À la suite de la décision du Conseil d’État contre CNews, une Sénatrice LR a déposé une proposition de loi visant à permettre aux chaînes de télévision d’inviter les intervenants qu’elles souhaitent.
C’est une réponse du berger à la bergère : la proposition de loi de la sénatrice Marie-Claire Carrère-Gée visant à « permettre aux chaînes de télévision de choisir librement leurs intervenants » incarne la réaction de nombre d’élus à la décision d’un Conseil d’État qui appelait à « prendre en compte la diversité des courants de pensée et d’opinions représentés par l’ensemble des participants aux programmes diffusés, y compris les chroniqueurs, animateurs et invités, et pas uniquement le temps d’intervention des personnalités politiques ».
Une réaction au casse-tête du Conseil d’État
« Manifestement, l’arrêt du Conseil d’État ne va pas bien, a déclaré le rapporteur LR de cette proposition de loi. Il appartient de préciser la loi », a ajouté Marie-Claire Carrère-Gée sur Public Sénat. « Mon combat, ce n’est pas CNews. Mon combat, c’est la liberté d’expression, le pluralisme et la liberté des personnes ». Ce Haut-fonctionnaire, conseiller maître à la Cour des comptes, a été sévère avec l’instance qu’elle a accusé d’avoir « interprété » et « inventé » une interprétation de la loi de 1986 ». « De mon point de vue, c’est une décision inapplicable […] cela suppose que l’Arcom aille […] assurer le « fichage » en quelques sortes d’invités qui n’ont rien de politique ». Et la Sénatrice de s’emporter : « Mais c’est fasciste ! ».
« Certaines ont tellement envie de se payer CNews… »
Pour le rapporteur de cette proposition de loi, qui a rassemblé quelques 90 sénateurs LR mais aussi issus du groupe UC ou des Indépendants, une telle décision pourrait être politique. « Certains ont tellement envie de se payer CNews, qu’ils n’ont pas vu la portée de cet arrêt du Conseil d’État, qui est très inquiétant pour l’ensemble des libertés publiques et pour la liberté éditoriale », a‑t-elle asséné. « On va tuer le pluralisme au prétexte qu’on veut le défendre », s’est-elle ensuite offusquée. Elle a par ailleurs souligné que le partage des réactions contre cette décision tout échiquier politique confondu prouvait l’inanité d’une telle décision, prenant l’exemple de Denis Olivennes pour justifier le soulèvement de personnalités réputées situées plus à gauche de l’échiquier politique contre cette décision. Pour cette sénatrice, l’arrêt est dangereux pour tous, y compris pour les chaînes du service public.
Les arguments de la proposition de loi
Dans son exposé des motifs, la proposition de loi déplore trois points : l’obstacle installé à l’encontre des « chaînes d’opinion », qui relève selon elle du « pluralisme interne ». Vient ensuite le problème de l’identification de la sensibilité politique de l’intervenant : « tout chroniqueur devrait-il accepter un tel traitement pour prétendre être invité sur un plateau de télévision ? », indique la Sénatrice. Enfin, c’est contre l’application contestable d’un tel texte que s’est élevée Marie-Claire Carrère-Gée, qui a demandé :
« Qui serait en charge (sic) de « catégoriser » les opinions de chaque intervenant ? La direction de la chaîne, avant de faire sa programmation ? L’ARCOM, mais au vu de quels critères et avec quels droits et garanties pour les personnes concernées ? »
Voir aussi : François Jost, le militant qui demande du pluralisme à sens unique