Lors du forum de Davos de cette fin janvier 2020, Greta Thunberg, la grande prophétesse médiatique du réchauffement climatique dont nous avions fait un portrait détaillé il y a peu, était à nouveau présente ; comme cela est devenu l’habitude.
Accompagnée de quatre autres jeunes activistes du mouvement “Fridays for Future” (les fameuses grèves étudiantes pour le climat), elles ont donné une conférence de presse, suivie d’une photo de groupe. Et c’est là que le drame est arrivé, lors de la publication de cette photo, Vanessa Nakate, la seule Africaine de la bande, a été coupée au montage. Il n’en fallait pas plus pour y voir le retour de l’Apartheid.
Quand un recadrage de photographie est comparé à “l’effacement du continent africain” de l’Histoire
Greta Thunberg et Vanessa Nakate, ayant probablement la même habitude à tout surjouer, ont vivement réagi à cette histoire.
Nakate l’a fait dans une vidéo de plus de 10 minutes, vue par plus de 600 000 personnes et postée sur Twitter. Elle dit avoir compris “pour la première fois de sa vie la définition du mot racisme” (déclaration surprenante pour une personne de 23 ans censée vivre dans un monde au “racisme systémique”). Et de continuer avec ces mots : “L’Afrique est le continent qui émet le moins de carbone, mais nous sommes les plus impactés par la crise climatique. Mais effacer nos voix ne changera rien. Effacer nos histoires ne changera rien. Sur internet, j’ai vu plusieurs médias faire la même chose. Le monde est si cruel.”
Thunberg a exprimé la dimension “inacceptable de la chose, à énormément (?) de points de vue” et terminé avec cette phrase, pour reprendre son amie, “Vous avez effacé un continent.”.
Le “système racisme” (sic) de Konbini
Du côté du monde médiatique, “l’affaire” a été assez peu reprise, ni par Le Figaro, ni Le Monde, ni la majorité des grands organes de presse. Le principal média s’y étant intéressé est le très bien-pensant Konbini avec un article qui vaut le détour.
Tout commence par l’utilisation du qualificatif “noir”, de manière décomplexée, dès le titre : “L’activiste noire Vanessa Nakate a été exclue d’une photo de groupe avec Greta Thunberg”. L’article est ensuite agrémenté des réactions de diverses personnes jusqu’à cette phrase : “À travers cette action, c’est tout un système racisme qui se révèle une fois de plus, comme l’ont noté de nombreux·ses autres militant·e·s noir·e·s qui se sont exprimé·e·s quant à leur invisibilisation. Vanessa Nakate a d’ailleurs appelé à une prise de conscience de tou·te·s.” Outre la dénonciation du fameux “racisme systémique”, on assiste à une envolée lyrique en écriture inclusive (alors qu’elle est absente du reste de l’article), comme si en deux lignes, Konbini cherchait à marquer le plus de points possibles auprès des minorités LGBT, “post-coloniales” et cie, déjà abondamment courtisées par le média.
Face à la “tempête”, une agence de presse qui reste calme
Cette photographie a été prise par un salarié de l’agence de presse américaine Associated Press (AP), qui l’a ensuite mise en ligne.
Face aux attaques, AP a expliqué que le photographe “avait coupé ainsi sa photo parce que l’immeuble, situé derrière Vanessa Nakate, à gauche, “distrayait” l’œil du spectateur”, le tout, réalisé “dans un délai très court”. L’agence a aussi dit regretter cette publication, rappelé qu’elle se souciait “profondément de la représentation fidèle du monde qu’elle couvre” et même précisé que ses journalistes étaient formés pour qu’ils “soient sensibles aux problématiques d’inclusion et d’omission”. Pauvres journalistes de l’AP, même avec des formations adaptées, ils sont capables de nous ramener aux heures les plus sombres de notre histoire.