Menée par KPMG Global Strategy Group et KPMG Avocats, une étude sur la liberté, l’indépendance journalistique et le pluralisme de la presse en Europe a révélé en mars 2024 ses conclusions. L’occasion de distinguer les critères de pluralisme de plusieurs États européens.
C’est sous la menace de la « désinformation, [des] « fake news », [comme des] soupçons d’intérêts partisans » que la question du pluralisme et de l’indépendance de la presse, cet « instrument historique de la démocratie » évolue en Europe. Si la proportion de population ayant confiance en la presse écrite a augmenté depuis 2019 (elle atteignait les 49 % en 2022), la défiance semble s’imposer quand il est question de journalisme en France. C’est dans cette perspective qu’une étude, menée par KPMG Global Strategy Group et KPMG Avocats pour le compte de l’Alliance de la Presse d’Information Générale (APIG) a tenté d’analyser la liberté journalistique et le pluralisme de la presse en Europe.
La France : un modèle exemplaire ?
À en croire cette étude, la France bénéficierait d’un cadre juridique favorable à la liberté et l’indépendance de la presse. Les lois du 29 juillet 1881 et de 1986, permettant l’introduction de différents instruments de contrôle quant aux concentrations de la presse, participeraient à cet environnement protecteur. Les rapporteurs de cette étude ne semblent donc pas nécessairement alarmés des interprétations extrêmement libérales de la loi de 1986, dont la dernière manifestation encourage le fichage politique de personnalités invités sur les plateaux de télévision… L’étude souligne aussi le caractère vertueux de la France, dont « l’indépendance et la fiabilité de l’information [seraient assurées] grâce notamment à des organes d’auto-régulation, des accords et chartes déontologiques ». Un constat que pourrait pourtant contredire le mode de nomination d’une autorité « indépendante » comme l’ARCOM, dont le président est nommé directement par le président de la République… Quant aux chartes de la profession, il semble très douteux qu’elles aient pu être utilisées de manière contraignante, notamment sur les sujets de la confusion entre journalisme et communication ou de la confusion entre le rôle de journaliste avec celui de juge ou de policier …
Les aides à la presse comme modèle d’indépendance…
Si elle peine à reconnaître que tout n’est pas parfait en France, l’étude assure surtout que les pays européens voisins font beaucoup moins bien. La protection juridique comme économique seraient ainsi beaucoup plus assurées en France que chez ses voisins. En Allemagne par exemple, il n’existe pas de système fédéral d’aides directes à la presse. En cause ? La peur des médias allemands de recevoir des fonds du gouvernement qui entacheraient leur crédibilité… On ne fera pas tant de scrupules chez nous, où les aides directes distribuées à la presse en 2022 ont atteint les 110,4 millions d’euros…
Dans les pays voisins, comme en Allemagne ou en Italie, semble toutefois se dessiner un point commun : l’interdiction de la censure. Garantie en Allemagne par l’article 5 de la Loi Fondamentale et par l’article 21 de la Constitution italienne (1948), la censure est-elle aussi expressément interdite en France ? Certains médias qui en ont été victimes pourraient affirmer le contraire… Et pour ceux qui en doutent encore, l’Union européenne les convaincra sans doute bientôt. Avec le projet de règlement European Media Freedom Act, adoptée à Bruxelles en mars 2024, la censure des plateformes comme l’indépendance des journalistes pourraient en prendre un coup. L’occasion pour l’APIG et KPMG de produire un nouveau rapport ?