communiqué, le Syndicat National des Journalistes note « qu’un patron témoigne de ses opinions avec ses “like”, sur un réseau social ouvert à la consultation publique de tous ses membres, pourquoi pas ? D’autres que lui ne s’en privent pas. Mais qu’il le fasse en tant que dirigeant du plus grand groupe de presse quotidienne régionale de France est, pour le SNJ, bien plus problématique, dans la mesure où sa notoriété et ses responsabilités engagent indéniablement les rédactions, dont les lignes éditoriales sont réputées être indépendantes et apolitiques. »
EBRA pro-Macron, pas de problème
Pourtant, lorsqu’en avril 2022, Nicolas Théry (ancien conseiller de Dominique Strauss-Kahn), président du Crédit Mutuel Alliance fédérale qui chapeaute le groupe de presse EBRA, avait écrit à ses administrateurs avant le second tour de la présidentielle pour leur dire qu’il « voterait Macron », le SNJ n’avait pas dénoncé une quelconque ingérence politique dans la ligne éditoriale des 9 quotidiens du groupe. Bien au contraire, car dans le même temps, le SNJ appelait ses « militants, adhérents et sympathisants du SNJ à participer massivement aux rassemblements unitaires « Non » à l’extrême droite, pour la justice et l’égalité ! » afin de rejeter « Marine Le Pen » et « d’empêcher l’avènement d’un projet de société destructeur de l’État de droit, de la république démocratique sociale et solidaire que nous défendons chaque jour. Il s’agit de dénoncer son programme trompeur qui frapperait durement les plus faibles, les plus démunis, les femmes, les personnes LGBTI ou étrangères. »